Chapitre 123

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Lorsque je fermai la porte de l'appartement, je m'appuyai dos contre elle, et observai ma colocataire enlever ses chaussures.

Tout le long du trajet, on avait parlé de la soirée, de Louise, de l'argent récolté, des gens qu'elle avait vu... Pas une seule fois on avait évoqué Charlotte, ou ce que je lui avais dit. Pourtant, je ne pouvais pas faire comme s'il ne s'était rien passé. J'avais enfin réussi à me déclarer, ce n'était pas pour faire comme si de rien n'était. Elle était en train d'accrocher sa veste sur le porte manteau quand je me lançai :

_ Je t'aime, Ava.

Elle s'arrêta soudainement dans son mouvement, faisant tomber le vêtement au sol. Mais au lieu de me répondre, elle ramassa la veste, et la rangea, lentement. Je ne comprenais pas cette réaction, et baissai la tête. Avais-je mis trop de temps à lui dire ? Est-ce que me déclarer après avoir vu mon ex était une mauvaise idée ?

Elle se mit dos à moi pour aller dans le salon quand elle s'immobilisa.

_ C'est la première fois qu'on me dit ça et que ça me rend heureuse, je ne sais pas comment réagir...

_ Comment ça ?

Ava se retourna, et me fixa droit dans les yeux.

_ Je ne compte plus le nombre de personnes qui m'a dit ces trois mots... et ça ne m'a jamais rien fait, ça ne m'a jamais fait frissonner, jamais fait battre plus fort mon cœur...

J'avais du mal à comprendre... Cette fois, elle baissa la tête, les joues rouges :

_ Mais quand c'est toi qui le dit, Effy... J'ai mal à la poitrine tellement mon cœur bat la chamade... J'ai des frissons partout, je me sens bizarre... Je ne sais pas comment réagir... et je ne sais pas quoi faire...

Je fis deux pas pour combler le vide entre nous, et lui caressai la joue pour l'inciter à relever la tête.

_ Je t'aime.

Des larmes se formèrent au coin de ses yeux, mais je les essuyai doucement.

_ Fais juste ce que tu as envie, Princesse...

_ J'ai envie de t'embrasser...

_ D'accord.

Ava déposa ses lèvres sur les miennes, et ce fut une explosion. On s'était souvent et beaucoup embrassé, mais là, c'était fou. On se transmettait nos sentiments à travers ce baiser, je le sentais. Lorsqu'elle s'éloigna de moi, ma colocataire sourit.

_ Je t'aime aussi, Effy.

Folle de joie, je la pris dans mes bras, et l'amena dans sa chambre. Allongées dans le lit, je la serrai fort contre moi, et me surpris à dire :

_ Ça te va si je t'offre ta récompense pour la soirée demain ?

_ Ça me va... Mais pourquoi ?

Je souris en mettant ma tête dans ses cheveux.

_ Là je veux juste câliner ma petite amie.

Ouais, je sais, c'était une façon débile de lui demander d'être ma copine. Mais j'étais une handicapée des sentiments, après tout... Ava releva la tête, et me regarda.

_ Je suis ta petite amie ?

_ J'aimerai bien... Tu veux bien ?

_ Oui, carrément.

Je l'embrassai tendrement, et on s'endormit peu de temps après, encore habillées. Cette nuit-là, je dormis super bien. J'étais vraiment heureuse...

***

La journée du lendemain fut très calme. On ne quitta pas la chambre, alternant entre sieste, sexe et discussion. Justement, Ava était en train de me caresser les doigts :

_ La prochaine fois que tu veux mettre des coups dans un mur, mets des gants de boxe...

_ Tu tiens tant que ça à mes mains, dis-je, le sourire taquin ?

_ Oui.

Je pouffai de rire :

_ Tu cherches même pas à le nier...

_ À quoi bon ? Qu'y a-t-il de mal à avouer qu'on aime les doigts de sa petite amie ?

Je souris comme une débile, et l'embrassai doucement, avant qu'elle dise :

_ Plus sérieusement... Ça va ? Ça n'a pas dû être facile de la revoir, si ?

_ C'était difficile, oui, mais j'ai eu l'impression d'enlever le dernier poids que j'avais sur mes épaules...

Je lui racontai alors la conversation en entier, et à quel point j'étais heureuse maintenant, grâce à elle. Elle me caressa alors la joue.

_ Tu as raison. Moi aussi, tu sais. Je déteste ma génitrice, je ne la vois même pas comme une mère car à part me mettre au monde, elle n'a jamais agit en tant que telle. Mais finalement, elle a fait de moi qui je suis, et je suis fière de moi.

_ Tu n'avais pas le même discours il y a quelques mois.

Ava se mit à rire, et se mit sur le dos.

_ Tu m'as aidé à voir les choses différemment, et à changer ce qui n'allait pas. J'étais une fille paumée incapable de dire non aux autres et qui avait l'impression d'être forcée à faire un travail qui ne l'attire pas, alors que maintenant...

_ Alors que maintenant, tu es une future PDG de fou qui sort avec la lesbienne la plus convoitée de Toulouse et qui arrive à effrayer des gars comme Martin.

Elle se mit à rire. Ava m'avait raconté que sa mère, ou plutôt génitrice, avait frôlé la peine de mort. Mais grâce à son père et à son avocat, Maddy avait finalement été transférée dans une autre prison. Elle allait y passer sa vie, et ça n'allait pas être facile car c'était une prison à la limite de l'asile psychiatrique, mais c'était le mieux pour cette femme complètement folle. En voyant Ava sourire ainsi, je compris que je n'étais pas la seule à être en paix avec mon passé. Elle déclara soudainement :

_Tu as bien changé aussi, Don Juan qui interdit qu'on la touche...

_ Je sais. Merci, Ava, d'être là pour moi.

Je l'embrassai, puis osai demander ce qui me perturbait depuis longtemps, sentant que c'était le moment.

_ Le programme prend fin dans un mois... Comment ça va se passer, après ?

Ma professeure, qui ne l'était bientôt plus, leva les yeux vers moi.

_ Normalement, tu dois partir d'ici et faire ta vie...

_ Normalement ?

J'avais le ventre serré. Cette conversation était effrayante.

_ J'avoue que... j'aimerais que tu restes ma colocataire même après la fin du programme...

Wow, putain... Quel soulagement. Je souris, taquine.

_ D'accord, mais à une condition.

_ Laquelle ?

_ Je ne veux plus de chambre à moi.

Ava se mit à rire, et je fis de même.

_ Ça me va. 

Miss-Parfaite et délinquante à problèmes (histoire lesbienne)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant