100 - Un fantôme du passé.

20 2 0
                                    

Mamadou avait finalement réussi à renvoyer Myriam chez Morphée. Et il n'y avait plus eu de claclo chaud.

C'était très agité dans le bureau de Mamadou, même s'il s'efforçait de calmer sa femme.

– Écoute-moi ma chérie, s'il te plaît.

– Non, y a rien à écouter.

– S'il te plaît, je te le demande. Juste une minute.

– Très bien. Il te reste cinquante-neuf secondes, cinquante-quatre, cinquante-et-un...

– Bineta arrête avec ça, c'est très sérieux là.

– Quarante-neuf, quarante-et-un...

Il souffla, exaspéré.

– Très bien, conclut-il. Fais comme tu veux.

Et il sortit.

– Et où est-ce que tu comptes aller comme ça?

– Aider la petite avec ses exos, elle m'écoute au moins, elle.

Et il s'en alla. Des fois, rarement, il regrettait presque ce mariage. Mais il changeait d'avis la seconde d'après. Bineta était vraiment difficile, mais elle n'avait pas que des défauts. Seulement, parfois, il aimerait qu'elle change d'attitude, qu'elle soit un peu plus mature, et moins têtue.

Cela faisait déjà près de trente minutes qu'il aidait sa fille aînée. Elle était bien douée, mais son trop plein d'énergie la faisait parfois passer à côté de la bonne réponse.

Dans son djellaba de mousseline, Bineta s'arrêta à côté de la porte. Elle y resta quelques secondes l'air contrite. Mamadou se retourna par accident et la remarqua.

– Ouiii! S'exclama Astou, fière.

– Bravo petite sorcière.

– Merci papa!

Elle se pencha pour donner un bisou à son père, avant de remarquer la présence de sa mère. Mamadou se leva et elle le suivit.

– Maman, regarde! J'ai fait ça toute seule!

Comme toujours, c'était une petite sauterelle.

– Humm... Seule hein, tu es sûre que papa n'y est pour rien?

– Oui. Papa m'a juste aidé pour le premier. C'est pas vrai, papa?

Il se contenta de répondre par un sourire de connivence.

– Allez ma chérie, vas finir tes exercices. Maintenant que tu sais te débrouiller, je te laisse seule.

– Oui mon commandant! Répondit-elle au garde-à-vous.

– Ne crie pas si fort non plus, tu vas réveiller ta sœur.


– Shuuuut, répondit-elle en mimant le geste.

Ses parents étaient si fiers de l'avoir. Ils étaient constamment souriants tant qu'elle était là. Et là, il fallait qu'ils discutent, mais plus calmement. Bineta ne comptait pas s'excuser, ses yeux le faisaient pour elle. Ils s'éloignèrent de la chambre des filles, histoire d'être plus tranquilles.

– C'est bon, t'es prête à discuter?

Elle afficha une moue en le guignant.

– Tout ce que je veux, c'est protéger les miens.

– Oui ma chérie, et je trouve ça parfait. Par contre, tu n'es pas la seule dans cette maison à avoir des responsabilités. Tu ne peux pas décider toute seule, sans tenir compte de moi.

Elle se traîna jusqu'au lit, avant d'y poser ses fesses. Elle souffla les yeux fermés. Cinq secondes de méditation.

– Rappelle-toi tout ce qu'elle nous a fait Mam. Elle a tenté de t'envoûter, de kidnapper Astou, et Dieu seul sait quoi d'autre. Je l'ai vue dans ce marché tout à l'heure. Et elle nous a vues aussi, elle a vu combien notre bébé est devenu une fille magnifique. Je ne supporterais pas qu'il puisse lui arriver quoi que ce soit.

– Et tu as tout à fait raison.

– Alors il faut l'arrêter. Et dire qu'elle était à seulement quelques mètres de l'école de la petite, c'est risqué de la laisser libre.

– Bineta, l'affaire a déjà été classée. Souviens-toi qu'on avait fini par retirer notre plainte sous la demande de papa.

– Alors on n'aura qu'à porter plainte encore. On leur expliquera qu'on l'a retrouvée.

– Ça ne marche pas comme ça.

– Appelle ton ami qui est policier là.

– Bineta...

– Il faut qu'elle paie.

– Réfléchis un peu Bineta... ça fait si longtemps et elle n'a plus jamais rien tenté...

– Tchiiiip.

– Bineta, ne fais pas ça. C'est à cause de ça qu'on s'est disputés tout à l'heure.

– Mais comment tu veux que je ne réagisse pas? Comment est-ce que tu peux être aussi clément après ce qu'elle a fait?

– On a tous droit à une seconde chance.

– Pas elle.

– Mets-toi un peu à sa place. Tu imagines la douleur de ne pas pouvoir être mère, de voir ton mari te mettre d'autres femmes sous le nez? Franchement Bineta.

– Au point de vouloir rendre mon beau-fils fou? Au point de vouloir du mal à un bébé? Jamais de la vie Mam, jamais.

– C'est tellement plus facile de dire ça quand on est pas confronté à la situation, n'est-ce pas?

– Je t'en prie Mam, pas à moi. En plus tu me connais, comment tu peux me dire ça? Moi je ne douterais jamais de toi à ce propos.


– Très bien, conclut-il en se retournant vers sa femme, appelle la police, qu'ils aillent la chercher.

Et il ressortit de la chambre. Qu'il fût énervé ou pas, Bineta avait obtenu ce qu'elle voulait. Dès le lendemain, le commissariat allait entendre parler d'elle.

Mamadou & Bineta 🖤Où les histoires vivent. Découvrez maintenant