«Tu es belle quand tu es jalouse».
Jadis, dans l'un de ces restaurants upés de Yopougnon, Mamadou se réjouissait encore d'avoir près de lui, la belle abidjanaise.
- Que me proposes-tu? Brisa-t-il le silence.
- Comment ça?
- Je veux dire, quel plat?
- Hum... Tu peux pas choisir toi-ême.
Sacrée femme.
- Je pourrais en effet. Mais je ne suis pas d'ici comme toi alors... Je suis sûr et certain que tu ferais un choix bien plus judicieux que le mien. Ce serait vraiment dommage de passer autant de temps à Abidjan sans jamais en découvrir les saveurs culinaires.
- Hummm... C'est bon j'ai compris. Pas la peine de fatiguer les gens avec ton gros français là.
Sacrée femme.
***
Aujourd'hui à Ndar, la demoiselle devenue sa dame se tenait assise devant lui. Sa nouvelle coiffure semblait véritablement lui mener la vie dure: il faut souffrir pour être belle!
Le dîner filait sous un silence inégalable. Tandis qu'elle s'apprêtait à avaler sa nième cuillerée, une quinte de rire rauque l'arrêta. Elle vérifia autour d'elle: aucun signe visible d'hilarité.- Tu ris pourquoi? S'enquit-elle.
- C'est juste que...
- Que quoi?
- Tu te rappeles, notre premier dîner?
- Je pense que oui.
- Avoue que tu étais jalouse.
- Par rapport à quoi?
- La fille qui était passée juste à côté de notre table.
***
Après un interminable manège, la demoiselle avait fini par choisir un met indigène pour ce cher Mamadou. Et pendant qu'ils se plaisaient dans leurs plats respectifs, une autre demoiselle encore plus décolorée que Bineta, recouverte d'un prêt du corps qui épousait adéquatement ses monts et merveilles, dépassa leur table, lentement mais sûrement, exactement comme il fallait pour que toute l'attention de Mamadou se porte sur elle. Elle était magnifique vue de dos. Il n'avait jamais pu accéder à son visage. Du moins, pas sur les lieux.
Ayant remarqué son air hébété, Bineta bien que silencieuse, avait immédiatement manifesté son mécontentement par un simple regard qui tuerait plus d'un. Et par la suite, elle lui avait pourri toute sa soirée.
***
- Si toi-même tu trouves que ce que tu avais fait est bien, tu peux continuer de rire.
La situation était peut-être drôle pour Mamadou mais Bineta était sérieuse. Elle ne concevait pas un tel comportement. Elle savait les hommes «papillons», elle les connaissait pour leur «illustre infidélité». Mais pour un homme qui avait trimé afin d'obtenir un seul dîner, cela était inacceptable.
- Oh allez mon bébé, je m'excuse.
- Pour un truc que tu as fait il y a cinq ans? C'est un peu tard non?
- Pas si toi tu veux bien me l'accorder.
- Je ne te l'accorde pas. Tu seras puni jusqu'à la fin pour ça.
- Mais si tu ne m'as jamais pardonné ça, alors comment se fait-il que tu aies continué de sortir avec moi?
- ... Je crois que j'ai fini par... tomber amoureuse de vous.
- Vous?
- Oui... Toi et ton idiotie.
Sacrée femme.
Loin d'être vexé, il se contenta d'un timide sourire.
- Moi aussi je suis tombé amoureux de vous.
- Moi et mon idiotie? Rétorqua-t-elle sur un ton outré.
- Toi et ton amour... Toi et ton amour pour mon idiotie et moi.
Elle esquissa un sourire mignard et déposa sa joue sur le fin revers de son index.
- Genre, c'est moi je t'ai aimé avant que toi tu m'aimes quoi.
- Qui sait?
- Tu sais pourquoi j'ai accepté ce dîner il y a cinq ans?
- Parce que je suis irrésistible?
- En effet.
Presque scandalisé par une telle réponse, le sourire vantard de Mamadou s'effaça de but en blanc: c'est encore l'une de ses blagues.
- T'es vraiment drôle tu sais?
- Je suis sérieuse Mam.
Non pas que cela ne lui déplaise mais il peinait à s'y faire. Il n'avait pas envie qu'elle finisse par le narguer, disant que cela n'était qu'une farce. Il avait beaucoup trop envie d'y croire.
- Tu me fais marcher là.
Voyant l'incrédulité de son époux, elle soupira et releva son cou.
- Quand tu m'as appelée pour la première fois, alors que j'avais déjà déchiré et jeté tes deux cartes dans la poubelle de ma chambre, et que j'avais décroché sans une seule seconde imaginer que ça pouvait être toi... ta voix a été la première chose avec laquelle j'ai été en contact... Il n'y avait pas de visages, pas de préjugés... Il y avait juste ta voix... et mes oreilles.
- Tu veux dire... que tu es tombée amoureuse de ma voix?
- Non, pas... amoureuse amoureuse mais... même si je me suis montrée froide ce soir là, que je t'ai refusé ce dîner et que je t'ai raccroché au nez, il y avait un truc de changé. Je ne te voyais déjà plus de la même façon.
- Et... Tu me voyais comment avant l'appel?
- Tu es sûr de vouloir savoir?
- D'accord. Après l'appel.
- J'en sais rien... Ce n'était quand-même plus l'idiot qui avait failli me renverser.
- L'idiot qui avait failli te renverser, c'est comme ça que tu me voyais avant?
- Oups...
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Mamadou & Bineta 🖤
RomansaAprès deux ans de full love sur le sol sénégalais, le mariage de Mamadou & Bineta ne bat plus que d'une aile. Derrière ses airs de femme téméraire et insoumise, Bineta cache des blessures que même son mari ne suspectait. Mais lorsqu'un soir, elle re...