CHAPITRE 56
Le père d'Alice poussa un hurlement de rage. Enceinte. ENCEINTE ! Il jeta la lettre de St Mangouste au feu. Il se tourna vers sa femme, rouge comme une tomate.
– Ta fille est enceinte !
– C'est aussi ta fille, répondit-elle sans même lever les yeux de sa broderie.
– Toi et ton éducation laxiste ! Elle va tous nous faire tuer !
– À quoi bon s'époumoner, ce qui est fait est fait.
Alice connaissait l'étape suivante. L'indifférence et la nonchalance de son épouse Ursula provoquait toujours une colère noire chez Phineus McKinnon. Il brisa un vase hors de prix. Ursula leva les yeux au ciel. Alice tenta de quitter la pièce mais son père le remarqua. Il l'interpella toujours hors de lui.
– Qui est ce ? Par qui ton idiote de sœur s'est-elle fait engrosser ?
– Comment veux-tu que je le sache ? Je n'y étais pas ! On est proche mais tout de même ! répondit Alice avec insolence.
Il la gifla. Alice porta la main à sa joue en état de choc. C'était la première fois que son père levait la main sur elle. Jamais il n'avait été violent, ses colères l'étaient certes, mais jamais il ne s'était attaqué à autre chose que les vases hideux que sa mère peignait.
– Alice... je ne voulais pas.
Son père tremblait. Lui aussi était en état de choc. Il n'avait jamais levé la main sur aucunes de ses filles mais la perspective de leur mort imminente ainsi que le fait qu'aucune d'elles n'ait compris la gravité de la situation, lui avait fait perdre tout contrôle.
– Mais tu l'as fait ! répliqua-t-elle en quittant la pièce, les larmes aux yeux.
– Tu es allé trop loin cette fois Phineus, ajouta son épouse froidement en quittant à son tour la pièce.
Alice se précipita à l'étage, lança à la hâte ses affaires dans un sac et redescendit les escaliers tout aussi rapidement. Sa mère tenta de le retenir en vain.
– Je vais chez Frank ! Et il est de sang-pur ne vous inquiétez surtout pas ! dit-elle hargneuse avant de claquer la porte d'entrée.
Une fois qu'elle fut dehors, elle se rendit compte qu'elle avait oublié son balai. Elle poussa un petit cri de frustration. Si elle y retournait, ça casserait tout l'effet dramatique de sa sortie ! Elle s'installa sur le perron, la tête entre les mains. Elle avait l'air maligne maintenant !
Elle sursauta et serait probablement tomber si elle n'était pas déjà assise.
Une lumière vive l'aveugla, accompagnée d'une violente déflagration. Elle avait porté sa main à ses yeux pour se protéger de la lumière, et lorsqu'elle abaissa celle-ci, elle vit devant ses yeux un bus violet. Un sourire s'étira lorsqu'elle vit Frank descendre du Magicobus.
– Frank ! dit-elle en se relevant.
Il lui tendit les bras et elle courut s'y blottir. Elle passa ses bras autour de la taille du garçon qui entoura ses épaules et la serra contre lui. Elle ferma les yeux. Elle se sentait enfin à sa place. Loin de l'atmosphère pesante qui régnait depuis la montée en puissance de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer– le-nom. Autrefois ils avaient été heureux. Ses parents étaient tolérants, tout du moins ils ne faisaient pas une affaire d'état du statut de sang des personnes qu'ils fréquentaient. Mais la guerre avait détruit cet équilibre. Ils avaient choisi leur camp. Pour les protéger. Son père pensait que faire profil bas était la meilleure solution, le seul moyen de rester en vie. Mais petit à petit, les exigences du Maître des Ténèbres devinrent de plus en plus importantes à mesure qu'il gagnait du pouvoir. Jusqu'au jour où sa sœur s'était retrouvée fiancée à un sang-pur de la pire espèce. Et cela ne s'arrêterait pas là. Son père refusait de voir la vérité en face... mais un jour, il leur faudrait se battre pour une cause en laquelle ils ne croyaient pas. Se battre contre leurs amis, contre leurs familles. Se battre pour un fou furieux convaincu de la supériorité d'une partie de la communauté sorcier.
– Comment... ? commença-t-elle.
– Une intuition, la coupa-t-il.
– C'est encore une de tes visions ? lui demanda-t-elle tremblant un peu.
– Je n'ai pas de vision, répondit-il en se tendant quelque peu.
– Ça n'arrivera pas. On va gagner.
Elle avait dit cela en tentant d'y mettre toute la foi qu'elle avait pu réunir en elle-même. Mais Frank avait décelé l'incertitude derrière l'apparente confiance. Comme elle aurait aimé que Frank se contente d'être doué en botanique. Mais non il avait fallu ajouter à cela un petit talent pour la divination.
La première vision à laquelle elle avait assisté avait été terrible... c'était la première et seule fois où elle avait vu Frank pleurer. Il lui avait alors expliqué, tremblant ce qu'il avait vu... ce qu'ils avaient vécu. Ou plutôt ce qu'ils allaient vivre.
La torture. Les doloris. La folie... le bébé.
Car oui... il y avait une lueur de bonheur dans ce carnage que s'apprêtait à être leur futur. L'enfant.
« Il n'est pas l'élu ».
C'est ce que la mangemort hurlait joyeusement en les torturant. « Il n'est pas l'élu ». Elle ne savait pas qui était l'élu... mais elle espérait que les parents de ce dernier n'auraient pas à subir des souffrances plus terribles que celle qui leur serait infligé à Frank et elle.
Ils auraient pu se séparer et cette vision ne se réaliserait pas... mais l'enfant ne naitrait pas et elle se savait parfaitement incapable de renoncer à son amour pour Frank. Elle était prête à mourir pour lui. Pour lui et pour ce futur enfant qui naîtrait de leur amour.
Neville.
Elle connaissait même son prénom.
Frank lui avait décrit son visage. Ses petites joues rebondis, ses yeux à elle, son sourire à lui. Il était une part d'eux. Il ne pouvait ne pas exister.
Son bébé. Leur bébé.
L'enfant qui n'était pas l'élu.
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Holding a Heart - Tome 1
Fanfiction{TERMINÉE} Ce n'était plus de simples exercices dans une salle de cours. C'était réel et à tout moment elle pouvait mourir. Elle le vit courir dans la direction opposée. Vers les affrontements. Elle ne l'avait même pas remercier. Il venait de lui sa...