Les murs du stade vrombissaient déjà sous les applaudissements, les cris et les dialogues précipités de centaines d'étudiants. Assis sur un banc, à la seule lueur d'une lampe à néon légèrement pourpre, un jeune homme passait sa main au travers d'un gant de cuir synthétique, zébré de rainures bleutées suivant le tracé de ses phalanges.
Recourbant et bougeant ses doigts mollement pour adapter le gant à sa main, il demeurait pensif. Avait-il peur ? Ce n'était point de la terreur qui le paralysait mais de l'excitation, il se redressa pour s'étirer.
Un mètre soixante dix-huit, des cheveux bruns et courts . Une fine ligne de barbe naissante le long des joues et un regard couleur terre. Il étendit son bras et observa les lignes azurées du gant toujours inactives.
Un pantalon de tissu ample grisâtre tenu. Une ceinture possédant les même nervures que ses gants. Pieds nus. Un anneau argenté fixé à chacune de ses chevilles, une petite perle bleu luminescente gravée sur chacun d'eux. Son attirail était au complet pour jouer à Qantum.
Un instant, il observa le débardeur gris entre ses mains et le numéro "1" couleur saphir qui y était inscrit. Finalement, il l'enfila. Il ne cessait de penser à la responsabilité qui pesait sur ses épaules. Un match important, l'un des plus décisifs de la saison contre les féroces représentant d'Arkadia, une cité voisine.
S'il est vrai que l'être humain avait réussi à rentrer dans une nouvelle ère de prospérité après la guerre, certains estimaient qu'il y avait trop perdu. Enfermant ses habitants dans des citées modernisées, cet isolement avait provoqué des rivalités entre les différents campus étudiants encore dans l'âge où les émotions guident la pensée.
Ceux d'Arkadia étaient de bons joueurs mais également une bande rivale. Seth eut un léger ricanement en repensant à quelques accrochages ayant eu lieu par le passé.
On toqua à la porte du vestiaire, il se tourna. Dans l'encadrement, un autre garçon fit son apparition. Plus fin et plus petit que lui, un mètre soixante-dix maximum. Il possédait des cheveux mi-long replié en mèches sur la droite de son visage, blonds.
- T'es prêt, Cap'taine ? On attend dans l'ascenseur. Y'a du monde ce soir, fais pas ton timide. Dit-il sur une voix enjôleuse et sarcastique, haussant les épaules. Le grand approcha et tendit son poing. Seth répondit en frappant doucement le sien dessus.
- Cette fois, on gagne, vieux frère. Le blond le gratifia d'un sourire assuré avant de prendre, avec lui, le chemin du couloir central qui menait dans la cage d'ascenseur.
De là où ils étaient, on apercevait déjà l'équipe au fond du couleur. Le temps de la marche, une petite discussion à voix basse eut lieu.
- Il parait qu'ils sont sacrément en forme, en face. Il va falloir assurer. Lança-t-il au capitaine qui ne sembla pas surpris.
- J'ai tout prévu. Répondit l'intéressé avec détermination. Cette fois-ci, nous ne laisserons pas la balle nous échapper... et je compte bien leur faire mordre la poussière.
Son compère hocha négativement la tête en soupirant. Décidement, on ne changerait rien à son capitaine. Toujours si confiant.
- Ce n'est pas si simple. Mais on y croit, Seth. On y croit. Il y eut un hochement de tête commun et ce fut sous les encouragements de leur cinq autres compagnons qu'ils entrèrent dans l'ascenseur.
Celui-ci se referma et commença sa longue ascension vers le terrain. Entourés de murs noirs censés favoriser la concentration, l'équipe fit silence. Seth se tourna pour faire face à la porte par laquelle il était rentré, gardant les yeux fermés.
Un premier petit déclic indiqua que leur transport était arrivé à destination. Il leur restait désormais cinq minutes pour discuter, dans le noir, avant d'entrer sur le terrain.
Au milieu des respirations, lentement, le capitaine prit la parole. Sa voix calme et reposée était apaisante. Elle se voulait régénératrice.
- Nous avons travaillé durement. Nous nous sommes entrainés. Nous avons simulé tout un tas de cas de figures. Il marqua une pause.
- Nous sommes prêt pour ce match-aller. J'en suis convaincu. Une nouvelle pause.
- Nous ne laissons personne sur la touche, nous nous entraidons. N'oubliez pas que notre but, c'est la victoire en équipe. En équipe et rien d'autre.
Les autres répétèrent tous d'une seule voix : En équipe ! Un sourire illumina le visage de Seth. La porte s'ouvrit.
De part et d'autres, un grand stade en forme d'arc de cercle. Devant lui, une ligne entre les gradins menant directement à la "cage". C'est ainsi qu'ils nommaient cet immense rectangle entouré de mur transparents et bleutés dans laquelle ils seraient bientôt tous en train de jouer.
Qanthum était bien plus qu'un jeu, c'était le sport du siècle. Il était capitaine de l'équipe titulaire de Sion, cité réputée pour son excellence en matière de travail et de technologie. Comment envisager la défaite ? C'était inconcevable.
Annoncé par une voix métallique et féminine, il commença sa lente marche vers le terrain au milieu du stade sous un tonnerre d'applaudissements. Les drapeaux argentés ornés de l'aigle bleu de Sion flottaient sur la gauche et ceux au scorpion noirs et rouges d'Arkadia, étaient situés sur la droite.
Les encouragements et les cris se poursuivaient alors que Seth approchait du mur bleuté. Lui faisant face, il fit une pause un instant puis le traversa pour entrer sur le terrain.
Le plancher, dont la texture se trouvait être un savant mélange glissant entre le métal et le bois, était tout aussi lisse et blanc que d'ordinaire. A l'autre bout du stade, une équipe de sept concurrents à maillots écarlates attendait patiemment son heure.
La voix métallique du stade refit lentement une annonce : Activation du champ de gravitation dans trois...deux... un...
Seth inspira puis expira. Les lignes de ses gants, de sa ceinture et de ses anneaux aux chevilles s'illuminèrent. Son corps commença à léviter. Le match allait enfin pouvoir commencer.
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Hellions : partie 1
Science FictionUn monde parfait. Un quotidien idyllique. Une jeune fille insouciante. Une tragédie. A une époque où la technologie frôle le fantastique et où les normes segmentent la société selon un équilibrage presque parfait, certains se plairaient à dire que l...