Chapitre 69

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C'était la première fois depuis bien dix ans que j'entrais à nouveau dans le Conservatoire de Toulouse. L'ambiance baroque me plaisait bien, me donnant l'impression d'être dans une autre époque. Ou un autre monde, carrément. Cela faisait longtemps...

Un peu en avance, je tendis l'oreille pour écouter les sons provenant d'une salle. Je ne m'étais jamais beaucoup intéressée à la musique classique, mais j'écoutais beaucoup de musiciens s'en rapprochant un peu, comme 2Cellos ou Lindsey Stirling. Toutefois, c'est en regardant un anime que m'est venue la meilleure idée possible pour Louise.

Je pleurais comme une bébé devant Your lie in April, maudissant la terre entière, bercée par la musique de fin quand mon esprit avait fait un rapprochement étonnant. J'avais passé tout mon dimanche et lundi soir à préparer le sujet, cherchant des arguments et des façons de faire, recherchant les contacts et comptant le montant de ce projet.

_ Mademoiselle Rivière ?

Je me levai de mon siège en voyant la secrétaire de monsieur Van Hels, le directeur du Conservatoire, sortir du bureau.

_ Vous pouvez entrer, Monsieur est prêt à vous recevoir. Je vais revenir avec du café, en voulez-vous ?

_ Volontiers, merci... Diane.

Le nom de la jeune femme était inscrit sur son badge, et elle se mit à rougir avant de s'éloigner. Je toquai ensuite à la porte, et rentrai après un joyeux "Entrez !". En me voyant, le vieil homme sourit et me prit dans ses bras.

_ Ava ! Petite Ava ! Tu as tant grandis ! Te voilà adulte, maintenant !

Je lui souris, en lui rendant son étreinte.

_ C'est vrai que je ne suis plus la petite fille ingérable qui se cachait dans les casiers pour éviter vos leçons...

_ Et pourtant, tu étais si douée au violon. Tu avais vraiment des doigts de déesses.

Cette remarque me fit sourire, me disant que peut-être Effy me dirait la même chose, mais dans un autre contexte.

_ C'est surtout que, même si ça n'a duré que quelques années, j'avais un très bon professeur, monsieur Van Hels.

_ Allons, ma petite, arrêtes donc de m'appeler ainsi. Tu n'es plus une élève et tu es une femme influante maintenant ! Tu peux m'appeler par mon prénom !

En parlant, il s'était installé sur son fauteuil, et j'avais fait de même sur le siège en face de lui. Nous fûmes interrompus par Diane. Elle déposa les tasses, et me fit un petit sourire subtil, avant de disparaître.

_ En réalité, je suis toujours une élève. Je suis en dernière année en licence de management, gestion et direction. Mais j'apprécie votre proposition, Eugène.

Il me sourit, et remuait son café, en me jaugeant.

_ Que me doit la venue de la future vice-présidente de la Rivière Corporations ?

_ Je viens pour vous parler d'un projet de partenariat entre le Conservatoire, l'entreprise et les hôpitaux.

Il arqua un sourire, intrigué, et me poussa à continuer.

_ Mon père souhaite élargir notre champ de vision et s'investir dans le monde de la musique. Et pour ma part, j'aimerai que la Rivière Corporations participe davantage dans des œuvres de charité, notamment auprès des enfants malades qui n'ont que peu, voire pas du tout, accès à la musique.

_ C'est un très beau projet, Ava. Cela permettrait en effet d'aider les enfants tout en faisant de la publicité au Conservatoire et en permettant à la RC de mettre un pied dans le domaine. Comment imagines-tu cela ?

Je sortis de ma valise un document relié avec toutes les informations, mais je lui demandai tout de même :

_ Vous savez ce qu'aiment tous les enfants, quasiment, et où on retrouve de la musique ?

Il réfléchit un moment, et haussa les épaules.

_ La pop-culture, Eugène. Les séries, les mangas, les dessins animés, les films. Et dans tout cela, il y a de très belles musiques se rapprochant à la musique classique et qui touchent les enfants. Comment ne pas s'émerveiller devant la BO des derniers Disney, les musiques d'Howard Shore pour le Seigneur des anneaux ou encore les OST de One Piece ?

Il hocha la tête, comme s'il était d'accord avec moi.

_ J'aimerai donc que certains de vos élèves qui ont quasiment bientôt fini leurs parcours soient prêts à se lancer dans une sorte de tournée de concerts bénévoles.

Je lui expliquai tout ce que j'avais pensé. Les concerts dans les diverses chambres d'enfants et adolescents malades dans Toulouse, puis à Paris si cela marche bien. À la fin de la tournée, il y aurait le gala de charité que j'avais imaginé, avec les enchères sur les musiciens. Et les étudiants du Conservatoire, eux, se feront très certainement connaître de cette manière tout en enrichissant leur CV pour le futur. Il faut bien les aider à se lancer, après tout.

_ En somme, Eugène, tout le monde y sera gagnant. Le Conservatoire aura peut-être de nouveaux partenariats, de nouveaux élèves, et une nouvelle notoriété. Cela sera de même avec la RC qui pourra enfin se lancer dans des projets liés à la musique. Et surtout, des enfants malades retrouveront le goût de la musique et les hôpitaux auront une aide considérable.

Eugène écoutait depuis le début de mon monologue, très sérieusement. Nous n'avions pas touché à nos cafés, qui devaient être froids à présent.

_ La seule condition, conclus-je, enfin si on peut parler de condition, c'est que les instruments doivent être faciles à transporter. Quelques instruments à vent, des cuivres, quelques cordes... Mais pas de grosse harpe ou de gros piano, comme on le voit si souvent.

Je ne voulais pas parler de Louise, craignant qu'il comprenne l'idée cachée. Au bout d'un petit moment, il s'installa plus confortablement, et entama sa boisson avec une petite grimace.

_ La Rivière Corporations couvrirait tous les frais ?

_ En effet, mon père a donné son aval. J'ai également déjà échangé quelques mails avec les directeurs des hôpitaux, et aiment bien l'idée.

Enfin, le vieil homme se mit à sourire.

_ Je suis partant ! Et j'ai déjà quelques idées d'élèves prêts à vous suivre dans ce projet !

Je ne pûs m'empêcher de faire un grand sourire. Je le remerciai chaleureusement, et lui dis :

_ Je n'ai malheureusement pas le temps de m'occuper de tout cela moi-même, étant encore en cours... Je laisserai madame Aurélie Belro, une partenaire de confiance de mon père, prendre la suite avec vous.

_ Je viens de voir ça, répondit Eugène en feuilletant le papier. Tu prépares ça depuis longtemps ?

_ Depuis dimanche.

Il ouvrit grand les yeux, et me félicita. À ses yeux, j'avais un réel talent dans l'élaboration de projet et je serai un atout majeur de la RC. On discuta un petit moment, et je partis finalement. Je reprenais les cours bientôt, la pause repas touchant à sa fin. 

Miss-Parfaite et délinquante à problèmes (histoire lesbienne)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant