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173.

Au commissariat du 16e.

Kévin débarrasse le plan de travail face au panneau blanc de l'open-space du commissariat. Il enlève les dossiers des nouvelles enquêtes et dépose le carton du dossier Avenue Mercedes.

Elle voudrait lui dire merci. Il est onze heures du soir. Les locaux du commissariat sont presque vides. Lola le regarde vider le carton de manière méthodique. C'est un technicien, un cerveau de scientifique. Il fractionne la pile de documents par décès et par ordre chronologique. Il se tourne vers elle.

- Je ne connais pas aussi bien le dossier que toi malgré mes cours du soir - Elle sourit. Il connaît très bien le dossier. - On doit partir du principe que la réponse se trouve là-dedans sous forme d'une erreur ou d'un mensonge.

Elle acquiesce.

- On est bien d'accord que si ce n'est pas Dunia, on en conclut qu'il n'y a plus que trois solutions, non, quatre solutions à cette histoire. Quatre meurtriers potentiels.

- Quatre ?

- Les crimes sont liés à Matteo, attends, cinq meurtriers possiblement.

- Cinq ? demande Lola. Kévin l'ignore :

- Allons-y. On part du fait, et c'est un postulat, que Matteo est celui que l'on fait souffrir.

Il va au tableau et écrit.

Celui qui souffre, celui qui en tire un bénéfice.

Matteo est inscrit en dessous de la première partie de la phrase.

- Cinq ? redemande Lola.

- Oui, on va compter Dunia quand même. Donc, un : Matteo. Proposition d'un autodestructeur. C'est un traumatisé, sexuellement abusé, qui ne peut être heureux. Il tue les gens qui le rendent heureux. Les femmes. Il rejette sa colère contre celle qui l'a abusé. Il tue Edouard le petit-ami de Danny qui a peut-être compris ce qu'il se passait. C'est une hypothèse. On a écarté Matteo dans notre enquête peut-être à tort. Il n'avait pas kidnappé Gersande, mais on l'a interrogé alors qu'elle était chez lui et qu'il le savait. Pour les autres meurtres, disons, pour les meurtres, il n'a pas d'alibi sérieux. Manon, Edouard, Valentine et Olympe. On est d'accord ?

Lola hausse les sourcils. Mais il a raison.

- Oui.

- Juste, ça ne colle pas avec la mort d'Olympe. Il l'aurait tuée comme pour Eddy, parce qu'elle savait quelque chose ? Et Valentine, il la tue au moment où il aurait besoin d'elle ? A la mort de son père et lorsque sa famille le rejette ? Est-ce qu'il l'aurait tuée justement parce qu'elle avait cette possibilité de le sauver ? Je ne crois pas. Au final c'est un romantique, il aime les femmes.

- Tu réussis à l'accuser et à le disculper dans la même minute.

- Mais il n'y a rien qui le disculpe de manière radicale.

Kévin ne dit rien pendant un moment. Il fait glisser sa langue sur ses dents. C'est son tic lorsqu'il réfléchit. Il reprend :

- Deux : il y a son frère qui a disparu. Victor. Il a le mobile de la vengeance pour la mort de sa petite-amie, Manon. Il s'est évaporé, carrément. S'il est le roi des fantômes il peut s'occuper de Gersande. Ça implique plein de choses et ce serait un gros retournement de situation mais il se peut que ce soit lui l'assassin.

- Et si Jules l'avait rencontré ? Dans le chalet en Savoie ?

Lola s'approche de lui.

- Imagine si mon frère avait été assassiné ? Que sa mort avait été mise en scène ?

Avenue MercedesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant