Chapitre 91 - REMUS LUPIN

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Après deux semaines passées à la maison, Remus retrouva James, Sirius et Peter dans le Poudlard Express qui traversait les paysages enneigés de la Grande-Bretagne vers le nord du pays. Alors que le train filait à grande vitesse, les Maraudeurs s'étaient trouvés un compartiment au calme.

Remus avait fini par lâcher son exemplaire de La Gazette du sorcier où un titre tragique (comme souvent ces temps-ci) attirait l'œil sur la une : TROIS SORCIERS DE LA BRIGADE DES TIREURS DE BAGUETTES MAGIQUES RETROUVES MORTS APRES UNE EMBUSCADE DE MANGEMORTS. Il avait de plus en plus de mal à lire les actualités, ces temps-ci, lui qui avait toujours pris soin de s'informer. Mais les catastrophes semblaient se succéder (des attaques de Mangemorts sur des villes de Moldus, des catastrophes naturelles qui n'avaient rien de naturelles, des attaques de Vrykolakas sur des coins stratégiques détenus par le Ministère de la Magie, des assassinats dans les familles des Aurors, des membres de la Garde du Ministère ou sur quiconque s'opposait de près ou de loin aux Mangemorts...). Ces titres horribles semblaient faire partie de leur quotidien, à présent. Les gens s'y étaient habitués. On avait peur le temps de lire l'article et on continuait à vivre comme si de rien n'était.

La nuit était déjà tombée alors que le Poudlard Express traversait l'Ecosse. Remus expliquait aux trois autres les avancées de ses travaux sur les souvenirs de Kiara Potter.

- Ça ne va pas être simple, dit-il, comme vous le savez, les derniers souvenirs qu'il nous reste de Kiara sont enfermés dans des boîtes à énigmes. J'ai ramené celle qui contient le plus de souvenirs chez moi pour travailler dessus.

- Alors ? demanda James.

Il semblait compter sur lui débloquer la situation. Apparemment, pour lui, si Remus n'y arrivait pas, alors personne ne pourrait y arriver. Mais il devait avouer que James avait raison : il était celui de la bande qui était le plus à l'aise avec la logique et les énigmes.

- Alors je pense que j'ai de grandes chances d'y arriver mais il va me falloir du temps, répondit-il, il y a plusieurs couches d'énigmes à résoudre avant de pouvoir déverrouiller ce coffre. Durant les vacances, j'ai réussi à en débloquer deux mais là, je galère un peu sur la troisième. Mais j'y arriverai, avec le temps.

Il se tut et regarda par la fenêtre ; elle était d'un noir d'encre et tout ce qu'il put percevoir fut son propre reflet pâle. Lui-même s'étonna de se voir ainsi, aussi soucieux. Et tout cela n'était pas dû qu'aux multiples horribles nouvelles que l'on apprenait par le prisme de La Gazette du sorcier. Quelque chose d'autre le tracassait et il savait qu'il ne devait pas le garder pour lui.

Il se tourna vers ses amis.

- Est-ce que vous trouvez comme moi qu'Eugénie est un peu bizarre, ces temps-ci ? demanda-t-il.

Sirius fronça les sourcils.

- Bizarre ? Comment ça ?

- Je ne sais pas... Je l'ai trouvée un peu distante durant toute la dernière semaine qu'on a passé à Poudlard. Et durant les vacances, elle a à peine répondu à mes lettres. Et lorsqu'elle le faisait, j'avais presque l'impression qu'elle répondait à contrecœur. Vous avez noté quelque chose de spécial, vous ?

Au premier coup d'œil, Remus sut que la réponse était oui. James, Sirius et Peter avaient échangé un regard éloquent. Mais, étrangement, ils ne semblaient pas vouloir partager ce qu'ils savaient avec lui.

- Non, dit Peter avec beaucoup de maladresse, moi je la trouve aussi normale que d'habitude. Hein, les gars ?

Remus lui adressa un regard noir.

- Vous savez quelque chose, dit-il, dites-le-moi, ça ne sert à rien de me laisser dans l'ignorance.

Sirius ouvrit la bouche, résolu ; il était comme ça quand il allait dire la vérité. Mais James le devança :

- On n'a rien remarqué dans le comportement d'Eugénie, dit-il, mais si tu vois qu'elle est bizarre, je pense savoir pourquoi.

- Vraiment ?

- Ça ne peut qu'être à cause de la dispute que vous avez eu le week-end où il y a eu le match entre Serdaigle et Serpentard, tu te souviens ? Quand Eugénie voulait savoir ce que tu avais comme maladie.

- Oh...

Il n'y pensait plus. Eugénie lui avait toujours laissé son « jardin secret » autour de sa prétendue maladie. Mais ces derniers temps, il ne savait pourquoi, elle commençait à poser des questions.

- Entre Eugénie et toi, c'est du sérieux, pas vrai ? fit Sirius. Je veux dire... Ça n'a rien d'une histoire toute bête comme entre Amelia et moi ?

Remus eut un rire.

- Tu te rends compte que je suis avec elle depuis deux ans, Patmol ? Je pense qu'on peut dire que c'est un peu plus sérieux que ce que tu as avec Amelia, oui. Où veux-tu en venir ?

- Eh bien, si c'est si sérieux, c'est que tu dois lui faire confiance. Et si tu lui fais confiance, alors peut-être que tu pourrais lui dire ton secret.

Remus soupira.

- Ce n'est pas aussi simple...

Il y avait déjà pensé, en vérité. Mais il s'était toujours découragé de le faire. Il avait trop peur que, dégoûtée ou effrayée, Eugénie ne le lâche.

- C'est au contraire tout ce qu'il y a de plus simple, intervint James, je suis d'accord avec Patmol : tu es avec Eugénie depuis deux ans, tu peux lui faire confiance, non ?

- Je... Ce n'est pas une question de confiance, mais... Imaginez qu'elle en parle à ses amies ? Elle dit tout, à ses amies. Mary et Lily le sauraient et... Non, Dumbledore a été clair : personne ne doit savoir.

- Nous, on le sait, fit remarquer Peter, Jenna aussi le sait.

- Pour Jenna et vous trois, c'était un accident ; vous n'étiez pas censés le savoir. Ne vous méprenez pas, je suis content, au final, que vous le sachiez.

- Alors voilà ! s'exclama presque Sirius. Peut-être que tu seras tout aussi content qu'Eugénie le sache, non ?

- La situation est trop grave pour se contenter d'un « peut-être », Sirius. Et puis... Avec vous, je n'ai pas eu à briser la promesse que j'ai faite à Dumbledore. Mais si je le dis à Eugénie... Non, je ne peux pas faire ça.

- Est-ce que tu te vois faire ta vie avec Eugénie ? demanda James.

Remus réfléchit ; pas longtemps, cependant.

- Oui, dit-il, oui, je pense.

- Alors tu ne pourras pas lui cacher toute ta vie qu'à chaque pleine lune, il t'arrive ce... ce petit problème de fourrure.

Les Maraudeurs éclatèrent de rire face à cette façon alambiquée de parler de la lycanthropie de Remus. A défaut d'autres choses, James lui avait clairement redonné le sourire.

Mais il redevint vite sérieux :

- J'ai fait une promesse à Dumbledore, dit-il, du moins pour les sept années à passer à Poudlard. Quand nous serons sortis de l'école, si Eugénie et moi nous sommes toujours ensemble, alors là je lui dirai.

Il regarda son reflet sur la vitre d'un noir d'encre. Là, je lui dirai, se répéta-t-il intérieurement, comme pour s'en convaincre.

Les Maraudeurs et l'Ascension du Phénix (tome 6)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant