1-Des seins gros comme des pastèques.

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Sous ce chaud soleil brûlant, les pavés unis n'avaient pas encore fini de se remettre du volcan de la veille. Et pourtant, pâtissaient-ils de nouveau sous ces cris endiablés désormais quotidiens.

– Donc, quand tu me regardes là, j'ai l'air d'avoir été faite pour allaiter?! Hein? Riposta-t-elle avec son éternel accent ivoirien.

Malgré sa minuscule voix murine, la vitesse lumière de ses mots renvoyait à la planète, une fureur insoupçonnée dans cette anatomie biquette et pouparde.

– Tchié!

Les doigts portés à ses lèvres, Mamadou se demandait dans quel enfer il s'était jeté.

– Bineta. Donc avec tes gros seins on dirait des pastèques là, tu oses dire que tu n'es pas faite pour allaiter!

– Et alors, hein? Et alors? Regarde-moi bien, poursuivit-elle en tournant sur elle-même, regarde moi bien. Tu penses que je vais gaspiller ça pour satisfaire tes caprices?

– Mes caprices? Depuis quand vouloir une progéniture est un caprice? Hein?

– Mamadou. Mamadou! Mamadou!! Ne me provoque pas!!! Tu as compris? Et puis d'ailleurs, c'est la dernière fois que tu traites mes seins de pastèques hein! Tu as compris? N'importe quoi. Tchiiip.

Elle tourna ses petits talons et repartit en trombe. Il allait continuer de l'engueuler mais fut désorienté par cet obnubilant défilé. Du haut de son mètre cinquante, Bineta avait une démarche vertigineuse. Son grand derrière, mal caché dans son pagne noué, dansotait au gré de ses foulées fouettées. Et depuis deux ans de vie conjugale, Mamadou ne savait toujours pas résister à ce spectacle.

– Cette femme là va me tuer quoi... Eh Bineta! Bineta!

Mais à quoi bon était-ce? S'il voulait une discussion civilisée, le jour était déjà mal choisi. Mais autant qu'elle était féroce, Mamadou était têtu.

– Bineta.

– Y a quoi?

Elle s'était déjà installée dans le divan, allongée dans son harmonieuse masse adipeuse. Un petit œil jeté au pied du canapé et Mamadou devina qu'elle avait envoyé paître les petits coussins. Il soupira et les ramassa.

– Bineta... Bibi, tu pourrais au moins me répondre.

Elle se contenta de le toiser avant de dévier son regard dans le vide.

– Bineta pourquoi tu me fais ça?

– Je t'ai fait quoi?

– Je te parle et tu ne me regardes même pas.

– Eh bien, j'ai forcément une raison. C'est toi qui as commencé, je ne t'ai riien demandé.

– J'ai commencé quoi Bineta? Cela fait maintes fois que nous abordons le sujet et tu refuses toujours de comprendre.

– Ah non monsieur. Celui qui refuse de comprendre ici, c'est toi. Je t'ai dit que je ne voulais pas. Est-ce de force? Ah ah.

– Bineta, nous sommes mariés.

– Et même cimentés collés.

– Alors, pourquoi veux-tu éteindre ma lignée?

– Que quoi? Mamadou, qu'est-ce que tu viens de dire?

– Je ne me répèterai pas.

– Que moi: Bineta, je veux éteindre ta lignée, c'est ça? Hé-héé... Bìn, hon kpan gon [L'enfant là me cherche palabre].

Ces invectives koulango qu'elle proférait dans ses accès de rage, il ne les comprenait jamais.

– Mamadou, écoute-moi bien. Et c'est la dernière fois que je te le dirai. Mon corps là, personne ne va le transformer en ballon, u kan gon mi duɔ? [Tu m'as bien entendu?]... Bon.

Elle se leva et e laissa en plant encore une fois. Fatigué de se disputer, il la regarda s'en aller encore une fois. Qu'allait bien pouvoir faire de cette femme?

Mamadou & Bineta 🖤Où les histoires vivent. Découvrez maintenant