🤕[BONUS] Leçons de danse

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CÉDRIC

Cédric devait bien se rendre à l'évidence : prendre des leçons de danse avec Solen était beaucoup plus agréable qu'avec Caspian. Non pas que son frère y ait été pour quelque chose dans l'épreuve qu'avaient été ces leçons, mais la différence était remarquable. Peut-être aussi que la patience du maître à danser d'Houdancœur jouait beaucoup, là où leur professeure en Rivecœur avait été du genre à très vite s'agacer. Dans tous les cas, Cédric s'émerveillait de progresser sans douleur et sans peine, de retenir les enchaînements de pas et surtout de recevoir des compliments pour ses progrès.

— Comment va ta jambe ? demanda Solen en lui tendant un verre d'eau.

Ils faisaient une pause après une grosse demi-heure à répéter les pas de la polka, et Cédric se sentait merveilleusement bien d'avoir pu faire de l'exercice sans souffrir. Parfois il se demandait s'il parviendrait un jour à compter comme acquise cette nouvelle aisance dans son corps, ou s'il passerait le restant de sa vie à savourer le fait de pouvoir bouger sans restriction.

— Un peu fatiguée, mais pas davantage que l'autre, répondit-il avec un large sourire. Et tes pieds ?

— Disons qu'il me reste encore quelques orteils que tes bottes ont épargnés jusque-là, mais je ne m'avancerai pas à affirmer que cela va durer.

— Je te ferai un bisou magique ce soir, rétorqua-t-il.

— J'y compte bien ! Plus sérieusement, je suis heureux de partager ça avec toi. Je n'ai pas eu beaucoup l'occasion de danser avec quelqu'un que j'appréciais jusque-là, alors c'est un peu un nouveau rêve que tu réalises pour moi.

Intérieurement, Cédric songea qu'il était prêt à réaliser tous les rêves de Solen, un par un, comme son prince réalisait les siens. Souriant, il s'amusa à lui fourrer un doigt dans les côtes pour le chatouiller.

— Tu m'as non seulement montré que j'étais parfaitement capable de danser, mais tu m'as surtout donné terriblement envie de danser avec toi aussi souvent que possible. J'ai hâte de m'élancer à ton bras sur la piste lors du bal pour éblouir tous nos invités. Plus encore, j'ai hâte de passer une soirée entière à t'enlacer au milieu des têtes couronnées du continent.

— Seriez-vous un brin possessif, Votre Éminente Altesse ? se moqua Solen.

— Pourrais-tu me le reprocher ? rit-il. Mais c'est plutôt que j'ai passé les dernières années à envier mon frère riant et valsant au bras de ses amis, alors qu'il m'était horriblement douloureux ne serait-ce que de rester debout auprès d'un buffet. Alors à présent que je peux à mon tour danser tout mon content avec le plus beau garçon du royaume à mon bras, je ne vais pas m'en priver...

— Je suis certain que je ne serai pas le seul à t'inviter. Je vais peut-être même devoir me battre pour obtenir plus d'une danse avec toi !

Jusqu'à peu de temps auparavant, Cédric aurait balayé cette affirmation sans y croire, mais depuis Solen avait fait un travail redoutable pour le convaincre du charme apporté par son don. Il avait désormais mieux conscience de sa nouvelle allure et il songea avec une pointe d'inquiétude que son amoureux avait raison, et qu'il ne serait peut-être pas si facile que ça de passer leur soirée à danser.

— Qu'à cela ne tienne ! répliqua-t-il. Nous n'aurons qu'à nous éclipser dans le jardin d'hiver ou sur un balcon pour danser rien que tous les deux.

— Je trouverai bien un moyen de t'enlever, confirma joyeusement Solen avec son sourire de canaille.

Amusés et complices, ils partagèrent un petit rire tout en prenant ensemble le temps de souffler et de se rafraîchir avant la deuxième partie de leur leçon. Cédric était impatient de s'y remettre, parce qu'il se découvrait une passion pour la danse comme pour l'escrime, pour ces activités sollicitant l'ensemble de son corps et surtout des mouvements qu'il n'avait jamais pensé pouvoir effectuer un jour.

— Êtes-vous prêts à reprendre, Altesses ? demanda le maître à danser en revenant dans la pièce. Nous allons délaisser un instant la polka pour revenir à la valse.

Dorénavant, il n'avait plus besoin de corriger leur position, puisqu'ils avaient tous les deux parfaitement retenu les endroits où ils étaient censés se toucher. Certes, cela ne les empêchait pas de placer leurs mains légèrement trop bas, s'enlaçant plus étroitement que nécessaire, tout comme ils avaient tendance à entremêler leurs doigts plus qu'à simplement presser leurs mains l'une contre l'autre, mais après tout ils faisaient ce qu'ils voulaient.

— Certaines valses sont plus audacieuses, expliqua leur professeur. Il est fort probable que l'orchestre en joue une ou deux le soir du bal. Vous devez donc être capables de vous adapter à ces variations, et cela commence pas se tenir un peu plus proches l'un de l'autre, voilà, comme ça c'est très bien !

Ils étaient cette fois réellement enlacés, leurs bras fermement passés dans leurs dos alors que leurs mains liées se tenaient à hauteur de leurs visages. Les yeux bruns de Solen brillaient d'un petit éclat de défi moqueur, alors il haussa un sourcil en retour, s'amusant de l'entendre rire.

C'était tout de même une bonne chose qu'ils soient amants depuis déjà quelques mois, car sans cela Cédric n'avait aucune idée de comment il aurait pu se tenir si proche de Solen sans perdre la tête. Ils étaient désormais suffisamment à l'aise l'un avec l'autre pour se toucher avec naturel et sans le moindre malaise. Suivant les conseils du maître à danser, Cédric pouvait enlacer Solen, le faire virevolter ou simplement se presser contre lui, en rajouter un peu pour rire, certain que ses gestes seraient bien accueillis. Il n'y avait aucune maladresse apportée par un désir ignoré ou refoulé, aucune crainte de se montrer déplacé dans ses mouvements, parce qu'ils se connaissaient par cœur et qu'ils se faisaient confiance.

— Vous vous en sortez à merveille ! complimenta le maître à danser. J'aimerais que tous mes élèves soient aussi doués que vous, c'est à croire que vous avez été faits pour la danse ! Très bel enchaînement, prince Cédric ! Maintenant, inversez vos position.

Sagement, ils obtempérèrent et Cédric se retrouva les yeux plongés dans ceux de Solen. Un instant, il eut le souffle coupé par une vague d'affection et de désir, et puis son amoureux agita les sourcils d'un air gouailleur et ce fut plus fort que lui : il éclata de rire.

— Pas de ça le soir du bal ! le gronda Solen avec un sourire gigantesque. Sans quoi nous allons avoir des ennuis.

— Promis, mon soleil.

La Fée Marraine (tomes 1 & 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant