LE SOLEIL & LA LUNE - PIERRE GASLY

9. Une promesse.

« Je te promets une histoire différente des autres,
J'ai tant besoin d'y croire encore. »

-Johnny Hallyday, Je te promets

···

Aria. Rouen.

Aria regagna l'ancien appartement de sa grand-mère, le sourire aux lèvres. Elle qui ne croyait aucunement à la chance, elle se devait de reconnaître que cette coïncidence était miraculeuse. Quelle était la probabilité qu'elle le croise à Rouen ? Elle était sûrement moins élevée que celle de le rencontrer à Milan ! Et que celle selon laquelle il s'intéressait à elle... Après tout, il voulait la revoir. La jeune femme s'empressa de chasser cette idée de ses pensées. 

En ouvrant la porte, elle s'aperçût que Nina dormait encore, et elle se rendit alors discrètement dans la salle de bains pour se prélasser sous une bonne douche chaude et revigorante. Les images de sa rencontre avec Pierre ne cessaient de lui revenir en tête. À quoi je joue ? Plus elle y pensait et plus elle revenait à la réalité après son jogging qui lui semblait hors du temps, plus elle se trouvait ridicule. Elle partait dans quelques jours de Rouen. Définitivement. Elle n'y avait plus aucune attache, plus aucun prétexte pour revenir ici. Nina la suivait à Paris et la jeune femme était bien décidée à recommencer une nouvelle vie dans la capitale en laissant derrière elle son passé et les fantômes qu'il comportait. Si Pierre gagnait cette nouvelle manche demain, il essayerait d'en savoir plus sur elle et son parcours. Ce dont elle ne voulait surtout pas parler. Elle se devait donc de gagner ! Mais qu'est-ce que ça va m'apporter ? Une récompense dont je ne saurais même pas quoi faire. C'était mieux que de répondre aux questions du pilote. En plus, s'ils s'étaient croisés par chance à Milan, puis de nouveau par miracle à Rouen, ils n'auraient plus d'occasion de partager un entraînement matinal. Pierre ne devait revenir que très peu dans leur ville natale et Aria souhaitait également réussir à rapidement rayer la ville italienne de ses destinations habituelles. Elle ne trouvait donc aucune bonne raison de se rendre au rendez-vous demain matin. Aucun argument valable pouvant lui faire oublier son côté rationnel.

Et pourtant... Lorsque la franco-italienne sortit de la pièce exiguë, elle posa ses yeux sur l'enfant qui représentait désormais tout son monde. Bien qu'elle avait essayé d'expliquer à Nina ce qu'il allait se passer afin de la préparer au mieux à sa nouvelle vie et d'éviter la bouleverser davantage, Aria savait que rien ne serait plus difficile que quand elles seraient confrontées à la réalité de la situation. Elles avaient encore quelques jours de répit, autant Nina, qui quittait le peu d'innocence qui lui restait alors, que pour la jeune femme qui prenait la responsabilité de sa soeur et son avenir à seulement 22 ans, un âge auquel elle n'avait pas encore elle-même toutes les réponses aux questions que pouvait amener la vie. Les prochains mois ne seraient aucunement de tout repos, et elle le savait. Elle s'y était préparée tant bien que mal ces derniers jours en imaginant toutes les situations possibles et en essayant de trouver comment elle pourrait y remédier. Elle avait également réaliser plusieurs emplois du temps pour voir comment adopter l'organisation la plus efficace possible. Mais l'échéance n'était pas encore arrivée. J'ai encore quelques jours d'accalmie, se répétait-elle en éteignant peu à peu son cerveau rationnel. Aria pouvait bien profiter quelques jours encore, en vivant ce qu'elle n'aurait jamais osé imaginer et en faisant ce qui lui faisait, pour une fois, plaisir. Elle ne pouvait pas s'autoriser grand chose, mais ça, elle pouvait se l'accorder. Faire la course, un matin, aux aurores, à Rouen, avec Pierre, Gasly ou un autre, ne l'engageait à rien. Et surtout, elle savait qu'elle en avait envie. Elle voulait inclure cette petite touche d'extraordinaire dans son quotidien tant qu'elle pouvait se le permettre. C'était une dernière respiration avant de plonger en apnée et d'être coincée sous l'eau pendant un long moment.