Chapitre 115

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Vers l'aube, Saeed a été le dernier à apprendre la nouvelle du décès survenu dans la nuit.

(Il pleure alors cette lourde perte car pour la première fois en vingt années, il s'est senti orphelin).



- Saeed : vous auriez dû me réveiller quelque soit l'heure tardive pour que je puisse porter mon père a la morgue ...



- Abu Anass : cela nous aurait affligé encore plus si nous nous retrouvons à enterrer deux personnes le même jour.

(à cause de sa crise cardiaque récente)



- Abu Anass : je fais dès lors appel à ton cœur pour qu'il soit patient. Je t'en prie.





- Saeed : ...... ......

(instinctivement, ses larmes recommencent donc à couler)



- Saeed : allahu Akbar... kullin nafsin zalikatil mûwt

(toute âme goûtera au venin de la mort)



- Djallaedine : reprends toi imam je t'en prie.Tu n'as pas le choix autrement qu'allons nous faire nous autres si même toi tu t'abandonnes.



- Saeed : je ne m'abandonne pas Djallaedine, je suis juste affligé par la perte de celui qui fut un père et une mère pour moi car je suis le seul à connaître la valeur de ce que je viens de perdre.




- Djallaedine : ..... .....

(le pauvre pleure alors doublement plus car il était un père pour eux tous)



Ainsi nul ne pouvait différencier l'aîné des autres car ils pleuraient tous autant qu'ils étaient comme jamais ils ne l'ont fait auparavant.

(autant vous dire qu'aucun d'eux n'a effectué la prière de fajr ce jour là)

.........................

C'est donc dans cette douleur terrible du deuil que le jour se lève autour du silence sinistre qui régnait dans le voisinage et le quartier entier.

Face au venin de la mort, ils se préparaient ainsi à procéder au lavage mortuaire et à la prière pour l'accompagner dans sa dernière demeure. C'est en silence et ensemble donc, qu'ils quittent la mosquée et font la marche en groupe jusqu'à la morgue.

Après l'attente interminable pour la procédure de réccupération du corps, ils devaient encore patienter plus d'une heure, le temps qu'il soit procédé au nécessaire pour le rituel.

L'un d'eux fais donc demi tour pour revenir avec le linceul et le flacon de oud qu'ils avaient oublié d'emporter dans la douleur.



- Bismillah !




- Vous pouvez y allez à présent...

(l'homme en question lui même laveur bénévole, les invite donc à entrer)


Sachant toutefois qu'il ne peut y avoir que quatre personnes à l'intérieur, le groupe de vingt six (26) propose à ce que les deux fils du défunt entrent en premier (car c'était leur devoir moral avant tout de laver leur père).

Djallaedine lui-même entre ensuite et alors il ne restait plus que le frère du défunt (lui même un homme assez avancé en âge)



- Saeed : vous pouvez y aller je vous en prie...

(car il avait honte d'oser vouloir y aller devant son frère)



- Le vieil homme : non ! vas - y toi plutôt. Pour ma part je guiderai la prière plus tard.




- Saeed : vous en êtes sûr ?




- Le vieil homme : je sais à quel point, c'est important pour toi alors oui ! j'en suis sûr.

(le fait qu'il s'agissait d'un lieu de deuil ne l'encourage pas à argumenter davantage avec lui)

Ainsi sans prononcer un seul mot de plus, il entre pour rejoindre les trois autres à l'intérieur.

Tout devait être au fait des gestes et du cérémonial à accomplir, afin d'être en conformité avec les textes sacrés. Ils se purifient donc au préalable avant de commencer en orientant le corps vers la Mecque.

Le lavage dure une heure ensuite avant qu'il ne soit vêti et enveloppé dans le linceul pour la toute dernière prière qui a connu autant de monde qu'on ne saurai tous les compter.

......................

Finalement plusieurs heures plus tard dans l'après-midi, les hommes étaient de retour à la mosquée pour la prière de Asr après l'enterrement.

Pendant ce temps, Sultan persistait toujours à garder le silence et à ne pas vouloir lui adresser la parole.

(il prend donc sur lui même pour lui adresser le premier mot)


- Saeed : il y'a du monde qui vient pour les condoléances mais nous pourrons nous isoler quelques instants pour discuter si tu le souhaite.



- Sultan : un fou est-il encore en mesure de discuter avec une personne saine d'esprit ?




- Saeed : je t'en prie ...

(car ni l'un ni l'autre n'avait la force de s'engager dans une dispute)




- Saeed : oublie ces propos de ma part et pardonne moi s'il te plaît.





- Sultan : ....... .......

(à ce moment et seulement à cet instant son coeur s'apaise et il baisse les yeux car cette perte devait nécessairement leur servir de leçon et ils en était conscients tous les deux)

C'est ainsi qu'il se lève calmement pour aller aider à la distribution de l'aumône sans plus prononcer un mot de plus.

Muette comme une tombeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant