La marque des reines - part2

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Des ombres rôdaient, étirant leurs bras de façon à bloquer la sortie. Les tambourinements avaient cessé. Ronan venait d'activer un sort. Un sort basique des prêtres de Noun qui conjurait les esprits alentour hors de leurs tombes. Il se cantonnait à un espace délimité tant qu'on ne plaçait pas de balise sur une cible mouvante. Dès lors, les spectres partiraient en chasse, les attireraient dans les murs, où il n'aurait plus qu'à venir les cueillir. Ou pire, il pouvait laisser les spectres les asphyxier gentiment dans les murs.

Ils devraient les contourner pour sortir. Une fois dehors, ils seraient en sécurité.

— C'est un veilleur, lui aussi, non ? Pourquoi il fait ça ? Yan avait les yeux écarquillés de quelqu'un plongé dans un film d'horreur. Il la suivit dans un réduit presque invisible entre deux piliers.

— On n'a pas le meilleur passé, Typhenn regrettait de ne pas cacher une arme à feu comme celle de Ronan dans sa manche. Elle aurait pu faire reculer les spectres qui se dressaient devant eux et emprunter la voie royale.

Elle poussa Yan dans un couloir sombre, attrapant une torche au passage, priant pour que les lumières soient toujours allumées, puis maudit Ronan d'avoir ouvert une voie des morts.Elle n'aurait pas lancé ce sort sur son pire ennemi. Il rendait la séparation entre la vie et l'autre monde aussi ténu qu'un voile.

Elle entraina Yan dans des endroits inutilisés depuis des années. Les ampoules rarement remplacées clignotaient et grésillaient. Le nuage de poussière accumulée en couches se soulevait à peine sur leurs passages. Yan soufflait et toussait derrière elle. Elle se mordit la joue, ne pouvant pas abandonner son seul témoin pour aller plus vite. Les ombres sortaient de partout.Il y avait trop de corps dans les murs. La mort infestait les couloirs, les suivants partout où ils courraient. Jusqu'au dernier moment, Typhenn espéra ne pas avoir à choisir entre sa tête et le blasphème.

Finalement, ils prendraient les chemins parallèles interdits aux vivants qui remontaient en ligne droite vers la surface. En un rien de temps, ils respireraient l'air frais de la surface. Yan passerait difficilement dans les couloirs étroits réservés au ka, mais il passerait, elle l'espérait. Avant de se préoccuper de ce problème, ils devraient couper à travers les catacombes.

— Il est trop tard pour penser trouver un autre allié. Tu es avec moi. Elle le tira par le bras, l'obligeant à accélérer alors que Yan regardait nerveusement en arrière.

Pour l'instant, les ombres restaient sur les murs, mais le sort animerait des corps. Comment ses grandes jambes pouvaient être aussi lentes ? Ronan avait-il eu le temps de place rune rune sur Yan, un sort de balise ?

—  Tu m'as tranché la gorge, je ne changerais d'ami pour rien au monde, plaisanta Yan d'une voix étranglée. Sa faible tentative d'alléger l'atmosphère tomba à l'eau.

Il s'arrêta sous une arche à l'entrée des catacombes. Des marques d'outils creusaient des sillons horizontaux dans le calcaire poreux. À la vue des ossements qui habitaient les murs de torchis, Yan serra les dents et reprit son avancée, collant aux talons de la jeune femme.

Les catacombes entouraient le temple, un labyrinthe lugubre de soldats qui le défendaient. Ces soldats qui à présent voulaient les attirer dans leur demeure éternelle. La rangée avait été extraite des cimetières pour garder le temple.

Une main sortit de son tombeau et attrapa le manteau de Yan. Des toiles d'araignées entouraient la peau séchée de dentelle délicate. Le garçon hurla à réveiller les morts.

D'un coup de torche, Typhenn brisa net l'os. Les spectres commençaient à se mêler aux corps terrestres. Ils gagnaient du terrain sur eux.

— Vous avez besoin de vous assoir et de discuter, sérieusement, insista Yan, le souffle court en surveillant les murs comme s'ils allaient lui sauter dessus. Yan resta bien au milieu du chemin.

La porte d'AkerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant