Thrènoi, Renaissance - part4

11 2 12
                                    

Typhenn revint à elle avec l'odeur familière de l'encre. Dans un coin, Titus ronflait dans un fauteuil en face d'elle, la tête penchée en arrière de façon inconfortable, sous une pendule qui indiquait 4 heures. Son petit sourire moqueur se transforma en grimace lorsque les piqûres sur son omoplate achevèrent de la réveiller.

Elle ne sentait plus les doigts de sa main droite.

— Trauma crânien, et fracture de la main. Je t'avais dit de ne pas t'interposer. Tu n'as fait qu'aggraver ta blessure déjà existante, l'accueillit la voix de Rafe par-dessus son épaule. Il la retient de bouger d'une main.

Elle observa vaguement sa manche éventrée pour accommoder l'attelle qui enserrait sa main et son poignet. Des veines étranges marbraient son bras comme des racines pourpres sous des branches noires. Elle se détourna de la vision repoussante.

Les hôpitaux aménageaient toujours les chambres de façon impersonnelle : un lit et un écran de télévision accroché au mur. Un tableau blanc avec la date du jour écrit au feutre vert. L'odeur du désinfectant flottait en maître dans l'air. Typhenn se rappela la dispute dans la voiture. Rafe l'avait conduit ici. Titus avait fortement désapprouvé cette décision.

— Heureusement, tu es là pour me rafistoler, dit-elle, sa voix à peine plus qu'un murmure. Typhenn voulut recouvrir ses marques avec sa manche. Un réflexe qu'elle avait acquis depuis qu'on lui avait dit de ne jamais montrer ses tatouages. Rafe lui donna une tape sur les doigts.

— Je ne l'aurais pas fait si tu n'avais pas mis ta vie en danger, dit-il entre ses dents. Rafe évitait de parler lorsqu'il se concentrait sur les marques qu'il encrait à main levée. Les dommages avaient dû être plus graves qu'elle ne le pensait pour qu'il sorte le kit de sous sa roue de secours.

La magie des runes druidiques pouvait modifier le corps humain. Si l'on était assez fou ou brave pour ne pas considérer la menace de se faire exécuter. Le problème, le corps créait très vite une dépendance à la force qu'elles octroyaient, sans compter que la place sur un corps humain était plus limitée que son avidité.

Typhenn ignora la remarque, elle n'avouerait pas le soulagement qu'elle ressentait. Il s'occupait enfin de ses marques. Ils étaient de nouveau une équipe réunie dans le secret. Tant qu'ils restaient ensemble, tout s'arrangerait. Elle attendit que Titus finisse un ronflement pour oser demander quand elle serait guérie.

— Arrête de remuer. Je finis l'espace entre tes omoplates. Tu seras remise dès ce soir à condition de ne pas t'agiter en tous sens.

Les os seraient ressoudés, mais il ne pouvait rien pour ses muscles ni son entorse.

Typhenn hocha la tête. Cela expliquait la fatigue et les veines violettes. Elle se permit d'adresser un remerciement silencieux aux runes druidiques et vaguement à la sorcière qu'ils vénéraient.

Rafe poussa un râle alors qu'il frottait son dos, essuyant le surplus d'encre. Titus s'agita dans son sommeil.

Il baissa d'un ton.

— Ne penses-tu donc jamais aux conséquences ? Je t'avais dit de rester en arrière. Tu n'écoutes jamais. Il essuya son aiguille sur un tissu blanc taché de noir.

Rafe modifiait son encre en s'inspirant d'une recette que les druides utilisaient pour leurs tatouages. Elle ignorait ce qu'il y ajoutait pour qu'elle lui chauffe la peau plus que l'ordinaire. À chaque séance, sa température augmentait, la laissant frissonnante dans l'air le plus chaud.

Il n'y avait rien à dire. Acculé, son corps avait agi d'instinct, exactement comme ils l'avaient entrainée.

— Je voulais vous protéger. En fermant les yeux, Typhenn pouvait revoir l'expression glaciale de Ronan, un désert vide d'émotion. Il avait tout vu et il n'avait rien fait. Il n'avait pas esquissé l'ombre d'une réaction. Sa parole importait plus que le passé. Ronan, il...

La porte d'AkerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant