27. Sept heures en bas ?

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« On n'aime ce qu'on ne possède pas tout entier. »

-Marcel Proust

···

Pierre. Paris.

Le paysage défilait devant ses yeux tandis que son chauffeur prenait la direction du centre de Paris. Bien que les journées commençaient à être plus longues, la nuit tombait sur la capitale et Pierre s'émerveillait de toutes ces lumières qui peuplaient l'horizon et sublimaient la ville, notamment lorsqu'ils longèrent la Seine et que les faisceaux se reflétaient sur l'eau agitée. Il se sentit serein et heureux. Il avait finalement pu se libérer pour arriver plus tôt et ne pas attendre le lendemain pour retrouver Aria et Nina. Devant ce changement de dernière minute, il avait préféré garder cette information pour lui et leur réserver une petite surprise en leur rendant directement visite. Il était tard, peut-être que la plus petite dormait déjà. Mais il ne pouvait pas s'en empêcher.

Il était à vrai dire impatient de commencer un chapitre de leur aventure qui s'annonçait un peu plus serein. Il se sentait libre après avoir mis derrière lui tous les fantômes qui pouvaient encore le hanter. A Miami, il avait enfin pris le temps de parler avec son ex, de lui dire ce qu'il avait sur le coeur, de mettre correctement un point à cette histoire, de lui dire au revoir. Et elle s'était montrée plutôt compréhensive et à l'écoute. Elle devait d'ailleurs passer à Milan demain pour récupérer les dernières affaires qui restaient chez lui et ainsi mettre véritablement ce qu'ils avaient partagé derrière eux.

Ce sentiment d'apaisement contribuait aussi à améliorer de son côté la relation qu'il entretenait avec la franco-italienne. Il était fier qu'elle lui ait accordé sa confiance en acceptant son aide pour vendre sa maison d'enfance. Il pensait comprendre ce qu'elle ressentait. Même s'il avait quitté Rouen à un jeune âge, se séparer de cette bâtisse, c'était aussi perdre des souvenirs. D'autant plus, que les ancêtres d'Aria avaient commencé en achetant un appartement et avaient finalement investi pour construire leur propre foyer. Il trouvait que l'image était très belle. Au fur et à mesure que la famille s'agrandissait, la maison s'amplifiait de chaleur et de convivialité. Et aujourd'hui, il ne restait plus que cette jeune femme brisée, qui n'avait d'autre choix que de s'en séparer. Cette histoire ne pouvait que peiner Pierre qui se sentit extrêmement chanceux d'être entouré. Il était le cadet, le "petit" dernier. Et, il avait quatre frères sur lesquels il savait qu'il pouvait se reposer. Ils l'avaient déjà tant épaulé dans les moments les plus difficiles de sa carrière. Il renouvela sa promesse d'être également présent pour eux chaque fois que cela serait nécessaire. Il culpabilisait souvent de ne pas être souvent là et de manquer des repas de famille simples au cours desquels les discussions vaquaient d'un sujet à l'autre sans aucun réel lien. Son coeur se serrait toujours un peu lorsqu'ils revoyaient ses neveux et nièces après quelques mois en se rendant compte qu'ils grandissaient à une allure phénoménale. Mais ils savaient pourquoi il manquait tout cela. Le pilote cherchait à donner un sens à sa vie en poursuivant son rêve de toujours. Et même si sa famille comptait plus que tout à ses yeux, il n'y avait aucune sensation comparable à être derrière un volant et à rouler à 300 km/h.

La voiture ralentit devant l'adresse que le français avait indiquée. Il remercia le conducteur et s'engouffra à l'intérieur de l'immeuble à la suite d'un locataire. Il se dirigea directement vers la porte qui menait au sixième étage. Les images de sa dernière visite lui revinrent en tête mais Pierre s'empressa de les chasser de son esprit. Après tout, cette fois, il était invité. Aria lui avait proposé de venir passer quelques jours à Paris avec elles, maintenant qu'elle était capable de s'accorder des week-ends de repos. Elle lui avait envoyé des photos des activités qu'elle avait pris plaisir à réaliser avec sa soeur, lui rappelant la journée durant laquelle il avait proposé de la garder. Il aimait voir son sourire enfantin qui traduisait l'innocence et la pureté qui l'habitaient. C'étaient des cadeaux de la vie que les adultes devaient s'efforcer de préserver au maximum chez leurs descendants. Le châtain ne connaissait pas toute l'histoire des deux soeurs mais il avait bien deviné que c'était un miracle que Nina connaisse encore ces sentiments. Et elle pouvait sûrement remercier son aînée qui se démenait pour lui transmettre des valeurs qui étaient des impératifs chez les Gasly : la détermination, l'amour, le travail, l'envie. Le français se persuadait qu'il partageait ces quatre points avec Aria, et que c'était sans doute ça qui l'attirait inexplicablement vers elle.

LE SOLEIL & LA LUNE - PIERRE GASLYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant