Démons - part2

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Orlène adossée à son siège, annonça sa décision :

—  Ronan a raison. On a besoin de toi pour protéger le fort, tu ne peux pas être à deux endroits à la fois. Tu es déjà suffisamment exténué, Merle, ajouta-t-elle avec compassion.

Merle se plia à sa décision, courbant littéralement la tête vers le sol. Il ne pouvait que se résigner.Il ne franchirait pas le mur aujourd'hui.

Ronan se leva et posa une main réconfortante sur l'épaule fragile de l'adolescent. Il était encore tôt, ils pourraient revenir pour le diner. Il s'occuperait de purifier la zone avec un druide le lendemain.

En sortant, Ronan se retrouvait pratiquement nez à nez avec Tina et Yan qui écoutaient sagement à la porte depuis un moment.

Pris sur le fait, Yan fuyait son regard. Il avait déjà pris un peu de poids malgré le stress de sa situation. Ses joues et ses cernes étaient moins creux. Son teint avait perdu sa couleur terne et maladive. Il n'osait pas imaginer à quel point le garçon s'était affamé pendant ses six mois de fugue.

— Yan va te changer, nous partons dans une heure. Une longue marche nous attend, donc prend de quoi te couvrir. Je me charge des armes.

Puis, il baissa les yeux pour regarder Tina. Elle le défiait les bras croisés, lui servant une copie du regard revêche qu'elle affichait dans l'arène. Il se préparait à raisonner Tina lorsqu'elle exploserait, ne supportant pas d'être mise sur la touche. Sa faiblesse physique pourrait lui être fatale face à un èitighe teine. Si coriace et maligne fut-elle, ses os commençaient tout juste à guérir.

— Toi, tu restes ici et tu récupères le plus vite possible.

—  Bien, chef, rien n'est impossible en respirant l'air pur de la nature. Elle lui offrit un sourire sardonique avec un reniflement dédaigneux. Des gouttes perlaient de ses sourcils et ses cheveux lui collaient au front. Tina fronça le nez, un tic qui rassemblait toutes ses taches de rousseur au centre de son visage. Le signe qu'elle s'apprêtait à rétorquer, cependant ne le contredit pas.

Ronan la connaissait assez pour se méfier de son silence. Il pouvait voir ses idées se mettre à tourner, imaginant un plan pour les suivre à l'extérieur du fort. Elle essaya d'épier l'intérieur du bureau. Il lui bloqua le passage avant qu'elle ne remarque la carte toujours déroulée.

—  J'ai prévenu qu'on surveille la remise, glissa-t-il autant pour la prévenir l'air de rien que pour la distraire.

Sa soudaine immobilité valait tous les aveux. Il avait très bien remarqué la façon dont elle lorgnait la remise des druides. Maintenant, elle savait qu'elle ne pourrait pas s'approcher à dix mètres de l'endroit où ils stockaient les ingrédients susceptibles de fabriquer une certaine poudre.

Tina feignit l'innocence. Elle haussa les épaules et s'éloigna en grommelant.

—  J'aiderais à ramasser des pommes pour leur stupide fête puisque je ne suis bonne qu'à ça.

Merle sortit à ce moment précis avec une besace à la main. Il ferma la porte derrière lui.

Contrairement à son cousin, Tina ne possédait pas la discrétion suffisante pour dissimuler ce qui lui passait par la tête. Dire qu'il n'avait jamais eu le moindre soupçon, concernant les tatouages de Tina avant sa révélation ! Même après toutes les questions de Rafe sur les graphies druidiques, sur les propriétés de l'encre utilisée, et sur les nuances d'épaisseurs. Il n'aurait jamais imaginé que sa curiosité puisse être motivée par un tel projet. En y repensant, Tina n'aurait jamais pu atteindre son niveau en étant ralentie par des fractures ou la peur des blessures. À l'instar de beaucoup d'autres, il avait vu son entêtement comme une phase passagère. À présent, il ne pouvait oublier l'odeur âcre de l'encre imparfaite qui émanait d'elle. Son propre aveuglement le dépassait complètement. Il comprenait encore moins pourquoi Rafe l'avait autorisée à s'infliger ce fol espoir.

La porte d'AkerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant