81- La petite héritière.

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Le Sahel. «L'air n'était pas tiède dè. C'était chaud, très chaud même.», dirait Bineta.

La saison des pluies ivoirienne touchait à sa fin. Salimata et Karidja en profitaient largement. Mais cela faisait bien des années que Bineta avait fait ses adieux, à moitié, à l'humidité abidjannaise qui entretenait sa peau fraîche. Elle avait appris à s'y habituer. Mais pas tellement, puisque leur maison était constamment nourrie de cette froidure conditionnée. Cela motivait certainement son désintéressement vis-à-vis des sorties.

C'était un très beau jour où la pluie mouillait les rayons de soleil. La veille, c'était la panique au village. Tout le monde courait, et tout le monde priait. Mais c'était enfin fini, la paix revenait. Les rires avaient chassé la peur. Des larmes de joie avaient coulé, pour ne plus jamais revenir. Les oiseaux avaient chanté, et le jour s'était levé.

Un nouveau cri avait égayé la voix de la nature. Un nouveau visage avait changé la face du monde. De petites mains, pour une grande destinée. Des petits pieds, dans les pas de l'humanité.

- Entrez!

- Bonjouuuur...

- Oh j'y crois pas... Limata? Idja? Nicolas?!

Ses deux sœurs se ruèrent sur elle. La plus vieille s'installa au bord du lit, et la plus jeune lui fit un câlin.

- Doucement, tu vas m'étouffer.

Ils s'esclaffèrent tous les quatre.

- Vous êtes arrivés quand?

- Ce matin même. On a voulu être là pour ton accouchement mais... notre vol a eu un soucis alors nous voilà.

- Toi Limata, je sais que tu es en congés de maternité, mais toi Nicolas, tu n'es pas allé au boulot?

- Eh bien je me suis arrangé pour être en congés tout court.

- Depuis que mon ventre se voit, il me suit partout, ajouta Limata.

Idja et Bineta rigolèrent.

- On dirait ils sont tous pareils les hommes là quoi. Mamadou a fini par me mettre sa mère sur le dos.

- C'est parce qu'on vous aime! Lâcha Nicolas.

- Moi aussi je t'aime! Lui répondit sa femme en lui envoyant une bise.

- Et toi Idja, tu as séché les cours, hein?

- Ah toi aussi grande-sœur, tu ne voulais quand-même pas que je manque ça... Il fallait bien faire des sacrifices.

- J'espère au moins que tu sais ce que tu fais.

- Oui ne t'inquiète pas. Notre grande-sœur m'a déjà fait le discours. Tu nous as tellement manqué, si tu savais...

- Vous m'avez manqué aussi. On dirait même que tu as maigri.

- C'est pas comme si elle avait de la graisse avant même, se moqua Limata.

Idja fit mine d'ignorer ses mots mais, face aux rires des autres, elle finit par s'y mettre aussi.

- Alors, dis-nous où est notre bébé.

- À la nurserie pour le moment, ils vont me la ramener tout à l'heure.

- Ah c'est une fille alors? Remarqua Idja. Je sens qu'on va bien s'amuser elle et moi.

- Mais dis-moi un peu, intervint Limata, elle est comment? Elle a quel teint? Elle te ressemble?

- Ne t'inquiète pas Limata, tu vas voir toi-même.

Un nouveau bataillon toqua à la porte de la cabine. Coumba entra la première avec son bébé. Mamadou la suivit. Puis Marcus et son épouse.

Bineta n'était sûrement pas au bout de ses visites. Et elle s'y plaisait bien. Ils se saluèrent entre eux. Et dans la foule, Bineta se rendit compte que son mari était au courant de la venue de ses sœurs.

- Donc comme ça, on me cache des choses hein.

- Avoue quand-même que c'est une belle surprise.

Elle lui sourit, et il déposa un baiser d'amour sur son front.

- Il est où le bébé?

- Ils me l'ont pas encore ramené. Mais ça ne devrait pas tarder.

Congratulations et sourires envahirent la jeune mère. Et à défaut de porter son enfant, Coumba lui donna de porter le sien. C'était un garçon, Ciré, d'un teint justement ciré comme celui de son père. Il avait bientôt un mois. Son baptême avait remué toute la maison familiale.

La petite fille n'avait pas encore été nommée, du moins, pas officiellement. Le prénom choisi par ses parents ne serait dévoilé que dans une semaine très exactement, lors de son baptême. C'était l'heure du stress post-naissance. Mamadou allait devoir se disputer longuement avec son père, concernant la manière dont serait organisé ce baptême. Conservateur, Bambouré voudrait qu'ils rentrent au village, faire les choses comme le faisaient leurs ancêtres. Moderne, Mamadou voudrait qu'ils restent en ville. En fin de compte, Bambouré entendait bien l'emporter, car, c'était le premier enfant de son premier fils. Et même s'il aurait préféré un garçon comme Ciré, cet événement ne pouvait pas être pris à la légère.

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Notre bébé montre enfin le bout de son nez. Mais une très mauvaise surprise attend Bineta. À vendredi!

Mamadou & Bineta 🖤Où les histoires vivent. Découvrez maintenant