25-Ces fameux twists sénégalais.

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Le cocotier n'avait jamais cessé de virevolter, le vent n'avait jamais cessé de souffler, la pluie était rarement tombée, et le soleil avait toujours autant brillé. Les oiseaux dans le bleu, les poissons sous le bleu, les papillons entre les fleurs et les airs, les dauphins entre les eaux et les airs.

À des centaines de milliers de kilomètres, une mère se mourait petitement sous les yeux affligés de ses deux filles. Elle ne demandait qu'à avoir la troisième, ne serait-ce que quelques secondes. Mais cette dernière aurait préféré ne pas la connaître, ne pas naître d'elle, ne pas naître tout court. Elle avait choisi de l'oublier, de l'enterrer avant même qu'elle ne s'éteigne.

Un week-end paisible et enchanté, il était grand temps pour Bineta de renouveler sa coiffure. Et qui de mieux qu'Assa, l'épouse de Marcus, une coiffeuse qu'il aurait fallu créer.

Elle avait choisi avec son mari, le modèle qui leur ferait plaisir. Elle ne l'avait plus jamais fait depuis qu'ils s'étaient connus. Ces imprenables twists sénégalais, rouge grenat, qui giflaient son fessier alors qu'elle gagnait le portail bleu roi.

Assa mettait à l'œuvre tout ce qu'elle avait appris dans l'atelier de sa mère. Leur séjour s'était métamorphosé en salon de coiffure: les filets de mèche sur les carreaux, les brosses, les peignes et les ciseaux, les huiles, les crèmes, les shampoings et les nuages de karité.

Déposée sur un tabouret trop juste pour ses fesses, Bineta suivait les instructions de sa coiffeuse. En même temps, elle pouvait s'empêcher de rire de son époux qui avait décidé d'aider avec les finissions!

Elle le trouvait ridicule et pourtant on ne peut plus charmant. Mamadou ne restait cependant pas concentré sur les finitions. Il trouvait le temps de s'arrêter et de voler un baiser à sa dame. Gênée - devant Assa - elle essayait de le lui reprocher du regard. Mais il n'en faisait qu'à sa tête.

Assa les trouvait adorables, elle le trouvait audacieux et elle la trouvait chanceuse. Elle comparait son mari à celui de Bineta, comme quoi il pourrait essayer d'être romantique de temps à autres.

C'était le moment de placer les amulettes. Il avait choisi les emplacements exacts, pour chacune d'elles. Il les avait alignées avec tout son cœur. Et même si cet agencement n'avait absolument aucun sens pour elle, Bineta en était tombée amoureuse.

Assa était déjà partie, fière de son chef-d'œuvre. Les traits de Bineta étaient tirés vers le haut. Elle était déjà montée dans leur chambre, histoire de ranger sa boîte de coiffure dans la commode. Il monta à son tour, s'approcha et glissa ses doigts sur la surface bosselée des tresses.

- Tu as mal?

- Oui, un peu. Ça fait un peu mal à la base.

- Tu pourras dormir ce soir?

L'air sérieux de son mari la fit rire.

- C'est pas ma première coiffure monsieur, ça va aller.

- Tu es magnifique.

- Rien que pour monsieur Cissé.

- On sort ce soir?

- Hum... Ce n'est pas parce que j'ai un peu mal que je ne peux pas cuisiner dè.

- Je n'en doute pas une seule seconde mais... On pourrait...aller manger et après...on se promènerait un peu avant de rentrer.

- Se promener? À l'heure là?

- T'inquiète pas, je te protégerai contre le vent et les voleurs.

- Très drôle. Bon, j'ai pas la force de beaucoup parler donc c'est d'accord.

- Yes!

- Laisse-moi le temps de me rafraîchir.

- Prends tout ton temps... Je t'attendrai.

Par un pincement qui les humecta, les lèvres de Bineta réclamèrent celles de son époux. Une demande à laquelle il ne put se défiler.

Elle laissa ensuite couler l'eau sur sa peau. Et au moment où elle libéra la salle de bains, il gagna cette dernière en déshabillant sa femme du regard.

- Je fais vite, promit-il.

Elle poussa sur le battant du placard, et son choix se dessina aussitôt sous ses yeux brillants. Elle avança sa petite main, décrocha le ceintre et porta la robe à son torse. Le battant retrouva son emplacement, laissant apparaître dans la glace le reflet d'une épouse épanouie.

Mamadou & Bineta 🖤Où les histoires vivent. Découvrez maintenant