🫅24. Les aveux

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JUSTINIEN

Justinien fulminait en remontant le couloir vers sa chambre, Simon à ses côtés. Il comprenait la curiosité de Maxime et plus encore l'inquiétude d'Auguste, mais ne digérait pas leur façon de presser Simon de questions auxquelles il ne pouvait pas répondre. Ce n'était pas parce qu'ils étaient princes — et futur roi dans le cas d'Auguste — qu'ils pouvaient se permettre ce genre de comportement.

— Peut-on parler un instant ? demanda-t-il alors qu'ils arrivaient devant sa chambre. Et ensuite, promis, je vous laisse aller dormir.

Il n'aimait pas du tout le sourire tendu qui avait remplacé l'expression ouverte et heureuse de Simon plus tôt dans la soirée, mais il y avait vraiment des choses qu'il tenait à lui dire, et cela ne pouvait plus attendre. Alors il ouvrit la porte de sa chambre et s'effaça pour laisser entrer son compagnon avant de le rejoindre. Simon s'était immobilisé au milieu de la pièce éclairée par les premières lueurs de l'aube, l'air si fermé que Justinien sentit son cœur dégringoler dans ses chaussures.

— Je vous demande pardon, dit-il aussitôt. Je me suis sans doute montré présomptueux en m'interposant de la sorte entre mes frères et vous, et en exigeant d'être l'intermédiaire de vos échanges...

Quelque chose s'éclaira dans l'expression de Simon dont tout le visage se transforma, retrouvant ce sourire que Justinien aimait tant. Il tira son ardoise de sa veste et inscrivit quelques lignes avant de la lui tendre, les joues un peu rouges.

Vous avez été adorable et très courageux de prendre ma défense. Je vous remercie de vous être interposé comme un preux chevalier.

Justinien n'avait encore jamais défendu qui que ce soit, et soudain il se sentait héroïque, surtout en voyant le regard timide de Simon qui avait vraisemblablement rassemblé son courage pour écrire ces mots. Cela lui donna la force d'aller au bout de l'idée qu'il retournait dans sa tête depuis quelques heures.

— Tout le monde devrait se battre pour vous, répondit-il doucement. Gus et Max n'ont cessé de nous rabâcher les oreilles au sujet de Cen et Ann, mais je n'oublie pas la chance que j'ai moi de vous avoir à mes côtés.

Emporté par sa soudaine bouffée de courage et cette impression de pouvoir faire face au monde entier, il osa faire un pas en avant pour prendre les mains de Simon dans les siennes et chercher son regard.

— Cela fait un moment que je cherche comment formuler mes mots, continua-t-il, et ma résolution n'en est que plus forte depuis ce soir. Mais puisque je ne parviens pas à mettre de l'ordre dans mes idées, vous allez devoir comme toujours écouter l'embrouillamini de mes pensées, en espérant que je ne gâche pas tout en me montrant maladroit...

Perdu dans les yeux verts si attentifs de Simon, son cœur battait tellement fort qu'il lui semblait ne rien entendre d'autre. Il s'était juré de se montrer courageux, c'était le moment ou jamais d'être honnête avant qu'il ne soit trop tard.

— Cela va bientôt faire trois mois que vous m'avez remis sur le droit chemin, ce terrible soir d'hiver, et j'ai chaque jour l'impression que vous avez fait bien davantage que me guider jusqu'au château. Votre compagnie m'est devenue indispensable, Simon. Vous êtes un ami merveilleux, mais également un assistant remarquable, un cavalier adorable, et surtout vous me complétez mieux que quiconque. Cette nuit, j'ai été absolument enchanté de passer le bal tout entier à votre bras et je... j'espère que...

Sa gorge commençait à se nouer, retenant les mots qu'il répétait pourtant dans sa tête depuis des heures, et même des jours. Les mains de Simon se resserrèrent autour des siennes, son regard brillant d'une émotion plus douce et plus vive à la fois. Prenant une profonde inspiration, Justinien essaya de passer outre la boule dans sa gorge pour parvenir à parler.

La Fée Marraine (tomes 1 & 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant