4. Ma récompense.

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« Run boy run!

This world is not made for you

Run boy run!

They're trying to catch you

Run boy run!

Running is a victory »

-Woodkid, Run Boy Run

···

Aria. Milan.

Aria arriva chez elle à bout de souffle. Elle se hâta de monter les marches du perron et de déverrouiller la lourde porte avant de la refermer à double tours. Elle avait repéré que l'ombre ne la suivait plus, mais cela n'avait pas fait taire le sentiment d'insécurité qui était né en elle. La jeune femme n'avait cessé de se retourner pour voir si elle était suivie, sursautant à chaque bruit. Elle s'en voulait d'être devenue aussi anxieuse tout à coup. Mais la fatigue accumulée de ses derniers jours ne l'aidait pas à avoir les idées claires. Elle prit alors une douche pour se calmer et l'eau brûlante qui coulait sur sa peau parvint quelque peu à la détendre. Elle se mit même à penser qu'elle avait rêvé la scène. Qui pouvait bien se lancer à sa poursuite à 5h30 du matin ?

Aria chassa ces réflexions de son esprit. Elle n'avait plus que quelques jours pour vider la maison familiale et retourner en France. Elle se devait d'être efficace. Elle se replongea alors dans les cartons en soupirant à chaque fois qu'elle sentait ses pensées divaguer vers les souvenirs provoqués par les objets qu'elle avait sous les yeux. Finalement, la jeune française se résignait à jeter ou donner tout ce que la maison contenait. Elle ne tenait qu'à garder très peu de choses. Tout d'abord, la robe de mariée de sa grand-mère qui avait été cousue par sa propre arrière-grand-mère. C'était un travail de famille. C'était le symbole de l'amour qui régnait entre toutes les personnes qui manquaient aujourd'hui à Aria. La jeune femme mit également de côté quelques bijoux qui traversaient les générations et qui la fascinaient tant lorsqu'elle était petite. Elle trouvait qu'ils rendaient Alba, sa grand-mère, très élégante, ajoutant un charme à chacune de ses tenues. Elle souhaitait également garder le livre familial qui retraçait son arbre généalogique ainsi que les dates clés des Gallo. C'est à elle que revenait la tâche, au combien importante, de perpétuer la tradition en le complétant et en léguant à ses successeurs. Et puis, pour l'accompagner, Aria conserva, bien sûr, soigneusement les albums photos qui retraçaient le parcours familial. Elle pouvait passer des heures à les feuilleter en se rappelant de toutes les anecdotes qui se cachaient derrière chacun des clichés. Elle admirait les sourires et adoraient voir les visages évoluer avec le temps. Elle avait toujours apprécié qu'on lui raconte l'histoire familiale, la construction de cette maison dans laquelle elle se sentait plus que n'importe où, chez elle.

Originaires de Milan, les Gallo avaient toujours habité la région jusqu'à ce que les arrières-arrières-grands-parents d'Aria parviennent à acheter un appartement dans ce quartier de Corsico. Au fur et à mesure des décès et des déménagements, la famille avait pu acheter les autres biens de l'immeuble de trois étages, les réunissant en un seul et même foyer qui pouvait loger tous ses membres. La famille, c'était déjà ce qui comptait à l'époque. Et voilà qu'Aria, seule héritière, qui ne pouvait se permettre de garder la demeure, allait la vendre à un promoteur qui en referait sûrement une multitude d'appartements. Elle brisait le rêve de sa famille et était persuadée qu'elle les décevait de là où ils étaient. En même temps, sa vie n'avait jamais été en Italie. Ses grands-parents avaient choisi de rejoindre la France il y a de ça plusieurs années pour donner naissance à leur fils, Milo, le père d'Aria dans le pays voisin. Ils ne revenaient à Milan qu'à l'occasion des vacances. Sa vie était en France. Et elle était déjà assez compliquée comme ça.

LE SOLEIL & LA LUNE - PIERRE GASLYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant