— Vas-y, tire, l'encouragea Ronan d'un ton neutre. Tu sauteras avant que la balle m'atteigne.
Kieran observa son arme, puis la jeta négligemment dans les fougères. Sophie cracha, pestant contre son frère et son manque de cran.
— De toute manière, je n'ai jamais rien compris à leurs gribouillages magiques. Tu penses vraiment faire le poids à deux contre un. Tu vois, nous ne sommes pas les seuls à penser que ton arrogance te met tous les veilleurs à dos. Kieran ricana, puis ajouta, amusé de le provoquer. On nous traite comme les chiens, mais regarde-toi ! Je me demande ce que ça fait de savoir qu'après les Alexandre, vous serez les prochains.
Ronan ignora la pique destinée à le déstabiliser. Kieran voulait le voir perdre son calme. Il ne lui donnerait pas satisfaction. Il changea de sujet profitant de l'élan de confiance que ressentait Kieran. En l'orientant dans la bonne direction, il lui révèlerait presque tout ce qu'il désirait savoir.
— Le garçon n'a pas été tué par les èitighe teines. Vous l'avez traîné jusqu'ici pour attirer ses parents.
— Le quoi ? Ah, tu parles des druides. Une idée de So, acquiesça Kieran, fier comme jamais de sa sœur.
— Pas une étincelle, confirma Sophie. Il n'a fait qu'appeler sa maman et ses amis poilus. Ses parents se sont montrés moins décevants.
Les jumeaux ne le quittaient jamais des yeux. À tour de rôle, l'un parlait, le deuxième le surveillait, deux hyènes qui salivaient devant une charogne.
— Les druides sont si simples. Et on nous traite de barbares. Regarde, il a suffi qu'on s'amuse ensemble et les parents ont débarqué. Tu aurais dû les voir ! Ils étaient dans une rage monstrueuse.
Sophie rit de plus en plus fort en entendant la blague de son frère.
Ronan repensa aux pierres noires autour de l'enfant, comme autant de larmes versées par ses parents alors qu'ils se transformaient en des créatures sorties de l'enfer.
— Vous les avez transformés.
Ronan serrait son akhamé si fort que ses phalanges blanchissaient. Il ne parvenait plus à contrôler le dégoût que les jumeaux lui inspiraient. Une famille était morte,torturée uniquement pour faire le sortir du fort, pour que Kieran puisse se venger.
— Faux, leurs manques de tempérance leur ont fait perdre le contrôle. Ils étaient trop sur la brèche.
L'ironie de ses paroles les fit ricaner de plus belle. Sophie ne se contrôlait plus, essuyant ses larmes d'un revers de main. Elle ne vit pas Ronan fondre sur Kieran. Il força sa garde. Un hoquet remplaça son rire, son rictus dément était toujours collé à son visage lorsque l'akhamé mordit son trapèze. Derrière, les flammes commençaient à redescendre. Les ombres des dalles irrégulières s'étendaient.
Le choc des épées résonna. La vibration se répercuta jusque dans ses bras. Ils maintinrent la pression sur les lames. Leurs visages étaient si proches que Ronan pouvait voir ses pupilles dilatées.
— Tu as surement une dernière question avant qu'on t'arrache la langue, ricana Kieran.
— Oui. Lequel a peur de voir l'autre mourir ?
D'une torsion du poignet, Ronan glissa le métal contre le métal. Kieran s'enveloppa sur lui-même, laissant la place à la charge de Sophie. Les épées se croisèrent dans un grand fracas. Ronan la repoussa avec plus de force qu'il n'en avait besoin. Kieran n'étant pas ambidextre, ses assauts féroces perdaient en précisions. Kieran plongea, la lame perçant l'air vers sa gorge.
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La porte d'Aker
FantasyDeux millénaires d'absence n'ont pas amoindri leur loyauté. Tous sont prêts à sacrifier leurs vies pour un seul être : Pharaon. Malgré son obstination, les aînés de Typhenn lui refusent sa place parmi les gardiens du roi disparu. Et les dieux n'ont...