94- Un corps irrésistible.

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Elle attendait encore sa réponse. Il avait mis assez de temps pour lui permettre de relever sa tête.

– 'Nël, dit-il en lui prenant les mains, je ne suis personne pour juger les autres. Chacun est libre de faire ses choix dans la vie mais il faut juste...

– Tu trouves ça mal, n'est-ce pas?

– Non, pas du tout. Enfin... les femmes sont précieuses. Et ce que je vais dire pourrait te paraître sexiste mais... les femmes c'est pas comme les hommes. C'est justement parce qu'elles sont précieuses qu'elles ont tous les droits, ne voyez pas ça comme une punition ou un devoir, c'est un droit, le droit de vous préserver. Mais si le monde pense que vous ne valez rien parce que vous vous êtes données à un homme que vous aimez sans en être l'épouse, envoyez le au diable. Ne faites pas vos choix en fonction de l'avis du monde, choisissez pour vous, pour votre bonheur. Ne faites rien juste pour plaire aux autres, parce que qu'on le veuille ou non, une femme qui se marie vierge semblera toujours avoir plus de valeur que celle qui ne l'était plus. On est en Afrique en plus. Mais le plus important n'est pas ce que les autres pensent, le plus important c'est ce que toi tu penses, l'important c'est la fin de l'histoire. Si l'homme avec lequel tu es te trouvait vile, il ne t'aurait pas épousée, alors les autres n'ont rien à redire. Et si on fait le sondage, j'ai la ferme conviction que les femmes qui se sont mariées vierges ne sont pas toutes heureuses en ménage.

– Waouh, souffla-t-elle, c'était carrément un discours là.

– C'est ce que je pense en tout cas. Pour moi, c'est pas ça le plus important. Le plus important se trouve là.

Il déposa la main de Manël contre son cœur.

– C'est juste là.

– Alors ça veut dire... que tu n'as aucun problème avec les femmes entreprenantes?

– Tu veux parler de celles qui draguent au lieu de se faire draguer?

– Exactement, répondit-elle en ricanant.

– Non, ce sont mes préférées.

Elle sourcilla.

– Non, je suis sérieux 'Nël. J'aime bien quand les femmes prennent les choses en mains comme ça, ça veut dire qu'elles n'ont pas peur, qu'elles savent ce qu'elles veulent et qu'elles n'attendent pas qu'on vienne le faire pour elles.

– Tu t'es déjà fait draguer une fois?

– Disons que j'ai arrêté de compter.

Le visage de Manël s'esclaffa, mais ses cordes vocales n'en firent rien.

– Ça va? Lui Demanda-t-il.

Le geste du lézard.

– Tu disais ça... par rapport à... toi?

Elle baissa la tête un instant, et revint lui adresser un regard en coin. Il avait sa réponse.

– Je veux que tu saches que tu ne vaux pas moins à mes yeux. Ça ne change rien et tu n'as rien à envier aux autres.

Elle baissa de nouveau la tête.

– D'ailleurs, je me demande qui a été assez con pour laisser filer une fleur comme toi.

Il ne savait pas encore qu'il n'avait pas du tout compris la situation. Elle lui posait les questions, non pour le passé, mais pour le futur. Elle voulait juste savoir ce qu'il risquait de penser d'elle si elle faisait le premier pas.

Elle posa sa deuxième paume contre la poitrine Mamadou, et dans un élan de surprise, elle s'accrocha à ses lèvres. Chaque seconde comptait, autant que chaque mouvement. Parce que chaque souffle qu'elle retenait, était un pas vers la victoire. Comment l'arrêter sans lui faire mal? Il avait raison de se poser la question. Il n'était pas amoureux de cette femme, mais il ne voulait surtout pas la blesser. Et même si elle lui plaisait bien, c'était une mauvaise idée. Il s'arracha alors à elle, peut-être un peu trop brusquement.

– 'Nël, c'est une mauvaise idée.

– Tu as dit que tu n'avais rien contre les femmes entreprenantes.

– Oui et c'est la vérité. Mais par contre, je ne peux pas te laisser commettre cette erreur.

– C'est vraiment ce que je veux. C'est toi qui as dit qu'il fallait faire les choses pour moi.

– Oui pour toi, mais ça ne veut pas dire qu'il faut foncer la tête baissée et se jeter dans un ravin.

Les yeux de Manël ne se mouillaient pas encore, mais cela n'allait plus tarder.

– Vas t'en... s'il te plaît.

Il lui adressa un regard de connivence. C'était dommage. Et dire qu'ils avaient préparé le dîner ensemble. Il avait presque franchi le seuil de la cuisine.

– Pourquoi?

Il s'arrêta.

– Pourquoi tu ne veux pas? C'est parce que je ne te plais pas? Parce que je ne suis pas assez bien pour toi? Je ne comprends pas.

Lui avouer qu'elle lui plaisait n'allait sûrement pas le sauver. Mais alors qu'il se retournait en réfléchissant à une réponse, il tombait définitivement dans le piège de la jeune femme.

Manël avait clandestinement tiré sur la fermeture éclair de son vêtement. Le chocolat de la soie entourait ses pieds. Il voulait la quitter des yeux, mais c'était plus fort que lui. Si seulement il la voyait comme une sœur, il ne serait pas dans un tel pétrin. Dieu veillant, il avait finalement trouvé le pouvoir de se retourner. Mais impossible de bouger.
Elle s'extirpa alors du cercle de tissu et vint lui faire face.

– Tu me plais autant que je te plais alors pourquoi tu essaies de fuir Mam?

– Parce que... toi et moi, ça n'ira pas loin... Bon sang...

– Mais comment peux-tu en être sûr si tu n'as même pas essayé?

– Je te rappelle que je n'ai même pas encore trouvé le moyen d'oublier mon ex.

– Eh bien elle est devant toi ta solution. Regarde, dit-elle en passant les mains de Mamadou sur les contours de sa silhouette.

– Ça ne marche pas comme ça Manël.

– Seul l'amour peut guérir les blessures de l'amour.

– C'est toi qui vas finir blessée... si tu ne me laisses pas passer.

– Quoi, tu vas me frapper?

– Jamais de la vie. Mais si je te touche... demain tu vas m'en vouloir quand je serai parti.

Je veux m'en débarasser.

– Quoi? Te débarasser de quoi?

Les mains de Mamadou se retrouvèrent dans celles de Manël.

– De ce désir insupportable qui m'envahit en ta présence.

– Manël...

– Tu ne seras pas déçu, crois-moi.

– Il ne s'agit pas de ça.

– Mais alors, il n'y a aucune raison de résister.

– Bon sang, Manël...

– Oui, Mamadou...

– Tu me fais quoi là?

– Rien, sussura-t-elle. Je prends juste les devants... comme tu aimes... Mamadou Cissé.

Mamadou & Bineta 🖤Où les histoires vivent. Découvrez maintenant