Mamadou & Bineta 🖤

21-Une future belle-mère plutôt spéciale.

Pour la troisième fois en une semaine, il était encore là. Un peu plus tard que les deux premières fois, mais il était là, chez les parents de Bineta. Si Karidja avait été celle qu'il lui plaisait d'épouser, ils auraient déjà été en lune de miel.

Bineta avait fini par comprendre; il allait lui pourrir l'existence jusqu'à ce qu'elle se décide à lui parler correctement. Mais elle n'avait pas pour autant changé d'attitude. Il était hors de question qu'elle cède face à lui.

Tous les quatre - Bineta et papa, Karidja et Mamadou - installés dans les coutumiers canapés du séjour, discutaient depuis près de cinq minutes. Bineta avait déjà tenté de fuir mais son père avait réussi à l'en empêcher. Elle ne cessait de dévisager Mamadou. Dieu seul sut à combien de mouvements étranges elle avait pu soumettre ses pauvres yeux. Quant au dévisagé en question, il ne la lâchait pas des yeux, si bien qu'il souriait chaque fois qu'elle lui adressait ces regards meurtriers. Et pourtant, il entretenait une discussion avec Karidja et leur père. Ces deux là ne le ménageaient pas, ils lui posaient autant de questions que bon leur semblait: d'où il venait, ce qu'il faisait dans la vie...

Bineta faisait un effort surhumain pour feindre de ne pas les écouter, en se plongeant dans la TV.

- Papa, dit Idja au milieu d'un silence.

- Oui ma chérie.

- Il faut que j'y aille maintenant.

- Aller? Mais où ça?

- Yééé... Pa-pa, je t'avais dit que j'allais travailler avec Mélinda non? Tu as oublié?

- Ah vraiment hein... Tu sais, ton père n'est plus tout jeune. Ma mémoire peut me jouer des tours.

- Ne t'inquiète pas papa, tu n'es pas si vieux que ça.

Sur ces mots, la porte d'entrée s'ouvrit. Apparut alors une dame très ronde, d'un teint beurré, vêtue d'un simple bomba¹, chargée de sacs pleins à craquer. C'était sans l'ombre d'un doute, la maîtresse des lieux. La ressemblance entre les filles et la mère était à tomber par terre.

Idja s'empressa de rejoindre sa mère pour la libérer du gros sac en rafia. Et alors que Bineta s'apprêtait à se lever, la mère lui lança:

- Et toi là bas? Tu ne viens pas aider? Ou bien tu te crois déjà grande?

Offusquée, Bineta prit sur elle et se dépêcha de récupérer les deux sacs restants. Puis avec sa petite-sœur, elles disparurent dans la cuisine.

Mamadou se leva à son tour, adressa ses salutations les plus respectueuses à la mère.

- Fanta, voici Mamadou Cissé. Un ami à Bineta.

- Ami? Et depuis quand a-t-elle des amis qui de surcroît viennent la voir à la maison?

- Fanta, s'il te plaît.

Elle soupira alors en signe de reddition.

- Notre invité va-t-il rester dîner?

- Ow...euh...

- Je t'en prie mon fils. Tu es à peine arrivé et puis... ce soir c'est tchep.

Comment aurait-il pu dire non à une invitation au thiéboudienne?

- Avec grand plaisir.

- Très bonne décision mon fils.

- Bon eh bien, on ferait mieux de s'y mettre alors, conclut la mère avant de se lever.

***

Rentré du boulot, Mamadou ne fut pas accueilli par son épouse dans la cour. Il en déduisit qu'elle devait être en train de se préparer pour leur dîner en amoureux. Il lança son trousseau dans les airs et le rattrapa avant de pousser sur la poignée de la porte d'entrée.
En pénétrant leur chambre, il ne l'y trouva pas. Mais un bruissement très familier lui signala qu'elle était aux toilettes.

- Chérie! Je suis là!

- Un instant! Je fais pipi!

En sortant, elle tirait rudement sur son pantalon vlisco pour nouer les cordelettes.

- Ça va? On aurait dit que tu vidais un robinet.

- Ah l'enfer... Je sais pas pourquoi j'avais tellement soif aujourd'hui. Alors je me suis gavée d'eau. Et depuis j'arrête pas d'uriner.

Mamadou rigola.

- Je me demande si je devrais pas plutôt enfiler une robe, poursuivit-elle en se dirigeant vers le lit.

- Et... Pourquoi donc?

- Pour faciliter les choses au moment où j'aurai envie d'uriner dans la voiture... Il faudra que je trouve une brousse vite fait pour me mettre à l'aise mais... Avec un pantalon, ça va être compliqué.

Il se retint quelques secondes puis explosa au même moment qu'elle.

- T'es folle.

- File, répondit-elle en balayant le vent de la main.

- Je t'interdis de te changer.

- C'est pas toi qui risques de faire sur toi.

- N'empêche que t'es superbe comme ça. Ça fait un bail que je ne t'ai pas vue mettre un pantalon.

Elle tenta de cacher ses pommettes carmines en sortant de la chambre.

- Tu as trente minutes! Lança-t-elle en s'en allant.

Et comme ce fut toujours le cas, ses yeux dévorèrent cette démarche qui bousculait ses yeux dans toutes les directions.

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1: tenue traditionnelle africaine, constituée de deux pièces: un top à manches ample accompagné d'un pagne noué à la taille pour les femmes ou d'un pantalon pour les hommes.