28. À égalité.

666 50 60
                                    

"Where did I go wrong, I lost a friend
Somewhere along in the bitterness
And I would have stayed up with you all night
Had I known how to save a life"

-The Fray, How to Save a Life

...

Aria. Monaco.

Ses dents plantées dans sa lèvre inférieure. Ses poings serrés. Ses ongles enfoncés dans ses paumes. Autant de signes qui renvoyaient l'inquiétude de la jeune femme assise sur le siège passager tandis que la voiture ralentissait en sortant de la voie rapide. Le silence à l'intérieur de l'habitacle était pesant. Elle jeta un l'œil à l'homme qui se tenait derrière le volant. C'était l'endroit qu'il préférait au monde et pourtant, il semblait si désemparé à cet instant. Affecté. Bouleversé. Il lui jeta un regard à son tour.

« Merci d'être venu me chercher à Nice, Pierre.

- Je serais venu te chercher à Paris si tu n'avais pas pu avoir le dernier vol, affirma-t-il. Elle le remercia d'un signe de tête et il posa une main sur la sienne pour l'intimer à arrêter de maltraiter sa chaire. Ça va aller, glissa-t-il pour essayer de la rassurer mais également de se convaincre lui-même. »

Elle se fit la réflexion que la dernière fois qu'il n'avait cessé de répéter cette phrase, rien ne s'était passé comme prévu. Mais elle se concentra de nouveau sur le présent lorsque le pilote se gara devant le centre hospitalier. Ils franchirent les portes et se dirigèrent à l'accueil où une infirmière les salua.

« Bonsoir, je suis la soeur de Nina Blanchard. Elle a été renversée par une voiture, indiqua Aria d'une faible voix. Elle avait toujours du mal à y croire et à réaliser ce qu'il s'était passé. Elle n'avait pas eu le temps de s'effondrer ou de verser la moindre larme lorsque Pierre l'avait appelée. Elle s'était précipitée à l'aéroport dans l'espoir d'être dans le dernier vol en partance de la capitale.

- Elle est sortie du bloc. Elle avait une grosse fracture et un hématome important au crâne, expliqua la professionnelle. Le chirurgien est confiant mais elle ne s'est pas encore réveillée. Il est encore en opération, il a dû traiter une autre urgence. Il pourra tout vous expliquer demain, quand vous reviendrez aux heures des visites.

- Mais elle est mineure, on ne peut la voir ? Demanda Aria.

- Si, vous pouvez. Mais je vous conseille d'aller vous reposer. Les prochains jours vont être longs. Elle est stable pour l'instant. Je prends votre numéro et au moindre changement, je vous appelle. D'accord ? Ses mains se serrèrent sur le comptoir. Elle n'allait pas abandonner sa sœur. Elle n'allait pas la laisser seule. Pierre posa une main sur la sienne pour tenter de l'apaiser.

- On va rentrer, d'accord ? »

Elle hocha la tête. Elle n'était pas en mesure de prendre cette décision. Il passa un bras dans son dos, remercia l'infirmière et la guida jusqu'à la voiture. La jeune femme s'appuya sur le pilote, de tout son poids. Elle était heureuse de ne pas avoir à affronter ça toute seule. Elle avait oublié à quel point c'était agréable de se reposer sur quelqu'un.

Le voyage se déroula une nouvelle fois en silence. Elle regagna l'appartement avec l'aide de Pierre qui ne la lâcha que lorsqu'elle fut assise dans le canapé. Il se dirigea vers la cuisine pour leur servir des verres d'eau tandis qu'elle observait les lieux. Rien ne semblait avoir vraiment changé depuis sa dernière visite. Aria fut cependant intriguée par un cadre retourné sur la commode. Il n'était pas là la dernière fois. Ou alors elle ne l'avait pas remarqué. Elle se leva, incapable de tenir en place. Elle voulait s'occuper l'esprit. Arrêter de penser. Stopper le flot continu d'idées qui lui traversait la tête. Elle saisit la photo qui l'intriguait et la retourna pour apercevoir le regard lumineux du pilote accompagnée d'une jeune femme brune qui répondait à son sourire. Ils semblaient heureux. Ils semblaient amoureux. La culpabilité vint s'ajouter à tout ce qu'elle ressentait actuellement. Elle reposa le cadre, comme si ses doigts avaient été brûlés sous son contact. Elle ne pouvait pas pénétrer dans leur intimité. La nausée lui prit. Elle étouffait. Elle ne pouvait pas rester là. Elle se tourna vers son hôte.

LE SOLEIL & LA LUNE - PIERRE GASLYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant