Nanatsu no Taizai : The Forgotten Sin

Le conte des Trois Cervidés : Noir

 Celui qui naquit revêtu d'une robe noire comme une nuit sans lune fut nommé Cysgod, signifiant ombre dans la langue de son clan. Parmi les trois frères, il était le plus craint. Celui qui était toujours à l'écart. Celui que les parents évitaient comme une maladie incurable. Celui dont les enfants se moquaient.

Cysgod ne pouvait finalement que compter sur ses frères, ils étaient les seuls à ne pas le voir comme un mauvais présage. Ils étaient le seul à le réconforter lorsqu'il était triste. Ils étaient les seuls à prendre sa défense lorsque les autres disaient qu'il était le seul des trois à être une malédiction.

Cysgod était en effet le seul des trois à ne pas trouver sa place au sein de sa communauté. Il n'avait pas demandé à naître comme cela, il n'avait pas non plus demandé à avoir ses cornes qui poussaient comme des ronces. Il les détestait, mais ne pouvait rien y faire, elles faisaient partie de lui. Mais elles fondaient aussi son image face aux autres, la peur qu'il inspirait.

Pourtant, Cysgod faisait toutes les tâches qui lui étaient demandées, même ceux qui étaient difficiles pour un enfant, même celles trop honteuses pour un adulte. Il le faisait pour que les autres l'apprécient même un peu. Il n'avait jamais de merci, ni même un sourire, et pourtant, il continuait.

Aucun sourire, aucun merci, mais des pensées qui devenaient plus sombres.

Cette pensée, Cysgod l'a refusée, mais elle s'insinuait toujours plus profondément dans son esprit. S'il ne pouvait l'obtenir par la bonté, alors peut-être qu'il devrait l'obtenir par la peur ?

Un jour, alors qu'il arrivait dans son dixième hiver, Cysgod tomba malade. À cette annonce, beaucoup furent réjouis de cette nouvelle. Le monstre allait enfin disparaître, le mauvais présage ne serait plus. Mais cela était vrai chaque année, la maladie lui rendait toujours visite à cette période de l'année.

Ses frères étaient les seuls à se trouver à son chevet, ils étaient les seuls à prendre soin de lui, ils étaient les seuls sur lesquels il pouvait compter. Cysgod ne se rappelait pas du visage de leur mère, il se rappelait seulement ses caresses, de ses étreintes parfois trop fortes. Cysgod prenait cela comme une marque d'infection, le signe qu'elle ne voulait pas le laisser partir. Il l'a retrouvé souvent en pleure quand son étreinte se relâchait enfin.

La fièvre ne faisait que monter, ses frères se relayaient. Et un jour, une voix vint à son oreille, il ne la reconnut aucunement, c'était celle d'une femme. Elle ne lui dit que quelques mots "accepte ta différence : ta monstruosité."

Contrairement à ses frères, sa magie ne s'était pas encore manifestée. C'était cela qui leur avait permis d'entrer dans la communauté, de ne plus être considéré comme de mauvais présages. Mais pour lui, cette magie ne serait qu'un fardeau supplémentaire.

Ainsi, alors que sa fièvre était la plus forte, que la douleur était la plus intense, sa magie se manifesta en acceptant finalement cette part d'ombre, cette monstruosité qui n'avait fait que prendre plus d'ampleur de son cœur, de son esprit. Des ronces noires apparurent sur tout son être, mais les seuls témoins furent ses deux frères, affichant un sourire à cette vue. La température baissa immédiatement, la douleur s'envola, Cysgod put se lever comme un matin de réveil.

À la surprise de tous, il apparut en pleine forme, tous étaient convaincus que cet hiver serait le bon, serait le dernier pour l'abomination. Mais ils furent loin de connaître la vérité, celle de son don.

Cysgod avait ainsi décidé de vivre comme il était considéré, comme il était devenu en son for intérieur : un monstre. Sa magie était l'expression de tout ce qu'il désirait.

Il voulait avoir un ami qui ne le quitterait jamais. Une jeune fille de son clan avait perdu la vie durant l'hiver de son éveil. Alors que son corps avait rejoint la Terre-mère en son sein, il l'en extirpa. Sa magie s'insinua en elle, la faisait reprendre vie. Cysgod lui confiait toutes ses pensées, que ce soit la souffrance, la peur ou le désir. Mais il ne pouvait la cacher plus longtemps dans la forêt, l'odeur de la décomposition commençait à se répandre et devait accepter de s'en séparer. Il pourrait recommencer avec une autre.

Cysgod se rendit alors dans la forêt pour offrir son corps à la logique implacable de la nature, à la faim des loups. Une fois son méfait accomplit, des enfants le surprirent, ils l'avaient suivi et le menaçaient de tout raconter. Dans leur grande miséricorde, il lui offrait un moyen de se repentir, celui d'être leur jouet pour le reste de sa vie.

Ils commencèrent alors à lui donner des ordres, il obéissait. Mais très vite, il ne put en supporter davantage. Il se rebella et sa magie lui permit de leur faire face. Il lui permettait de renforcer son propre corps, sa propre puissance. Il les mit très vite à terre. Par instinct ou par colère, il fit pénétrer son don dans chacun de leurs corps. Ils se tortillaient de douleur, répétant : "soumettez-vous, craignez-moi, oubliez-vous, obéissez-moi". Pour ceux qui étaient devenus les victimes, ils se tortillaient de douleur, refusant ses demandes. Mais plus ils refusaient, plus la douleur devenait grande, plus les mots du cerf noir les pénétrait, plus les ronces s'imprégnaient en eux.

Ainsi, maintenant, il n'était plus seul, il y avait des personnes qui le servaient, qui lui obéissait, qui le craignait, sans jamais remettre son autorité en question. Il était devenu une force de l'ombre, grandissant, prenant pour lui les reclus, les erreurs et les incompétents. Il était devenu le bras armé du clan des Cerfs, les protégeant des attaques des Hommes qui se faisaient toujours plus nombreuses sur leur terre. Agissant dans l'ombre, sans jamais faire rejaillir le sang sur les autres membres, sur ceux qui représentaient la foi et l'ordre.

Mais malgré tout cela, bien qu'il permette au clan de vivre sans se salir les mains, il était toujours détesté, alors qu'il permettait à son clan de survivre.

Ainsi commença l'histoire de l'Alpha l'Obéissance par la Peur.