Les Maraudeurs et l'Ascension du Phénix (tome 6)

Chapitre 109 - SEVERUS ROGUE

- Alohomora !

Narguise avait soufflé l'incantation tout bas alors qu'ils se trouvaient au beau milieu du couloir noir qui longeait la classe de Potions. Dans un clac ! retentissant, la porte de la salle se déverrouilla toute seule et Severus n'eut qu'à la pousser pour l'ouvrir dans un grincement désagréable.

Il était étrange de voir la salle de classe où ils avaient leurs cours de Potions ainsi. Alors que Severus, Regulus et Narguise pénétraient dans la pièce, ils découvrirent un endroit plongé dans le noir, vide comme une tombe et silencieuse. Par les grandes fenêtres, au fond, derrière le bureau où Slughorn s'installait habituellement, l'eau du lac clapotait tranquillement, dispersant les rayons argentés d'une lune pleine, dehors.

- Dépêchons-nous, murmura Regulus derrière lui, si on nous chope en train d'essayer de voler un professeur, on est mal.

Severus eut un ricanement.

- Je te paris ce que tu veux que ce bon vieux Slughorn est plongé dans le plus profond des sommeils, en ce moment.

- Slughorn, peut-être. Mais Rusard ou Peeves, c'est une autre paire de manche. Si tu nous disais où se trouve ce fichu souvenir, qu'on en finisse.

- Suivez-moi.

Severus traversa la salle de classe vide, suivi comme son ombre par Regulus et Narguise. Ils contournèrent l'imposant bureau vide de Slughorn pour se pencher sur un tiroir. C'était un véritable fouillis. Ils durent sortir des tas de dossiers d'élèves (certains, dataient même de plusieurs années en arrière). Enfin, la petite fiole remplie d'un liquide argenté apparut à leurs yeux.

Elle était posée, tout au fond du tiroir, sur un petit piédestal en forme de corbeau.

- Tu es sûr que c'est ça, Rogue ? souffla Narguise. On aurait bonne mine s'il s'agissait d'un souvenir totalement différent.

- J'espère au moins que ce « souvenir totalement différent » ne sera pas un moment intime de Slughorn, ricana Regulus.

- Que voulez-vous que ce soit d'autre ? s'irrita Severus. On sait que Dumbledore, Maugrey et Potter cherchent à lui soutirer un souvenir utile au Seigneur des Ténèbres et qu'est-ce qu'il cache sous son bureau ? Un souvenir. C'est forcément ça.

- Justement, s'entêta Narguise, si ce souvenir est si précieux, je ne trouve pas qu'il soit si bien... Non, attends, Rogue, ne...

Trop tard. Severus avait déjà retiré la fiole du piédestal. Alors, à son grand étonnement, le corbeau en argent sur lequel elle reposait s'anima. L'oiseau ouvrit le bec et un cri incroyablement perçant éclata dans la classe. Severus dut se boucher les oreilles. Il était sûr que ce boucan devait s'entendre dans tout le château ; ou du moins, dans tout le cachot.

- Merde ! s'exclama Regulus. C'est une alarme ! Slughorn a mis une foutue alarme !

Severus se dépêcha de ranger la fiole dans sa cape de sorcier avant de se redresser.

- Raison de plus pour ne pas traîner ! s'écria-t-il pour essayer tant bien que mal de couvrir cet effroyable cri. On se tire avant que Slughorn ne débarque !

Ils sortirent en trombe de la salle de classe, trop paniqués pour penser à refermer derrière eux. Mais ils n'allèrent pas bien loin dans le couloir. A peine leur course commencée que Narguise eut le réflexe de les attraper tous les deux par leurs capes pour les entraîner avec elle. Ils s'enfermèrent dans un placard juste au moment où la lumière bleue d'une baguette magique s'était mise à luire dans le couloir sombre.

Tapis dans leur placard, Severus, Regulus et Narguise regardèrent par les interstices ce qui se passait. Sa baguette allumée, Slughorn passa à côté d'eux sans même les remarquer. Les cheveux en bazar, la mine un peu perdue, il se dirigeait vers la salle de classe.

- Non, non, non ! maugréait-il pour lui-même en passant devant leur placard. Ne me dites pas qu'ils sont allés jusque-là !

Puis, il disparut dans sa classe. Le piédestal en forme de corbeau – qui hurlait toujours tellement fort qu'ils continuaient de l'entendre comme s'ils se trouvaient juste devant – se tut finalement et le silence revint dans les cachots.

- On ferait peut-être mieux de partir, souffla Regulus.

- Trop risqué, répondit Narguise en un murmure, Slughorn n'est pas loin et il est sur ses gardes. Mieux vaut attendre et se faire discret.

Severus approuva d'un signe de la tête. Il tapota la fiole qui se trouvait toujours dans la poche de sa cape de sorcier. Le silence fut finalement troublé par une nouvelle voix qui retentit depuis la salle de classe.

- Qu'est-ce que cela ? Est-ce vous qui faites tout ce boucan au beau milieu de la nuit, Horace ?

- C'est vous, Podmore ?

Severus comprit que Slughorn parlait avec cet étrange fantôme qu'il croisait parfois dans les couloirs du château, à galoper sur son cheval translucide à balancer sa tête tranchée comme s'il s'agissait d'une masse d'arme.

- Figurez-vous... Figurez-vous que quelqu'un m'a volé quelque chose, reprit Slughorn d'une voix blanche.

- Vraiment ? Mais qui cela pourrait-il être ? s'étonna la fantôme nommé Podmore. Ça ne peut pas être Peeves... Un élève, pensez-vous ?

Lorsque Slughorn reprit la parole, il avait un ton noir qui ne lui était pas familier.

- Non, j'ai mon idée sur l'identité du voleur mais... Je ne le pensais pas capable d'en venir à... à ça ! Podmore ? Voudriez-vous monter au bureau du directeur ? Réveillez-le, tirez-le du lit s'il le faut mais je dois avoir une petite conversation avec ce cher professeur Dumbledore !

- Oh... Eh bien... Très bien, Horace. J'y vais au galop.

L'instant après, l'image d'un cavalier sans tête translucide passa en un éclair dans le couloir, juste à côté du placard où Severus, Regulus et Narguise restaient tapis. Le silence revint. Durant quelques minutes, il ne se passa rien. Puis, lentement, fébrile et pâle comme la mort, Slughorn sortit de sa salle de classe, la ferma à double-tour, et traversa le couloir d'un pas vif et déterminé. Mais, lorsqu'il passa devant leur placard, Severus ne manqua pas de noter qu'il paraissait pâle comme un linge, à la lueur froide de sa baguette magique.

Quelques minutes après son départ, Regulus, Narguise et lui purent enfin quitter ce placard et ils regagnèrent silencieusement leur salle commune. Comme lors de leur départ, elle était déserte. C'était tant mieux car Severus avait eu la crainte d'être surpris par Nausicaa, ce qui n'aurait pas facilité les choses.

- C'était moins une, souffla Regulus en se laissant tomber sur l'une des chaises réparties autour de la longue table de la salle commune.

- Mieux vaut ne pas traîner, dit Narguise, Rogue ? Tu vas chercher ta pensine ?

Il acquiesça et descendit les escaliers quatre par quatre vers son dortoir. Celui-ci était toujours soumis aux ronflements terriblement bruyants de Mulciber joints à ceux de Crabbe, plus loin dans l'obscurité du dortoir. Le plus silencieusement possible, Severus se rendit vers son lit, s'accroupit et passa sa main en-dessous. Elle rencontra sa malle, son chaudron et quelques linges sales qui traînaient là.

- C'est pas vrai, soupira-t-il en se baissant davantage pour regarder sous son lit.

Mais il dut rapidement se rendre à l'évidence. Son sang se glaça. C'était impossible... Et pourtant...

Sa pensine avait disparu.