La Fée Marraine (tomes 1 & 2)

✨Il était une fois...

Prologue

Il était une fois dans le royaume de Rivecœur, une princesse qui était tombée amoureuse d'un prince tout à fait charmant. Elle l'épousa, devint reine et en fit son roi. Quelques années plus tard, son ventre s'arrondit pour son plus grand bonheur et elle accoucha de deux garçons, aussi dissemblables que le jour l'est de la nuit. Le premier était le plus joli bébé qu'on eut pu voir, avec un ravissant visage rond et de doux yeux noisette. Le second était d'une laideur effroyable, au point que ses parents eurent bien du mal à poser le regard sur lui. Il était aussi laid que son frère était beau, son visage était déformé et sans aucune harmonie, son corps était difforme, l'une de ses jambes plus courte que l'autre, et sur sa tête poussait déjà une petite mèche rousse en forme de virgule. L'aîné reçut le nom de Caspian, du nom d'un ancêtre de la reine qui avait été célèbre pour sa beauté, et le second fut prénommé Cédric, en l'honneur d'un aïeul du roi. Très ennuyés, les parents se demandaient comment ils avaient pu avoir deux enfants si différents, lorsqu'une fée leur apparut. C'était la Fée des Lilas, célèbre à travers tout le continent.

— Ne craignez rien pour vos enfants, Majestés, dit-elle en agitant une baguette étincelante au-dessus des berceaux. Je leur promets à tous les deux d'être heureux, mais ils auront quelques épreuves à surmonter avant de trouver le véritable bonheur. Je puis vous promettre que Cédric aura autant d'esprit qu'il a de laideur, mais que la beauté de Caspian lui causera de grands ennuis, dont il sortira plus fort.

— Ne pouvez-vous pas arranger un peu la figure de Cédric ? plaida la reine.

— Je ne peux le rendre plus beau qu'il ne l'est, répondit la fée. Cependant, je lui accorde d'avoir tant de sagesse et d'esprit qu'il pourra en faire don à la personne qu'il aimera le mieux. Et pour ne pas défavoriser Caspian, je le dote de courage et de bienveillance, car il en aura grand besoin.

Gracieusement, elle saupoudra les petits princes endormis d'une pincée d'étincelles, puis elle quitta le palais sans écouter les prières de la reine. Elle devait se rendre dans le royaume d'Houdancœur pour se pencher sur le berceau d'un autre prince nouveau-né, mais les astres l'avaient prévenue qu'elle avait encore un peu de temps devant elle. Désireuse de profiter du beau temps printanier, elle décida de voyager à cheval plutôt qu'en volant. La route la plus directe entre Rivecœur et Houdancœur traversait le royaume d'Armancœur, très agréable à cette période de l'année, et la fée se laissa un peu distraire.

Son détour la mena jusqu'à une très belle maison à la lisière de la capitale d'Armancœur, dont la façade était ornée d'une immense glycine. Tandis qu'elle admirait les fleurs, le rire d'un très jeune enfant lui parvint par les fenêtres ouvertes. Incapable de résister à sa curiosité, elle s'annonça dans le manoir et apprit que la maîtresse de maison venait de donner naissance à un petit garçon.

— Je suis la Fée des Lilas, s'annonça-t-elle auprès des jeunes parents. Si vous le désirez, je peux être la marraine de votre enfant.

Personne n'aurait eu l'idée saugrenue de refuser les faveurs d'une fée, surtout une fée aussi puissante. Et même si le nouveau-né avait déjà pour marraine la reine Catherine d'Armancœur, il reçut tout de même une pincée d'étincelles de la part de la Fée des Lilas, exactement comme les princes jumeaux de Rivecœur. Avec un grand sourire, il agita ses petites mains comme pour attraper le scintillement, attendrissant le cœur de la fée.

— Je te fais le même don qu'au prince Caspian, dit-elle en souriant. Tu seras courageux et bienveillant, cela te permettra de surmonter les peines et les difficultés. À cela, j'ajoute un sens du style qui te rendra célèbre bien au-delà des frontières d'Armancœur.

Satisfaite de son don, elle salua les parents émerveillés, puis reprit sa route en se hâtant un peu parce qu'elle ne voulait pas non plus arriver en retard pour la naissance du prince Solen d'Houdancœur.