Le Péché Oublié 36

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 Le corps de Cebrus gisait au milieu du cratère, sans vie. Tandis que celle qui lui avait donné la vie était toujours inconsciente, quelque part dans l'ombre des décombres.

Quant à moi, mon temps m'était dorénavant compté. Ce vieux corps ne pouvait pas me sortir de ce gouffre dans lequel je me trouvais. Le regard se portait sur cet être magnifique qui fessait fuir la nuit. Puis il fut attiré par une ombre, une silhouette qui disparut brusquement. C'était donc ainsi que cette image s'était gravée dans mon esprit.

Aucun son n'arrivait à mes oreilles, annonçant le résultat de la bataille, une fin qui m'était déjà connue. Mais enfin le dénouement complet, mon propre chapitre m'avait été révélé. Après tant de temps, il m'avait fallu attendre la toute fin pour la connaître enfin.

Quant aux destins funestes des Impérieux, cela n'avait rien d'étonnant. En face d'eux se trouvaient les membres des Péchés Capitaux. Ce que j'en savais me venait de mes propres observations de moi de ce temps, et des nombreuses histoires qui m'avaient été rapportées.

Ainsi, et comme vous vous en doutez, Last Breath, l'Impérieux de la Respiration, ne put jamais obtenir le sang tant désiré de dame Diane, le Péché du Serpent de l'Envie. Après de nombreux assauts, il finit écraser par la géante, et cela, par pure inadvertance de sa part.

Warx, l'Impérieux de la Reproduction, malgré sa résistance, finit aussi par tomber. Même si pour le voir, il avait fallu attendre que l'onde de choc détruise le dôme constitué de cafards-garous. Cela n'aurait pas été un problème pour sir King, le Péché du Grizzli de la Paresse. Une énorme plante était apparue sur le champ de bataille. Tandis qu'il avait fini avec un corps totalement nécrosé, mais toujours bien droit.

Dragornc, l'Impérieux de la Faim, fut littéralement tué par son appétit. Après que Merlin, le Péché du Sanglier de la Paresse, lui envoya un énorme sort de magie en continu, il gonfla littéralement, encore et encore. Il finit ainsi par exploser par son propre appétit, simplement parce qu'il avait eu précisément les yeux plus gros que le ventre. Dans son cas, une autre manière de parler d'orgueil.

Le cinquième Impérieux, alors encore inconnu, n'avait pas eu de chance non plus. Comment aurait-il eu la moindre possibilité de victoire contre sir Escanor, le Péché du Lion de l'Orgueil ? Celui dont le nom ne fut jamais connu, l'Impérieux du Sommeil. Il semblait avoir perdu sous les coups de la majestueuse hache de sir Escanor, sans jamais avoir fui le danger.

La plus mystérieuse des morts fut celle de l'Impérieux de l'Instinct, Anaga. Les détails me sont toujours inconnus, même des décennies après. Tout ce qui fut retrouvé était un corps découpé en deux, une entaille qui se poursuivait dans le sol. Tandis que les autres loups-garous de sa meute étaient totalement apeurés.

Pour ce qui était de sir Ban, le Péché du Renard de l'Avidité et de sir Gowther, le Péché du Bouc de la Luxure, les corps de cafards-garous s'étaient amassés autour d'eux. Le premier leur avait arraché le cœur. Tandis que le second les avait forcés à se battre entre eux, à se fracasser eux-mêmes le crâne.

Je restais ici à attendre, mon vieux corps ne pouvait plus me trimballer. Même si ce n'était pas la seule raison, bien sûr ! On ne joue pas avec le temps sans en subir les conséquences !

Enfin, je les voyais approcher. Malgré la vue, ils étaient tous impeccables, flinguant comme dans mon souvenir. Les combats qu'ils avaient menés contre toute une armée de cafards-garous, contre les Impérieux les avaient seulement fait transpirer.

- C'est vraiment toi, Mordred ? Me demanda alors tendrement dame Diane.

- Oui, c'est un plaisir de vous revoir ! Malgré mon apparence, je suis toujours bien jeune comparé à vous ! C'est un plaisir de tous vous revoir.

Un grand sourire se dessina sur mon visage ridé, il m'était impossible de le réprimer. Cela faisait tellement longtemps que je ne les avais pas vus.

- Tu as exagéré, Mordred, je t'avais pourtant interdit d'utiliser ce sort ! Treizième heure, n'est-ce pas ! Me demanda Merlin, sur un ton que je lui avais jamais entendu.

- Je n'avais pas le choix ! Le jeune impétueux, dominé par ses désirs, ne pouvait pas le battre ! Seul la sagesse qu'offre le temps le pouvait !

- Tu parles comme un vieux, Mordred ! M'envoya sans détours, Ban.

- Car je lui suis, mais à vous aussi arriva un jour ! Mon très cher Ban !

- Quand je te disais que les vieux étaient sages et puissants ! Je ne pensais pas que tu le deviendrais réellement, Mordred !

- En effet. Mais cela était un bon conseil, sir Gowther. Un très bon conseil. La vie n'a pas toujours été tendre, mais grâce à vous, le Péché qui était le mien s'est révélé à moi. Le temps m'a permis de le corriger.

- Mais qu'est-ce que tu racontes Mordred ? Tu es en train de disparaître, nous n'aurions jamais dû te laisser y aller seul ! Me dit tristement mon vieux capitaine.

- Cela ne change rien ! Mon heure était arrivée et le temps ne peut être réécrit, cela devait se passer ainsi pour que vous puissiez poursuivre votre route sans encombre.

- Je ne comprends pas tout ce que vous dites, vieux Mordred, mais moi, Escanor, Péché de l'Orgueil, je suis fier d'avoir combattu à vos côtés.

- De même, jeune Escanor, de même. Mais un jour, vous aussi comprendrez pourquoi cela était nécessaire ! La sagesse vous gagnera un jour !

Les Péchés pleuraient, pensant que le moment entre cette version aux portes de la mort et celle qu'ils avaient tous connue, rien ne s'était passé. Bien au contraire.

Les conséquences de mon acte continuaient de m'effacer un peu plus. De me faire disparaître de cette temporalité.

- Je suis désolé Mordred ! Si j'avais su, je ne t'aurais pas...

- Vous n'avez pas à vous en vouloir, capitaine Meliodas, cela était nécessaire pour la suite de votre histoire. N'en voulez pas non plus au Roi Baltra, il n'a fait que respecter les consignes du Temps.

- Nous ne t'oublierons jamais, Mordred, le Péché du Lièvre de la Vaine Gloire. Rajouta sir King.

- Merci pour ses mots. Mais je souhaiterais vous demander quelque chose, une faveur ? Demandais-je solennellement.

- Tout ce que tu voudras, Mordred, parles et je m'exécuterai ! Dis alors avec bien trop de précipitation, mon cher capitaine Meliodas.

- Je souhaite rajouter une huitième loi. Tous restèrent figés, faisant un simple signe de la tête. "Vous ne devrez jamais parler du Péché de la Vaine Gloire, et de l'existence même de cette loi".

- Non, pas question, tu es notre camarade Mordred, tu es membre des Péchés Capitaux, il n'est pas... Mais dame Diane ne put finir sa phrase.

- D'accord, si tel est ton souhait !

- Mais capitaine, on peut pas faire ça ! Rajouta sir King, le transperçant du regard.

- J'ai donné ma parole que je respecterais sa demande.

- Mais capitaine, il est l'un des nôtres...

- S'il vous plaît, ma disparition ne doit pas être une source de discorde entre vous. Votre unité vous sera plus que nécessaire. Mais surtout, je souhaiterais être égoïste, je souhaiterais que mon dernier moment, nous le passions ensemble, dans les rires et la bonne humeur. J'ai tellement attendu que ce moment revienne.

Le calme absolu se fit, même dame Diane retenait ses larmes et forçait un sourire. Nous formions maintenant un cercle, je les regardais les uns après les autres. Mon temps parmi eux avait été court, mais d'une grande intensité. Trois coups de The Last Time résonnèrent, tandis que ce vieux corps disparaissait.

- Merci, moi, Mordred, Péché du Lièvre de la Vaine Gloire, j'ai été fier de faire partie de ce groupe.

Malheureusement, je ne pus entendre aucune leurs réponses, mon corps n'était plus qu'un souvenir, seul mon Trésor Sacré, The Last Time devint la preuve que j'étais ici !

Nanatsu no Taizai : The Forgotten SinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant