SIMON
Enfermé dans une pièce sombre et aveugle, Simon avait complètement perdu la notion du temps. Il avait été sur le point d'aller se coucher lorsqu'on l'avait attaqué. En se basant sur la douleur lancinante à la base de son crâne et à la sensation poisseuse de ses doigts lorsqu'il y avait touché prudemment, il avait conclu qu'il avait été assommé par derrière, avant d'avoir le temps de voir ou comprendre quoi que ce soit.
Il s'était réveillé ici, avec une migraine épouvantable, un goût de bile dans la bouche, et aucune idée de l'endroit où il se trouvait ni depuis quand il s'y trouvait. Un homme masqué, dont il n'était pas certain de reconnaître la voix même avec l'esprit clair, avait déposé un seau devant lui, avec l'ordre de parler au-dessus. Simon avait croisé les bras sur son torse et secoué la tête, indiquant sans un mot son refus. Cela avait été une tragique erreur. Lorsque l'homme en avait eu fini avec lui, sa tête n'était plus du tout sa seule source de douleur.
— Tu n'as besoin que de ta bouche pour produire ces diamants, avait grondé son geôlier. Tes jambes, tes bras et même tes yeux... tout cela ne m'est pas utile et je n'hésiterai pas à t'en priver, la prochaine fois que tu tenteras de faire la forte tête. À présent, parle !
Puis il était parti, emmenant la lumière avec lui, et le cauchemar avait recommencé. Endolori de partout, la joue brûlante d'une gifle magistrale, les doigts gourds d'avoir été écrasés sous le talon d'une botte et au moins une jambe blessée au point de ne pas pouvoir la bouger, Simon n'avait eu d'autre choix que d'obéir.
En premier lieu, il avait hurlé, crié à s'en casser la voix. Pas pour appeler à l'aide, non, puisqu'il se doutait bien que son geôlier l'avait enfermé dans un lieu d'où personne ne pourrait l'entendre. Mais il avait maudit son ravisseur, avait employé les mots les plus laids qu'il connaissait, les insultes et les injures, les promesses de vengeance et de violence, au moins pour se sentir un peu mieux. Cela avait eu le mérite de produire des perles et des joyaux énormes, les cris les plus violents donnant naissance aux plus beaux des diamants. C'était à la fois étonnamment satisfaisant, et en même temps horriblement douloureux parce que les arêtes des diamants lui coupaient les lèvres et les joues. Il aurait pu apprécier l'ironie de la fée s'il ne l'avait à ce point détestée pour l'avoir placé dans cette situation.
Ensuite, lorsque la colère s'estompa, elle fut remplacée par une forme de détermination, alors qu'il tâchait de se rassurer en se disant que sa disparition ne passerait pas longtemps inaperçue et qu'on viendrait à son secours. Connaissant Caspian, il ne doutait pas un seul instant qu'il retournerait le château du sol au plafond pour le retrouver.
— Je dois seulement tenir le coup, déclara-t-il fermement. Attendre, et espérer.
Et puisqu'il était censé remplir le seau, autant faire exactement cela. Cela lui épargnerait de nouveaux coups lorsque son ravisseur reviendrait, et lorsque l'homme serait attrapé et condamné, lui pourrait récupérer toutes ces perles pour sa fortune personnelle. Cela tomberait à pic pour constituer sa dot et son trousseau de mariage.
— Commençons par faire la liste de ce trousseau, soupira-t-il. Au moins, cela m'occupera l'esprit avec quelque chose de plus agréable.
C'était loin d'être facile à faire, assis dans le noir, dans le froid et l'humidité, sans rien pour fixer son esprit, mais il n'avait rien d'autre à faire. Alors il continua à parler à voix haute, réfléchissant à la tenue qu'il porterait et se demandant si Cen accepterait de la coudre pour lui. Il s'égara au sujet des fleurs et des dragées, du repas et de la musique, tout plutôt que se concentrer sur sa douleur et sa peur.
Mais le temps s'écoulait, sans que rien ne vienne troubler son monologue. Il avait bien une montre, mais sans lumière, impossible de lire l'heure. Au bout d'un instant, il voulut essayer de se mettre debout, et hurla lorsque toute sa jambe protesta, cédant sous son poids. Il se rattrapa sur son poignet, fragilisé par un coup, et la souffrance explosa dans tout son bras, le faisant se recroqueviller au sol, sanglotant de douleur. Un long moment de misère s'écoula avant qu'il ne trouve le courage de se redresser, avec d'infinies précautions. Il ne pensait pas avoir quoi que ce soit de cassé, toutefois il était évident qu'il ne pouvait compter ni sur sa jambe ni sur son poignet pour le moment.
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La Fée Marraine (tomes 1 & 2)
RomanceIl était une fois, entre les royaumes d'Armancœur, Rivecœur et Houdancœur, la Fée des Lilas que le hasard avait dotée de nombreux filleuls. À vouloir faire le bien, il arrive que des maladresses se produisent, et tous les dons ne sont pas toujours p...