Chapitre 26 . Partie 2

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7 mai 2018

« Les yeux vers le ciel qui pleut, on se lève et y'a un autre de nos frère qui tombe »

Naïm

Jad venait tout juste de s'éclipser dans la grande maison et Naïm s'appuya contre le dossier de la chaise de jardin sur laquelle il était assis. Il observa Jia-li qui regardait si sa fille était bien partie et se retourna vers lui. Il sentit son cœur cogner un peu plus fort dans sa poitrine quand il vu la peine qui se dégageait de ses yeux. Il ne voulait faire de peine à personne mais il savait que c'était peine perdue et le pire c'était que le plus dure était encore à venir.

- Elle ne sait toujours pas ? elle questionna en tentant de sourire.

- Non, il chuchota presque en baissant les yeux.

- Tu penses que c'est mieux comme ça ?

- Pour l'instant il ne faut pas qu'elle sache, je ne veux pas prendre de risque.

- Et ton plan tu penses que c'est la seule solution ?

- Oui, c'est la plus honnête, il affirma sans hésiter. Au pire j'en prends pour dix ans, c'est pas si terrible.

- Tu te moque de moi ? Ce sera dix ans de perdus Naïm.

- Je sais ma mère me le répète assez, il souffla en se passant une main sur le visage. Mais depuis que Jad est revenu, j'ai vraiment envie d'arrêter, j'ai jamais voulu ça non plus.

- Je sais mon grand.

Au fond, il avait envie de chialer, mais il n'avait plus le choix. Il avait fait en sorte que tout ce passe comme il l'avait prévu. Le petit trafic n'impliquait pas de bande organisé et quand Naïm avait dû reprendre l'affaire il avait fait en sorte d'avoir besoin de personne appart pour les transports. Il avait embauché pas plus de trois dealeur et l'un deux s'était démarqué, il était devenu un grand ami et les années n'avaient jamais mis en doute sa loyauté. Jalil était très intelligent et si Naïm n'avait pas souvent eu affaire aux flics, c'était en partit grâce à lui. Alors il avait pensé à lui léguer l'affaire, il n'avait plus envie de faire partit de ce milieu, il ne l'avait jamais voulu mais il avait promis au père de Jad de finir ce que le cancer lui avait empêché de faire. Il avait pratiquement terminé maintenant et il avait commencé à réfléchir à comment il allait faire.

Il pensa à son père et ses mâchoires se crispèrent. Avec les années, il avait su qu'il avait été tué par un membre de sa famille libanaise et depuis il avait toujours eu une petite soif de vengeance. Mais tuer un homme n'était pas dans les valeurs de la famille et il n'était pas question de salir la mémoire de son père et de son oncle ni de se mettre à dos Jia-li, sa mère et Jad qui ne lui pardonnerait jamais. Alors la seule solution pour lui était de se dénoncer à la police et dénoncer les membres de sa famille qui s'occupaient des transports de marchandise du Liban jusqu'à la France. Il coopérerait avec la police leur renseignerait les horaires et les lieux de livraison, peut-être qu'avec ça il prendrait moins de dix ans. Il s'était renseigné sur la peine maximale qu'il pouvait prendre et il s'était dit qu'il pouvait y survivre, que si c'était le prix à payer pour mener une vie plus stable et protéger sa famille, alors, il pourrait le supporter. Après ça, il quitterait la France, ou peut-être qu'il resterait, si la police fait bien son travail et qu'il ne risque plus sa vie après avoir dénoncé toute sa famille, celle que Jad ne connaissait même pas et qu'il aurait jamais voulu connaitre. Dans tous les cas, qu'il se dénonce ou pas il risquait sa vie, mais il avait décidé de faire les choses légalement pour une fois et il savait que quand Jad apprendrait toute l'histoire, en sachant ça, elle finirait par lui pardonner.

Au fond, c'était ce qui lui faisait le plus peur. De perdre Jad à cause de toute cette histoire. Elle était si sensible sur le sujet, elle évitait d'en parler depuis que leurs pères étaient décédés, depuis qu'elle pensait que tout ça avait cessé. Il avait dû lui dire qu'il avait promis à son père de ne pas suivre l'affaire juste avant qu'il parte, c'était le plus gros mensonge qu'il lui avait dit et il avait toujours un gout amer dans la bouche quand il y repensait. Il n'avait pas eu le choix et sa décision de partir à Taiwan juste après avait rendu les choses plus faciles pour lui mais maintenant qu'elle était revenue, c'était de plus en plus dur de lui mentir tous les jours. Il savait aussi que ce n'était pas la meilleure solution de lui cacher tout ça, que quand elle apprendrait que tout le monde autour d'elle était au courant sauf elle, elle en voudrait à sa mère, à Shadia, à Ken aussi, qui était devenu quelqu'un d'important pour elle. Mais égoïstement, il voulait profiter du temps qu'il lui restait avec elle avant d'aller en prison, il n'avait pas envie qu'elle ne lui parle plus avant qu'il s'en aille.

- Vous parlez du sujet qui fâche ? Questionna Shadia qui s'installa à côté de son fils.

- Oui, je lui demandais s'il était sûr de lui pour ce qu'il comptait faire, acquiesça Jia-li en souriant à la mère de Naïm. Il est courageux ton fils.

- Je suis sure que c'est la meilleure des solutions, il ne s'en sortira jamais sinon. Ça n'a jamais été du gros trafique et il a fait attention toute ces années. Je lui fais confiance.

- Moi aussi Shadia, ça me fend juste le cœur qu'il risque de passer dix ans derrière les barreaux.

- Ca va te paraitre triste ce que je vais te dire, mais je serais plus rassurée qu'il soit là-bas plutôt qu'en liberté alors qu'il aura dénoncé les autres fous. Ils ont tué Issam ils n'hésiteront pas pour Naïm.

- Et si on arrêtait de parler de ça aujourd'hui ? proposa Naïm qui sentait son cœur se serrer en entendant sa mère évoquer la mort de son père.

Si il faisait ça, c'était aussi beaucoup pour elle, parce qu'elle ne tenait pas à apprendre un bon matin que son fils s'est fait tuer dans un règlement de compte. Il ne le voulait pas et ça l'avait conforté dans sa décision.

- Tu as raison, c'est bientôt l'heure d'aller au cimetière, approuva Jia-li qui se leva de sa chaise. Je vais appeler Jad.

- Laisse-là encore un peu au téléphone avec Ken, lui fit remarquer Naïm en lui offrant un clin d'œil.

- Il faut vraiment que tu me dises ce qu'il y a entre eux.

- Il y a un truc entre Jad et Ken ? Gloussa presque sa mère qui semblait déjà s'être remise de la conversation précédente. Je l'adore ce petit et tous ses amis, des amours.

- Surtout Hakim, on sait, soupira Naïm en levant les yeux au ciel. C'est presque si tu le préfères pas à moi, tout ça parce qu'il reprend toujours trois assiettes.

Il observa sa mère et Jia-li rire en discutant de ses amis et son cœur se détendit. Il fallait qu'il profite de ce genre de moment, il ne savait pas ce que l'avenir réservait pour lui mais il avait conscience que peut-importe ce qu'il allait se passer, il devait se nourrir de ce genre d'instant avec les trois femmes de sa vie, celles pour qui il n'hésitait pas à sacrifier dix ans de sa vie.

On Est Amoureux Qu'une Fois Où les histoires vivent. Découvrez maintenant