Tome 2 : Chapitre 6

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14 Août 2020

Jad

7h30 du matin

C'est ma mère qui m'a annoncé la nouvelle. J'ai su rien qu'au timbre de sa voix tremblante que j'avais eu raison, quelque chose n'allait pas.

Il a pris une balle dans la poitrine, celle-ci l'a juste déstabilisé grâce au gilet par balle qu'il portait. Une autre lui a frôlé les tempes, il s'en est sortit avec des brûlures à cause de la poudre. La dernière a touché l'artère au niveau de sa cuisse, il a perdu beaucoup de sang, trop même.

Maintenant il est dans le coma, entre la vie et la mort, à Paris.

Les flics ont organisé une rencontre sous haute discrétion entre Naïm et notre famille libanaise, celle que je ne connais pas et que je ne veux jamais connaître. Pour preuve, ils l'ont peut être tué.

Malins, fourbes, menteurs. Le monde de la drogue est pourris mais il s'accroche à vous, même quand vous voulez vous en sortir et les conséquences, elles sont sans équivoques.

Combien d'hommes morts dans des règlements de compte ? Combien de jeunes qui n'ont pas pu trouver leur voie avant que cette merde prenne leur vie ? Parce qu'il y a les règlements de comptes dont on parle dans les journaux parce qu'ils se sont déroulés aux yeux de tous, mais il y a les règlements de comptes qui se font dans le silence le plus total. Et croyez moi, il y en a beaucoup plus qui sont passés sous silence.

Encore une graine pleine de beauté que la rue enterre.

Je n'ai pas su quoi dire, les mots n'ont pas réussis à atteindre mes lèvres. À l'intérieur, j'ai hurlé de toutes mes forces, je me suis contrôlé pour pas tout casser autour de moi, j'ai serré mon poing très fort jusqu'à sentir du sang couler sur mon poignet. Bao est rentré dans le salon à ce moment-là et je crois que si ça n'avait pas été le cas, j'aurais tout explosé, ça aurait été une réplique parfaite de l'état de mon coeur. Complètement explosé. Ou presque.

Il m'a observé quelques secondes avant de réagir. Il s'est approché de moi tranquillement et m'a pris le téléphone des mains, ma mère toujours au bout du fil. Il a pris le relais, il a écouté ce que ma mère venait de me dire, il a encaissé le coup avec moi, il est comme ça Bao, il a trop d'empathie. Ça fait de lui un ami en or.

Il s'est éclipsé dans la salle de bain, toujours en pleine conversation puis il est revenu avec une serviette pour éponger le sang sur ma main. Je me suis laissée faire, j'étais complètement tétanisé, incapable de faire un seul mouvement. Puis j'ai eu envie de vomir, ça m'a pris d'un coup et c'est sûrement ça qui m'a fait sortir de ma torpeur. Bao m'a suivit, il m'a tenu les cheveux et a passé un gant mouillé sur ma nuque. J'ai eu du mal à me relever comme si ça me demandait un effort insurmontable et bêtement, c'est ce petit détail qui m'a fait éclater en sanglots. J'ai pleinement réalisé à ce moment-là, j'ai eu la sensation d'une déchirure au niveau de mon thorax, ensuite ça m'a brûlé pire qu'une remonté acide, j'ai presque cru que j'étais en train de me désintégrer.

Je me suis laissé tombé par terre sur le sol du couloir, j'ai ressentit un énorme vide, un trou noir juste en dessous de moi. Je me suis forcé à le regarder de loin, puis je me suis demandé pour qu'elle raison je n'y retournerais pas cette fois-ci, dans ce putain de trou noir. Presque tout s'y prêtait cette fois-ci. Trop d'accidents, trop de morts, trop de vies en danger. Tout ça pour quoi ? J'en ai presque voulu à mon père et à mon oncle. Alors c'était ça leur héritages, des années de galères, encore des morts, encore des allers-retours dans ces putains de couloirs blancs à l'odeur de mort ?

- Merde, fais chier, je grogne doucement. Putain, putain, putain.

Je hurle maintenant, et malgré l'adrénaline qui me prends tout le corps, j'ai pleinement conscience des os de ma main qui s'écrasent contre le carrelage.

On Est Amoureux Qu'une Fois Où les histoires vivent. Découvrez maintenant