L'heure bleue

29

Alessio

Dani, Dani, Dani, Dani, Dani...

Je roulais trop vite, en doublant n'importe comment. Je fis une queue de poisson à quelqu'un, qui me klaxonna longuement et furieusement.

Je pris une profonde inspiration en me rappelant des conseils de Papa et ralentis sagement.

J'avais mal à la tête.

Dani m'avait énervé.

Elle m'énervait.

Merde, ce qui s'était passé, ce n'était pas seulement de ma faute, hein ! On était tous les deux responsables, mais elle ne voulait pas m'aider à arranger les choses.

Elle s'en foutait de moi, sinon, elle serait dans la voiture avec moi à cette heure, et on parlerait calmement, et on finirait par rire de tout ça et...

Ouais, dans mes rêves quoi.

Je soupirai et resserrai les mains sur le volant.

***

Deux heures plus tard, mon téléphone sonna alors que j'arrivais à Paris. Je ralentis pour m'arrêter au feu rouge et jetai un coup d'œil à l'écran. C'était Chloé.

« Salut petite fée Clochette », dis-je en mettant le haut-parleur.

C'était vrai ce surnom débile, c'était un peu ma bonne fée. Elle était toujours sympa et adorable avec moi.

Le rire léger de Chloé emplit l'habitacle.

« Salut mon grand Alex ! Comment tu vas en ce beau dimanche tout gris ?

─ Bien, mentis-je de façon éhontée. Ca va.

─ Ce n'est pas vrai, commenta-t-elle aussitôt, le ton contrarié. (Elle avait le nez fin). Dis-moi ce qui va pas... tes parents te sont tombés dessus à cause d'hier soir, hein ? »

Je m'en foutais de ça. C'était surtout Dani qui m'était tombée dessus ! Je n'étais même pas certain qu'on était encore ensemble.

« Non, c'est pas à cause d'hier soir... enfin...

─ Oh... je vois, t'as pas réussi à te rabibocher avec Dani, c'est ça ? »

Ca me fit tout bizarre d'entendre le nom de Dani dans la bouche de Chloé.

Elles n'étaient pas amies. Elles ne se connaissaient même pas.

Ou peut-être que ça me faisait bizarre d'entendre le nom de Dani, prononcé à haute voix comme ça, parce que j'avais mal à cause d'elle. Je détestais cette sensation particulière que je ressentais à chaque fois que j'étais perturbé ou déçu par un truc qu'elle faisait, ou en l'occurrence, ne faisait pas.

En dehors d'elle, rien ne m'atteignait de cette façon si déplaisante et sournoise.

« Hé, Chloé, dis-je sans confirmer ni infirmer sa question. T'es toujours partante pour le marché de Noël ?

─ Yessss baby !!

─ Tu veux que je vienne te chercher ? Je suis en voiture. On pourrait y aller tout de suite, si ça te dit.

─ Avec plaisir ! Je suis chez moi. Passe quand tu veux. Tu sais que tu es toujours le bienvenu dans cette maison.

─ Merci. A tout de suite alors ?

─ Super ! A tout de suite ! »

Elle semblait tellement enthousiaste et impatiente que ça m'arracha un sourire. Lorsque le feu passa au vert, je redémarrai et mis le cap sur Neuilly-sur-Seine, vers la propriété des Lurier.