Les lois d'Anubis - part7

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À cent cinquante, Typhenn ne tient plus. Elle se retrouva sous la fenêtre la plus éclairée et à tendre l'oreille.Les brins d'herbe blancs durcis par le gel craquaient sous ses paumes. Ils parlaient trop doucement pour entendre leur voix. Elle s'aplatit contre le mur risquant un coup d'œil à travers les rideaux. Le vieux prêtre, déjà habillé alors que le soleil ne se lèverait que dans plusieurs heures, tournait le dos à la fenêtre. Ils étaient tous les trois confortablement installés autour de tasses fumantes. Elle voyait des spasmes agiter le visage de Yan dès que Léodic donnait des coups de canne au sol pour illustrer ses propos.

Des statues partout et de toutes tailles décoraient le salon. Presque tous les dieux de l'Enéade les observaient, présidés par un Osiris légèrement plus imposant. Elle nota l'absence de Seth au côté de son frère et de sa sœur,Isis. Une peau de panthère était accrochée au mur, derrière le plus haut des fauteuils. Ses yeux vides regardaient le plafond.

L'estomac de Typhenn gargouilla. Une fois de plus, une bruine tourbillonnait dans l'air. Son col remonté aussi haut que possible, elle se frictionna les bras pour empêcher ses dents de s'entrechoquer trop fort.

La discussion s'éternisait. Lorsqu'ils sortirent enfin, Typhenn ne sentait plus ses orteils et des aiguilles lui piquaient le bout des doigts. Ses mouvements devenaient maladroits, elle retourna dans la voiture, la tête appuyée contrela portière entre-ouverte pour épier leur conversation.

Léodic confia un rouleau à Ronan qui le mit en sécurité sous sa veste. Le vieil homme leur souhaita de trouver les réponses qu'ils cherchaient. Ce qui ressemblait à un échange de banalités devint plus intéressant lorsqu'il prit Ronan à partie devant la porte. Ce dernier hochait déjà la tête d'un air entendu.

— Ceci ne doit pas tomber entre de mauvaises mains. Cet extrait du livre est l'héritage de ma famille. Je te le confie, car tu es le fils d'Andraste.

— Je sais. Comme toujours, je vous le rendrai, le rassura Ronan en posant une main sur son épaule frêle.

Il serra fort la main des deux jeunes hommes puis retourna au chaud. Ils retournèrent jusqu'à la voiture, prenant le temps de suivre le chemin en ardoise.

— Ce type est fou ? Je n'ai pas saisi un mot de ce qu'il a dit. Une histoire de terre, d'oiseau et mer dans le ciel, lui confia Yan à voix basse comme s'il s'agissait d'un secret gênant.

— La disparition de sa famille a littéralement plongé son esprit dans une autre dimension. Comme toi, il a survécu pour une seule raison contra Ronan en observant Yan comme s'il tentait d'expliquer un plan de bataille à l'ingénu du village. Il vérifia la voiture d'un coup d'œil. Il dut la croire endormie sur le siège passager, car il continua plus bas. Ne dis rien à Typhenn de ce que tu as entendu. Si elle sait pour sa famille, elle compliquerait tout.

— Ouais, je comprends, promit Yan en regardant ses pieds.

Ronan sortit son portable, et composa un numéro.

On décrocha immédiatement.

— Cécilie, j'ai découvert un processus... Non, je ne préfère pas m'avancer. Maintenant c'est une question de temps, à qui agira le premier...Typhenn reste avec moi, occupez-vous des autres. On ne laisse rien au hasard. Ils sont toujours des suspects. Le plus tôt les Alexandre seront écartés...

Typhenn se mordit la joue pour s'empêcher de jurer. Yan se disait son allié, mais il venait de retourner sa veste au plus offrant. Ronan l'avait mené en bateau. Il voulait arrêter sa famille depuis le début. Elle ne le laisserait pas faire. Quel moyen de sortie avait-elle ? Elle n'aurait pas fait un pas vers le portail que Ronan la verrait. Sauter en route ne s'avérait pas être la meilleure solution.

Un mur surmonté d'une grille entourait la maison et se dressait en barrière infranchissable. Avec un peu d'élan, elle pourrait s'accrocher à la grille. Les piques seraient compliqués à escalader, elle devait se faufiler entre les barreaux. Disparaître dans les rues serait un jeu d'enfant. Le problème restait de traverser la pelouse. Elle comptait sur le gros SUV pour cacher sa petite taille jusqu'au mur.

Typhenn devait agir maintenant. Elle se glissa hors de la voiture, referma la portière sans un bruit et s'élança le dos courbé.

Ronan interrompit son appel. Il l'avait repéré.

Elle accéléra, sauta. Les fleurs sauvages prises dans le mur l'aidèrent à trouver des prises. Les pierres s'effritèrent sous ses pieds, mais elle s'était déjà projetée vers le haut et saisi un barreau.

Une main se referma sur sa cheville et la tira vers le bas. Le choc contre le sol expulsa tout l'air de ses poumons. Elle se força à rouler et se redresser d'un même mouvement, prête à défendre sa liberté comme une furie. Mais Ronan tomba à terre à côté d'elle, lâchant son portable dans l'herbe.

— Merde.

— Merde ? répéta Typhenn après Yan.Elle resta à regarder Ronan sans y croire. Rien d'autre ne lui venait. Yan venait d'assommer Ronan avec la tranche de sa main. Où avait-il appris cette prise sans savoir se défendre ? L'image de Ronan inconscient ne parvenait pas à trouver le chemin vers son cerveau. Par les tripes d'Apophis. Qu'est-ce qu'il t'a pris ?

— Je viens de t'aider. Un merci serait bien vu. Lui-même ne croyait pas ce qu'il venait de faire. Et maintenant ?

Qu'allait-elle faire ? Ils venaient de se débarrasser de Ronan qui insistait que leur seul atout était de rester ensemble, cependant partager les informations au compte goutte ne servait pas sa cause.

Typhenn se mit à quatre pattes et lui fouilla les poches. Elle devait réfléchir vite. Il resterait inconscient seulement quelques précieuses petites minutes. D'ici là, ils devraient être loin. Elle devait prévenir sa famille avant qu'ils se fassent arrêter par les Vaugren, ou pire, que les Césaire les attrapent en premier. Rafe les protégerait, mais contre tous les veilleurs, même lui ne pourrait rien faire.

— OK. OK, répétait Typhenn, elle prit l'étui qui contenait le livre des Morts, son porte-clefs étoilé avec celle de sa voiture, son portable puis repartit vers le SUV. Yan sur ses talons.

— Tu as le permis ? demanda le garçon, ses mains tremblaient en bouclant sa ceinture.

Elle se contenta de démarrer en trombe.

Yan s'accrocha à son siège.

— Je ne préfère pas savoir.

Elle lui donna le portable pour qu'il essaie de joindre sa famille. Ronan l'avait bloqué avec un code. Typhenn frappa le volant de frustration et accéléra encore plus.

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Merci encore et toujours de vous accrochez.
Et le trio devient duo.
Personnellement, je trouve que cela fait du bien que le karma existe, au moins dans les livres.
Qu'avez-vous pensé de ce petit chapitre? Partagez moi vos impressions avant de lire le chapitre suivant

La porte d'AkerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant