Miss-Parfaite et délinquante à problèmes (histoire lesbienne)

Chapitre 120

_ Je n'aurai jamais pensé te voir ici, Effy.

_ Moi... non plus.

Mon cerveau avait court-circuité. Je n'avais jamais imaginé la revoir après l'incident dans les toilettes. Je l'avais seulement entrevue lors du tribunal après le saccage de sa chambre, mais j'étais dans un état déplorable et je ne m'en rappelais quasiment plus. Mais, alors que de base je pensais que la revoir referait sortir une haine profonde, là, je me sentais juste blasée. Très choquée, certes, mais pas en colère, et pas triste.

_ Tu n'as pas beaucoup changé depuis l'époque, dit-elle en riant, le sourire aux lèvres.

_ C'est vrai...

Comment pouvait-elle être si... "normale" ? Après tout ce qu'il s'était passé ? Elle m'avait laissé devenir l'ennemie public du collège sans même réagir ! Elle avait organisé avec ses potes ce moment aux toilettes pour me faire souffrir ! Putain de merde ! Finalement, ouais, j'étais énervée. Ava venait d'arriver derrière moi quand justement, une jeune femme se glissa aux côtés de Charlotte. Je la vis poser sa main dans son dos, et elle demanda :

_ Chérie, que fais-tu ? Les enchères vont commencer, tu dois te préparer.

J'ouvris grand les yeux. Quoi ? Chérie ? Cette connasse homophobe qui voulait me faire du mal en me traitant de "gouine" il y a quasiment dix ans était en couple avec une femme ?

Une haine viscérale s'empara de moi. Sans même faire attention à Ava, je fis demi-tour, et sortis du bâtiment pour aller dans le grand jardin à l'arrière du château. Au fond, il y avait une petite cabane en pierre, et c'était parfait. De toutes mes forces, je mis un coup de poing dans le mur. Puis un autre. Puis encore un autre. J'avais mal, mais j'avais besoin de lâcher la pression.

J'ai sombré quasiment au plus bas à cause de cette femme. J'ai cru l'aimer, je l'ai laissé me découvrir, je l'ai laissé me toucher. Elle m'a trahi, m'a laissé tomber, m'a insulté, a laissé les gens me frapper devant elle. C'est à cause d'elle que j'ai fini en garde-à-vue, que j'ai passé des nuits dans des caniveaux et des squats, que j'ai une des pires réputations possible... Sans trop savoir pourquoi, l'image d'Ava apparut dans mon esprit, et je m'arrêtai d'un coup. À cause de Charlotte, j'avais sombré, mais ça avait fait de moi la personne que je suis aujourd'hui. Et même si je ne comprenais pas pourquoi, Ava m'aimait ainsi. Alors, je devrais plutôt remercier Charlotte de m'avoir abimée. J'ai gagné beaucoup plus que j'ai perdu.

Soudainement apaisée, je m'assis sur un banc à côté de la cabane, et regardai mes mains. Je saignais un peu... J'avais déconné... Mais la boxe m'avait toujours calmée. Je devrais peut-être m'y remettre... J'étirais mes doigts lorsqu'une main se posa dessus, et me fit frissonner.

_ Je ne t'ai pas vu arriver...

_ Tu étais... dans ta bulle...

Ava caressa doucement mes mains, la tête baissée. J'ignorais si je lui avais fait peur ou si juste elle était inquiète. Mais elle ne devait pas rester ici avec moi.

_ Cette soirée est importante pour toi, Princesse, tu devrais retourner là-bas...

_ Tu es bien plus importante pour moi, Effy.

Mon coeur s'emballa. Bordel... Je vins lui caresser la joue, me retenant de l'embrasser au cas où que quelqu'un nous voit.

_ Excuses-moi d'avoir pété un câble.

_ Qui était-ce, pour que tu réagisses ainsi en la voyant en couple ?

Oh mon dieu. J'attrapai les deux mains d'Ava, réalisant le quiproquo.

_ Non.. Tu n'y es pas du tout, Ava. C'était Charlotte.

Je la vis écarquiller des yeux en comprenant.

_ L'homophobe qui t'a laissé...

_ Elle-même. Déjà que la revoir n'a pas été facile, la savoir finalement lesbienne, ça m'a...

Ma colocataire se leva d'un coup, et je la questionnai du regard.

_ Allons lui casser la gueule.

J'éclatai de rire en imaginant Ava se battre pour moi. Elle se retourna alors vers moi, et me demanda d'une petite voix presque enfantine.

_ Pourquoi tu rigoles ?

_ Pour rien. Juste, je t'aime.

Je savais que je l'avais dit. Ça ne m'avait pas échappé. Je le pensais, et le ressentais, au plus profond de moi. Les yeux d'Ava s'ouvrirent en grand, puis s'embrumèrent. Elle murmura :

_ C'est vrai ?

Je me levai alors, et lui fit face en souriant.

_ C'est vrai. Je t'aime, Ava.

On mourrait d'envie de s'embrasser, mais ce n'était pas très avisé vu le type de soirée et la présence de photographes. Justement, on entendit un bruit derrière nous. C'était la jeune fille qui avait appelé Charlotte "chérie".

_ Effy, c'est ça ?

Je hochai la tête, sans trop savoir à quoi m'attendre.

_ Pendant les enchères, les gens peuvent venir parler un peu avec les musiciens pour poser des questions... Cha aimerait que tu ailles la voir, s'il te plaît...

J'avais envie de refuser, mais pour avancer, je devais faire face à la pire partie de mon passé.