Le Péché Oublié 38

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 À peine quelques heures après le départ des Péchés Capitaux, un conseil fut mis en place. À la table, il y avait aussi bien des humains de tous les rangs sociaux, que des Homme-animaux, parmi les plus éveillés, et des Homme-bêtes de différents clans qui avait été fait prisonnier au fil du temps. Les trois groupes se partageaient les sièges à part égal. C'était ainsi que je l'avais décidé, que j'avais réussi à convaincre les autres. Du moins, c'était ce que je croyais.

Le premier vote fut de décider du visage qui dirigerait la ville dans cette période de transition, dans cette période de crise. Alors même que je mettais retenu de toute intervention, j'étais arrivé en tête des votes.

- Je refuse ! Il est hors de question que je prenne la tête de ce conseil et de la ville. M'exclamais-je alors.

- Pourquoi ? Vous êtes celui qui nous a tous uni, sans vous, nous serions encore dirigés par ces monstres. Me répondit alors l'un des représentants de Homme-animaux.

- Vous ne savez même pas qui je suis ! Un parfait étranger. Je suis arrivé en ville qu'il y a quelques jours !

- Bien au contraire, nous le savons parfaitement ! Vous êtes le Péché de la Vaine Gloire, Mordred. Me répondit dans le plus grand des calmes une femme-bête.

- Comment vous... Cela ne change rien, j'ai abandonné ce titre, et il n'est pas question que j'assume cette charge !

- Vous avez tellement peur du pouvoir ! De ce qu'il pourrait vous faire !

Cette femme-bête venait de me mettre devant ma plus grande peur. Depuis le moment où j'étais revenu, je savais déjà que je devrais jouer un rôle. Mais je ne voulais pas être celui qu'aurait le pouvoir. Je commençais tout juste à me séparer de mes démons, à les comprendre. Et ils voulaient que j'y retourne. Alors oui, j'avais peur de détenir tous les pouvoirs, d'être celui qui dirige cette ville. De devenir un tyran.

- Mais le conseil a choisi, vous êtes le nouveau seigneur des lieux. Poursuivit-elle.

- Vous ne comptez pas abandonner, aucun de vous ?!

Je regardais chacun des visages, les Hommes-bêtes et les Hommes-animaux semblaient déterminés, sans peur. Ce qui n'était pas le cas des humains, un groupe bien plus hétérogène dans leurs réactions. Ils se regardaient entre eux, mais aucun d'eux ne parla.

- Très bien, mais à plusieurs conditions.

Tous se regardèrent pour se consulter, tous firent un geste positif de la tête.

- La première est qu'un nouveau vote doit être fait, je ne prendrai ce rôle qu'à l'unanimité.

L'un des humains pris la parole, posant à nouveau la question. Mais encore une fois, tous levèrent la main sans hésitation.

- Très bien ! La seconde, je ne veux pas être appelé seigneur, et encore moins en avoir le titre. Quant à la troisième, ce conseil devra trouver quelqu'un avec une morale inflexible et juste, mais surtout qui n'aura pas peur de me dire lorsque je vais trop loin.

Encore une fois, tous acceptèrent, puis tous les regards se portèrent sur la femme-bête qui avait su lire en moi. Les délibérations furent courtes, sans qu'aucun moment que je n'intervienne, malgré le fait que l'envie qui me parcourait, cette petite voix qui me chuchotait au loin.

- Nous sommes donc d'accord, moi, Merea, du clan des Cerfs, serait la conscience du maire de Berffaith Dinas, Mordred.

Résigné au rôle qui m'avait été donné, les discussions reprirent. Il nous fallait nous préparer à l'attaque des Homme-bêtes. En l'état, notre cité et ses habitants n'étaient absolument pas prêts à ce qui les attendait. Bien sûr, ce n'était pas mon cas. Cette immense vague noire dévorant tout sur son passage sans aucune distinction. Je partageais ces informations avec le conseil, mon identité n'étant dorénavant plus un secret.

Au début, certains refusèrent d'agir. Après tout, le fait que j'étais présent devant eux étaient le signe que la victoire était nôtre. Je leur parlais des rencontres que j'avais faites, mais aussi de ce que j'avais dû faire pour obtenir le résultat souhaité.

Après de longues heures de discussion, une décision fut prise. Un dôme temporel serait placé sur la ville pour nous permettre d'être prêt le moment venu. La population fut informée, en même temps que les enjeux. Ainsi, plusieurs semaines passèrent sans que le soleil se couche. Ce ne fut qu'à la nuit tombée que le temps repris son cours. Cela avait été éprouvant pour moi, mais la population offrait un temps de vie extrêmement important. Et je pus compter sur le soutien inébranlable de Merea.

Bien sûr, il y eut des incidents durant ces quelques semaines à part du monde. Certains, de toutes les classes sociales, refusaient catégoriquement la situation, s'attaquant aux Hommes-bêtes et aux Hommes-animaux. Nous devions en finir avec ce cycle de la haine, ainsi, leur punition fut de vivre avec eux. Ils étaient obligés de partager des moments avec les gens qu'ils méprisaient, une peur et une haine basée sur l'ignorance et les mensonges.

Pendant ces semaines, nous ne perdirent pas de temps pour juger, leurs culpabilités ne faisaient aucun doute. Les anciens seigneurs furent enfermés, ainsi que les esclavagistes. Ils ne révéraient jamais la lumière du soleil, pourrissant dans les fonds des sous-sols, l'odeur de la mort les harcelant en permanence. Les scientifiques, quant à eux, avaient pour punition d'aider leurs victimes, les aider à se reconstruire. Et pour tous ceux dont le supplice étaient bien trop grands, les soulager en les libérant sans souffrance. C'était à eux qui fut donnée cette tâche, et dans le respect de leur personne.

Le premier groupe fut envoyé vers le groupe d'Hommes-bêtes dissidents. Ce n'était qu'au cours des longues discussions avec Merea que je pus comprendre que c'était nous qui avions permis à Holy Mother de retrouver sa sœur. Et de ce fait, la convaincre que le groupe de Holy Mother se rendent dans notre ville avec les réfugiés.

Il en fut de même avec le deuxième groupe, se rendant auprès des membres de la secte de l'Alpha de l'Obéissance par la Foi. Ainsi que le troisième groupe, celui des combattants humains qui devraient mourir sur le champ de bataille. Mais je n'avais pas eu à les convaincre, ils souhaitaient d'eux-mêmes se rendent utiles à notre nouvelle communauté. Pour permettre à notre ville de devenir un lieu de cohabitation entre plusieurs Clans.

Lors de la bataille finale, de nombreux groupes furent éparpillés. Ils avaient pour mission d'éliminer les cafards-garous qui avaient réussi à échapper au front. Leur nombre fut ridicule. Les efforts conjoints des Alphas déchus et des soldats avaient payé, associé aux Péchés Capitaux.

Quant à moi, je me rendis aussi sur le champ de bataille. Même si j'y avais occis plusieurs centaines de cafard-garous, avec mon sort d'invisibilité, mon but était tout autre. Voir mon propre combat, de ce moi du futur, contre cet ennemi que j'avais été incapable de vaincre.

J'y vis ce sort de temps totalement chaotique, pourtant localisé en un seul endroit. J'y croisai le regard de ce futur moi. Il me sembla être une personne complètement différente, il me semblait libérer de ces chaînes de tourments, alors qu'il était au bord de la mort.

La bataille remportée, le temps de la reconstruction prit sa place. Ce fut notre ville qui s'occupa de nettoyer le champ de bataille. De soigner les blessés, de faire prisonniers les Hommes-bêtes qui avaient survécu. Aucun d'eux ne se débâta, traumatisés par les horreurs de ce qu'ils avaient vu, de ce qu'ils avaient fait.

Ainsi, un autre prisonnier fut envoyé dans les profondeurs de la cité. La mère de Cebrus, Echidna. Ce qu'elle disait n'avait aucun sens, discuter avec elle ne menait à rien. Je tentais de la libérer de mon sort, mais rien n'y faisait. Il paraissait qu'elle avait subi un sort bien plus puissant.

Quant aux deux Alphas qui avaient attaqué les villes, Giant Of Water et Big Forehead, nous les avions gardés jusqu'à la fin de la bataille. Merea s'était montré très diplomate, et les deux Alphas étaient restés calmes, faisant connaissance avec ce nouveau peuple, les Hommes-animaux. Au moment du départ, ils étaient tellement attachés à eux qu'ils étaient jurés de revenir les voir.

Après plusieurs mois, je pus enfin me libérer de cette charge pour me rendre sur les terres de Gallia retrouver ma famille.

Nanatsu no Taizai : The Forgotten SinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant