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Le vendredi suivant. J'attendais depuis moins de cinq minutes, adossée à la porte d'entrée de l'asso, en lisant « Quand la beauté fait mal » de Naomi Wolf, lorsqu'Alessio se pointa avec son ami cinéaste, un grand blond au sourire charmeur. Je compris immédiatement que c'était un gros dragueur, celui-là. Alessio portait un bonnet gris, ce qui lui donnait un air un peu voyou. Il avait remis sa veste en jean et le chèche vert de ce fameux jour où on avait pris un verre ensemble. Je m'obligeai à paraître indifférente mais mon rythme cardiaque s'emballa dès qu'il posa le regard sur moi. Il ne me sourit pas, et je ne lui souris pas davantage.

Je sentais qu'il restait réservé à mon égard, toujours distant. Nos humeurs étaient synchrones, pour le coup. J'avais encore en travers de la gorge le fait qu'il ne m'ait pas laissé gagner au basket. Entre autres choses.

Bonjour l'ambiance.

« Salut, Dani. Je te présente Nicolas. Nico, Daniela. »

Nicolas jeta un regard lourd de reproches à Alessio.

« Quoi encore ? » Fit ce dernier d'une voix lasse.

Son ton suggérait que Nicolas lui avait déjà cassé les pieds plus tôt dans la journée.

« Tu t'es bien gardé de me dire qu'elle était super canon, hein ? » Dit Nico, haussant les sourcils.

Alessio secoua la tête d'un air désapprobateur en fixant son copain, l'air de dire « t'es vraiment pas croyable ». La remarque de Nicolas ne me surprit guère. Ah, j'en étais sûre ! Quel charmeur, celui-là. On les flaire à des kilomètres. Je n'avais rien fait du tout qui méritât de telles éloges en plus. Je portais une veste en cuir brun, un pull kaki et un jean stratégiquement déchiré en plusieurs endroits. Ma besace en toile attendait négligemment à mes pieds. J'y glissai mon livre et souris à Nicolas, lui tendant la main.

« Ravie de te rencontrer.

─ Littéralement enchanté, Dani. (Il me fit un baise-main). Ça fait vraiment plaisir de travailler avec des créatures de ton genre.

─ Quoi, des filles ?

─ Erreur, des BELLES filles.

─ Nico », dit Alessio d'un ton d'avertissement.

Nicolas l'ignora et posa familièrement le bras sur mes épaules. Je ne pus m'empêcher de rire.

« Alors, tu nous montres ? Vite, vite ?

─ Wahou ! T'es vachement pressé, toi, dis donc.

─ Mais le temps c'est de l'argent, ma colombe... lequel argent généré par mon film sera reversé à cette association, alors, vraiment, tu devrais te réjouir que je me montre aussi professionnel.

─ « Ma colombe » ! S'offusqua Alessio, l'air indigné. Ça va pas ou quoi ? Je veux pas t'entendre l'appeler comme ça. Arrête.

─ Pourquoi pas ? »

Nous regardâmes tous deux Alessio. Je sentais qu'il cherchait ses mots.

« Parce que c'est super lourd, Nico, de te voir draguer toutes les filles qui passent, toute la sainte journée.

─ Toutes les filles qui passent ou celle-ci en particulier, Alessio ? Tu n'étais pas aussi bavard tout à l'heure, devant Salima et Pauline ?

─ Je te dis d'arrêter tes bêtises, putain. Ça m'énerve quand t'es comme ça. En plus elle a un copain, alors tu perds ton temps...

─ Oh, ça me dérange pas ! »

Je donnai un léger coup de coude à Nicolas, souriante :

« Arrête, Nicolas, ou je vais finir par te croire...

L'heure bleueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant