Chapitre 28

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Pdv omniscient

4 décembre 2020


- Si tu comptes tuer quelqu'un ce soir, sache que je te suis pas. 

- Tu m'aiderais même pas à enterrer le corps ? 

Ken scruta Jad un petit moment à la recherche d'une lueur de sincérité dans ce qu'elle venait de dire mais rien. Jad ne comptait définitivement pas faire de mal à Lucille ce soir, mais ça il le savait déjà. 

- Ça va, je rigole, elle se justifia quand elle comprit qu'il la regardait avec insistance. 

- Je sais, il souffla en souriant. En revanche Edna a des doutes. Pourquoi t'as pris tes bandes ? 

- Au cas où, elle lui répondit avec franchise dans un petit haussement d'épaules, comme si ce n'était qu'un petit détail. 

Ken savait que Jad avait des parts d'ombres, comme tout le monde. Lui aussi en avait eu et en avait toujours. Par exemple, il se savait sujet à la dépression, Jad elle, elle était en colère et pour canaliser tout  ça, elle faisait du karaté. Il la connaissait assez bien pour savoir qu'elle avait choisi de méditer cette fois-ci. Ça faisait partie des choses qu'elle avait apprises en pratiquant son art martial et quand elle ne pouvait pas se déchaîner sur les mannequins en bois, alors elle méditait. 

- Pourquoi tu veux aller chez elle ? Il lui demanda finalement ? 

- Pour comprendre. Je veux savoir pourquoi elle est allé aussi loin, elle soupira. Je sais pas moi, elle avait mille façon de t'atteindre mais là c'est trop. 

Elle marqua une courte pause, comme si elle voulait dire quelque chose qu'elle n'osait pas puis reprit :

- Et puis peut être que je compte lui faire comprendre qu'elle n'a plus intérêt à refaire ce genre de chose. 

- Je suis tellement désolé, Jad. 

- Ne t'excuse pas pour quelque chose que tu n'as pas fait, elle le gronda presque en se tournant vers lui alors qu'il entamait une marche arrière pour rejoindre la route. Personne ne l'a vu venir. 

- Toi tu l'a senti dès le début qu'elle était pas nette. J'aurais dû m'en inquiéter un peu plus. 

- Arrête de te blâmer, elle lui chuchota en passant sa main dans sa nuque. 

Ken ferma les yeux, juste une seconde pour ne pas perdre de vue la route. Il suffisait juste qu'elle pose ne serait-ce qu'un doigt sur lui pour qu'il se calme et l'effet se produisit instantanément. Il se risqua à jeter un coup d'oeil dans sa direction mais son regard à elle était déjà perdu dans le vide, bien que son pouce continuait à faire des ronds dans sa nuque. Il espérait que ce petit passage chez Lucille apaiserait un peu les choses. Il savait que ça ne résoudrait pas le plus gros du problème et que le mal était déjà fait, mais il ne supportait plus de voir Jad triste, contrariée, blessée, effrayée. Il voulait qu'elle ait la paix une bonne fois pour toute. Il s'en remettait au karma, ou à Dieu, il ne savait pas vraiment, il n'avait jamais su s'il y croyait. Il sentait juste qu'une force supérieure était présente et qu'elle s'acharnait un peu trop sur la femme qu'il aimait, et s'en était assez. 

*

Jad se donnait une contenance devant Ken. Elle savait qu'elle paraissait confiante et sûre d'elle quant à la décision d'aller directement voir Lucille. Pourtant à l'intérieur, il n'en était rien et c'était bien pour ça qu'elle avait demandé à Ken de venir avec elle. Elle ne savait pas trop ce qu'elle allait faire une fois arrivée là-bas. Tantôt elle aurait voulu lui arracher la tête, tantôt elle aurait voulu juste lui parler et la mettre en garde.
Elle savait que la première option n'était même pas une option et qu'il ne lui en restait qu'une, pourtant malgré sa séance de méditation, elle ne parvenait pas à se persuader qu'elle ne pétterait pas les plombs une fois devant elle. Elle se rendit compte à ce moment-là, même si au fond, elle en avait déjà conscience, qu'elle était à la limite du burn-out, et pas juste l'expression, un vrai burn-out. 
Elle sentit son corps s'alourdir instantanément, et subitement elle eut envie de se rouler dans sa couette et dormir jusqu'à ce que les choses se passent et reviennent à la normale. Elle songea même à quitter l'école vétérinaire, abandonner les études, puis la voix de la raison l'avait ramené à la réalité. Illico. 

On Est Amoureux Qu'une Fois Où les histoires vivent. Découvrez maintenant