Chapitre sans titre 17

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Les heures de cours s'enchainaient.

J'avais à peine osé regarder Simon depuis sa réflexion au réfectoire. Un mélange d'incompréhension et de honte inondait tout mon corps. J'essayais de me concentrer et d'être studieux, mais je ruminais et me repassais sans cesse le film du petit déjeuner. 

Mon amoureux griffonnait sur ses cahiers, relevant à peine la tête. Son visage était fermé, ses yeux semblaient éteints...Même sa bouche m'apparaissait crispée.

 L'un comme l'autre étions restés silencieux, depuis que je m'étais donné en spectacle. Ne souhaitant plus faire d'impair, je n'avais adressé la parole à personne. Je choisissais de me murer dans le silence. Je me rendis compte de l'égoïsme dont j'avais fait part, ne prenant rien en considération excepté ma propre rage.

Pendant le cours de math, Félice me regardait avec insistance...A croire que mon sketch devant les garçons résidents, avait déjà fait le tour de l'internat des filles et de l'école. 

Quelques minutes avant la sonnerie, Simon prit mon cahier pour y inscrire un message: "Rejoins moi en salle de musique à cet intercours!"  

La typographie de la phrase était épaisse, sans aucune fioriture... Je devais aller en Salle de musique et n'en avais pas le choix...Il m'en donnait l'ordre. Une bouffée d'angoisse me submergea... Cette salle n'ayant jamais rien amené de bon dans notre relation... Mon cerveau  me délivra d'ailleurs directement des souvenirs douloureux, tel que notre dispute pour le deal de médicaments, mais surtout l' instant où pour la première fois je n'avais pas assumé mes sentiments... La première fois où j'avais pu apercevoir de la déception dans les yeux de Simon... Le lendemain de notre premier baiser, sur le tabouret de piano. A cette dernière image mentale, je devins  superstitieux, et mes mains devinrent moites. J'observai mes doigts trembler et sentis ma gorge se sérer... 

La cloche retentit...Comme me l'avait indiqué le message, je me dirigeai seul vers la pièce en question. Je pressai le pas pour arriver en premier... 

En passant devant les casiers, Je croisai Félice qui interrompit ma progression. Elle voulait échanger avec moi, mais je ne lui en laissai pas le temps. Je la gratifiai d'un sourire, et me mis à accélérer ma foulée.

Je poussai la porte de musique essoufflé... Simon était arrivé avant moi, il faisait les cent pas, comme un animal captif.

Je me figeai, ne sachant pas vraiment comment réagir. Au fond de moi, je n'avais qu'une seule envie...Le serrer dans mes bras, pour me faire pardonner. Cependant, la noirceur des yeux de mon interlocuteur m'en dissuada en moins de temps qu'il m'en fallut pour reprendre mon souffle. Je restai muet, tétanisé par une peur viscérale...

 Simon se rapprocha de moi. Il triturait l'encolure de son t-shirt comme pour se calmer, malgré cela il cassa le silence. Sa voix était tremblante mais inquisitrice:

-"Tu te prends pour qui? Hein?"

Je ne répondais pas, le laissant déverser sa colère. Il reprit:

-"Tu voulais me sauver...C'est ça hein??... Me sauver de ce pauv' type...Ce Neandertal de Vincent??"

Je balbutiai:

-"Je croyais bien faire..."

Je n'eus pas le temps de finir.

-"Tu croyais rien du tout...Comme d'habitude tu n'as pris en compte que toi... JE GERAI la SITUATION...OK! Et MONSIEUR WILHELM a cru bon de laver mon honneur en bon gentleman qu'il se croit être!!!..."

Je déglutissais péniblement. Je ne m'aventurai pas à prendre la parole, et laissai Simon continuer:

-"Ben, tu sais ce que je pense?...Tu as juste fait ça pour toi...A croire que tu aimes avoir un public...Mais en fait, tu VEUX tout faire foirer et me laisser ENCORE tout seul, avec toutes ces conneries... 

Simon reprit sa respiration, m'assénant un second coup de poignard:

-"La HONTE !! Tu dis vouloir faire les choses bien...C'est ça hein!!! Ben... MA VIE SEXUELLE ...OK...ELLE ne regarde PERSONNE!! PERSONNE tu m'entends..."

Etouffant son visage dans ses mains tremblantes...Simon pleurait... En un instant, je sentis mon cœur se rompre en mille morceaux... La rage ne définissait plus ses pleurs, seule sa tristesse sincère transparaissait dans ses yeux.

J'étais à l'origine de tout depuis le départ... Mes multiples faux pas, mes paroles blessantes... incertaines, mes changements brutaux de cap, ma rigidité et mon égaux avaient fragilisé mon âme sœur depuis le jour même où nous avions fait connaissance... Cette conclusion me lacérait l'intérieur...Je voulus hurler... Hurler si fort contre moi même...PUTAIN de minable que j'étais!!

Simon reniflait péniblement...Les larmes roulaient sur ses joues...D'une voix casi-inaudible, il murmura:

-"Quand tu auras fait le tour...Que tu seras las de moi...Quand tu verras que je ne t'apporte que des problèmes...Tu ne voudras plus de moi... Tu m'abandonneras et.... Je ne m'en relèverai pas..."  

Les larmes me montaient dans la gorge. Simon était terrifié par l'avenir que je pouvais lui offrir. Il aspirait à une vie simple, à des moments de bonheur avec moi et je ne lui proposais que l'incertitude et l'insécurité. A cette pensée, je me sentis anéanti...

Je laissai un flot de larmes inonder mon visage...J'avais peur de le perdre...tellement peur...

Ma carapace se disloquait petit à petit sous la pression de mon cœur... J'approchai tout prêt de mon amour... Submergé par mes sentiments... transporté par mes pleurs,  je tombai à ses pieds, enlaçant ses jambes de toutes mes forces. J'étouffai mes sanglots dans ses cuisses...Je ne pouvais plus m'arrêter. 

Simon posa tendrement sa paume sur le dessus de ma tête...Je reculais cette dernière de ses jambes... Il fallait que je lui dise tout ce qui occupait mes pensées, mais je n'arrivais pas à le regarder:

-"Si tu savais comme je m'en veux... Depuis le début je fais tout de travers... Je n'assume pas et ensuite j'assume au point d'en être ridicule. Je te déçois chaque jour un peu plus...Tu es tellement fort, tellement beau, tellement tout ce que j'aimerai être...Tous les jours, je me demande si ce que je vis est bien réel et je prie le ciel  pour que ce ne soit pas un rêve. Depuis que je t'ai vu...Depuis le premier jour...Je suis fou d'amour pour toi. Depuis le premier de tes regards...Tu te souviens?! Le soir de ma soirée... Tu as mis mon cœur à genou. Je ne sais même pas comment je ferai sans toi...comment l'univers ferait sans toi... Si tu me quittais, je me perdrai en route et j'en deviendrai fou... Je passerai ma vie à te contempler, à être subjugué par le moindre clignement de tes paupières, la moindre vibration de tes cils...Si tu savais comme mon être n'est que douleur quand tu es loin de moi...Comment j'ai souffert de t'abandonner...J'ai pensé mille fois en finir... me laisser partir... "

Simon plaça ses doigts sous mon menton, et m'attira vers lui:

-"Wilhelm...Mi Amor... Ne dis pas ça...Pitié... Je n'imagine pas mon monde sans toi... Je t'interdis de penser des trucs pareils! Parle moi...Tu sais que tu peux tout me dire...Dis moi... la pression que tu ressens...Quand c'est trop pour toi...Raconte moi ce qui te touche, ce qui te donne envie d'hurler...Prends ma main quand tu te perds...Je suis là... Je ne pourrais pas survivre une minute sans toi...Tu m'entends!"

Mon visage humide vint à la rencontre du sien. Je posai les lèvres sur ses joues comme pour exorciser toute cette tristesse. J'embrassai son visage tout entier et murmurai à son oreille:

-"Je te demande pardon...Je t'aime...Je t'aime..."

Nos lèvres se scellèrent dans un ultime baiser, doux et humide.

Je plantai mon regard dans celui de mon amour:

-"Jamais je ne t'abandonnerai mon amour...Jamais... Je t'en fais la promesse..."




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