45- Des vérités à demi-mots.

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De la chambre de leur mère, Limata était ressortie la tête haute, comme si de rien n'était. Parce que l'heure n'était plus à se lamenter, parce que l'heure n'était plus à s'apitoyer. Mais c'était le moment de s'habituer, de se fortifier et d'accepter.

En sortant, Idja prit immédiatement la direction de la cuisine, autrement, la sauce qui bouillait déjà à haut degré aurait fini brûlée.

Limata se rassit près de sa petite-sœur.

- Ça va?

- Oui, je crois que si je mange un bout je devrais...

- Je ne parle pas de ça vêlɔ¹, je veux parler de maman.

Bineta baissa les yeux: elle n'avait donc pas réussi à cacher combien elle le vivait mal. À coup sûr, Idja avait dû passer l'information à leur aînée.

Le seul moyen par lequel les deux sœurs avaient fini par renouer fut l'aveu. Malgré toutes les belles paroles de leur mère, le soir même où Mamadou était reparti pour St-Louis, une violente dispute avait éclaté entre elles.

***

- Tu peux jouer les hypocrites bìn², toi et ton mari vous pouvez tromper Idja, maman et le monde entier! Mais moi là, vous ne m'aurez pas!

- Pourquoi tu t'acharnes à nous traiter d'hypocrites Limata? Tu ne connais même pas la moitié de l'histoire!

- Ptdr! Mais oui biensûr, c'est ça! Je ne sais pas ce que toi et ton mari vous tramez mais je vais bien le découvrir!

- Et si tu acceptais tout simplement que nous n'avons rien caché, et qu'en réalité tu ne te mets en colère que pour éviter de pleurer, parce que tu as mal d'avouer que je t'ai manqué, parce que tu as peur de risquer de me perdre encore!

- Eh bah bienvenue madame psychologie! Je te rappelle que toi tu n'es qu'une infirmière! Le seul médecin ici, c'est moi!

- Ha ha ha. C'est vrai que tu détiens le plus haut niveau d'études de toute la maison. Mais ce n'est pas parce que je n'ai pas autant étudié que toi, que je suis idiote. Par contre toi... tu ne réfléchis pas comme ta profession. Tu réfléchis exactement comme n'importe qui dans la rue aurait réfléchi.

Fatiguée de l'écouter, Sali allait la laisser en plant mais Bineta la retint par le bras.

- On s'est toujours bien entendues Limata, on a toujours tout partagé... Et je croyais que tu me connaissais mais je me suis trompée. Je me suis trompée parce que si tu me connaissais, tu saurais qu'un homme n'aurait pas suffit à me faire oublier toute - ma famille, tu saurais que je ne suis pas du genre à me laisser faire, et tu saurais que je ne fais jamais rien sans raison.

- Eh bien il faut croire que tu n'es pas ce que tu laissais croire. Ce n'est pas moi qui te connaissais mal ma sœur, c'est toi qui as changé parce qu'effectivement... la petite fille avec laquelle j'ai grandi, et que j'ai vue devenir une femme avait le sens de la famille.

- Et tu ne crois pas si bien dire.

- Écoute...

- Non. Toi écoute. J'ai toujours pris sur moi, je me suis toujours cachée derrière les blagues et les bagarres. Durant toute ma vie sous ce toit, j'ai fait semblant d'aller bien, constamment. J'ai feint le bonheur parfait... Mais derrière, même toi, tu n'aurais pas survécu à ce que j'ai enduré.

Encore et toujours cette même histoire. C'était d'abord Mamadou, leur mère et là Bineta elle-même. Sali se demandait s'il n'était pas temps d'écouter pour découvrir. Et puis, tout aux confins de son cœur, elle ne demandait qu'à avoir une raison suffisante pour retrouver sa sœur.

Mamadou & Bineta 🖤Où les histoires vivent. Découvrez maintenant