Ronan fut plus vif, en une fraction de seconde, il revint sur la table. Le couvercle claqua devant ses doigts.
— Tu veux me faire croire que tu sais recoudre, maintenant ?
— Parfaitement ! s'empressa de mentir Typhenn, en protégeant sa jambe. Il n'y avait pas moyen que cette aiguille la touche sans anesthésiant. Elle serra les dents si vite que le claquement résonna entre eux.
— Comme tu voudras. Il lui mit un pot presque vide entre les mains. Applique ça le temps que je vérifie combien de côtes tu t'es cassées. Son ton indiquait qu'il la considérait comme une catastrophe ambulante. Ronan replongea l'aiguille qu'il lui destinait dans le désinfectant.
Le baume avait une odeur indescriptible que la menthe et le clou de girofle ne parvenaient pas à couvrir. Elle étira le peu qu'il restait sur la ligne de peau enflammée. En quelques secondes, la brûlure s'atténua, remplacée par un léger engourdissement.
— Pas besoin de me déshabiller, grommela Typhenn en serrant les poings sur son T-shirt.
Ronan profitait de la situation pour savoir jusqu'où Rafe s'était permis d'étendre les marques qu'il avait entre aperçus.
Il la fixa sans un mot.
Typhenn sentait l'ultimatum se balancer au-dessus de sa tête, elle coopérerait sinon : l'aiguille.Il n'attendrait pas que le baume fasse effet. Résignée, elle le laissa rouler son T-shirt qui lui collait à la peau. Elle souffrait trop pour se battre à ce sujet.
Ronan palpa ses côtes.
Elle sentait qu'il la jugeait en silence. Les tatouages s'étendaient plus qu'il ne s'y attendait. Le dos,ses côtes et des épaules jusqu'aux coudes. Une toile de runes complexes recouvrait la partie supérieure de son corps de lignes noires, parfois épaisses, parfois tordues. Un mélange dérangeant,presque grotesque soigneusement entremêlées autour de la cicatrice délicate que formait le lotus. Typhenn aurait poussé Rafe à ne pas laisser un centimètre de peau immaculée, mais son cousin avait compris l'addiction qui avait menacé de l'engloutir. Celle qu'elle refusait de voir.
— - Qu'est-ce que c'est ? demanda Yan. Il s'était rapproché et scrutait ses tatouages, la bouche ouverte. Il tenait entre ses mains un bocal avec une plante ressemblant à un bébé racine dans du formol. La chose paraissait encore plus horrible à la lumière des chandelles.
— Un mélange dangereux de différentes runes pour renforcer les os. Avec beaucoup d'inconvénients et un risque énorme pour la santé si elles sont mal dessinées. Tu pourrais presque passer pour une druidesse, commenta Ronan sarcastique. Rafe n'a pas été formé par les druides. Il a été obligé de mélanger ses connaissances avec un savoir qu'il ignore.Personne ne sait ce qu'il pourrait arriver.
— C'est mon corps. Typhenn connaissait les conséquences mieux que personne. L'addiction, la perte de sensibilité immédiate à la douleur. Tout cela ne représentait rien en comparaison du châtiment qui l'attendait si on découvrait qu'elle se servait de la magie druidique pour tricher.
Typhenn tira sur son T-shirt, mais Ronan l'en empêcha. Il n'avait pas fini.
— Je sais, dit-il simplement. Son ton était le contraire de compréhensif.
Typhenn le voyait déjà ajouter cette découverte au tableau noir qui comportait les méfaits de Rafe.
Il examina tous ses os, et repéra trois côtes fêlées lors de sa chute, ainsi que sa vieille entorse qui persistait à lui pourrir la vie. Un bilan plutôt optimiste selon Typhenn qui se sentait cassée en deux.
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La porte d'Aker
FantasyDeux millénaires d'absence n'ont pas amoindri leur loyauté. Tous sont prêts à sacrifier leurs vies pour un seul être : Pharaon. Malgré son obstination, les aînés de Typhenn lui refusent sa place parmi les gardiens du roi disparu. Et les dieux n'ont...