Lamentablement ennuyant... C'était bien ce que songeait Seth à voix basse, les yeux rivés sur son smartphone où s'affichaient divers réseaux sociaux entre lesquels l'adolescent vagabondait sans véritable but.
Peu importait les explications de cet espèce de guignol à cheveux rouges... pour qui ce prenait-il, ce prétentieux ? Il n'était pas beaucoup plus vieux qu'eux. Le manque de respect flagrant qu'éprouvait Seth à l'égard de cet intervenant n'était cependant pas la seule chose qui le poussait à ignorer le contenu de ce cours.
Qu'est-ce qu'il pouvait bien avoir à faire des dimensions du Mur ? De la portée des canons ? Des prototypes de barrière à impulsions ? Rien de tout ceci ne l'intéressait. Absolument rien, car ce n'était pas les machines qui avaient autrefois vaincu les Skryns.
Même si la technologie de l'anti-gravité, des armes à impulsions et des barrières translucides avaient véritablement contribué au triomphe final, c'est bien le génie d'un seul homme qui avait su utiliser ces dispositifs pour combattre l'ennemi.
Alors à quoi bon s'attarder sur les détails d'Horizon ? La seule chose capable de vaincre les Skryns sur cette muraille de métal... c'était et cela avait toujours été les hommes eux-même. Seth en était convaincu.
Soupirant en décollant les yeux de son téléphone, son regard s'égara sur la droite. Amélia ? C'est ainsi qu'elle s'appelait. Coudes sur la table, elle regardait l'intervenant et les schémas projetés en trois dimensions au-dessus de lui avec une attention digne d'un supporter de Qanthum devant un bon match.
Ses cheveux blonds semblaient avoir été parfaitement lissés et préparés ce matin. Un visage doux et pourtant un sacré caractère bien trempé. Leen lui avait parlé de sa meilleure amie comme d'une véritable lionne encagée par un masque de timidité.
Émergeant de ses pensées, la jeune femme remarqua son regard perché sur elle et lui adressa un froncement de sourcil copieux qui lui fit détourner les yeux. Effectivement... quel caractère ! Seth se replongea dans son smartphone et s'apprêtait à démarrer un jeu lorsque une sonnerie retentit à l'extérieur de l'amphithéâtre.
- Prenons une petite pause. Disons dix minutes. Allez donc prendre l'air, vous avez l'air endormi. Déclara le conférencier en désactivant les projections en 3D.
Amélia se releva et sortit accompagnée d'Aito, débouchant sur un grand couloir. Elle suivit le flot d'étudiants jusqu'à une sorte de réfectoire dans lequel écrans géants, distributeurs automatiques, tables et canapés se côtoyaient dans une ambiance chaleureuse.
Il y avait en tout quatre pièces semblables à celle-ci aux quatre coins du bâtiment. Chacune d'entre elles pouvait abriter une centaine d'étudiants sans le moindre problème.
L'instauration de ces espaces de travail et de détente avait été rendue obligatoire pour l'ensemble des établissements des cités du Nouvel Empire par les Immortels. Ces derniers avaient été soucieux d'offrir à la jeunesse le meilleur confort nécessaire à l'étude de documents divers. Encore une mesure qu'Amélia et sa génération saluaient avec le plus grand des enthousiasmes.
Se mettant dans l'une des queues devant une machine à café, Amélia prit enfin la peine d'entretenir Aito sur les deux premières heures du cours qui venaient d'être dispensées.
- C'est assez incroyable de penser qu'Horizon a été édifié en à peine cinq ans quand on voit sa taille et la quantité phénoménale de métal qu'il a fallu pour le bâtir. Lança-t-elle, il haussa les épaules.
- Le développement de la robotique pendant la guerre a largement aidé à l'édification. Les nouveaux modèles humanoïdes mis au point pendant ce laps de temps sont devenus très performant. Une force de travail capable de produire sans discontinuer. Un rêve pour n'importe quel bâtisseur. Répondit-il, tirant son smartphone de sa poche pour le consulter.
- Quand même. Un tel système de défense. Entre les canons, les militaires, les réseaux souterrains électromagnétique, les barrières à impulsions, les canaux de saturation en cas de brèche. On se demande comment les Skryns pourraient passer sans consentir à des centaines, voir des milliers de pertes. Quatre cent mètres de haut...
Amélia était rêveuse, que pouvait bien donner un monstre d'acier de cette ampleur lorsqu'on se retrouvait face à lui ?
- C'est à toi. Indiqua son ami alors que la personne devant elle retirait sa boisson.
La jeune fille se retrouva face à face avec ce cube blanc métallisé pourvu d'un écran tactile présentant les boissons disponibles et d'une trappe à la droite de celui-ci, à hauteur de main. Amélia consulta dans le menu et opta pour un thé, ajustant le niveau de sucre et de caféine.
A peine trente secondes d'attente et la trappe s'ouvrit, le gobelet attendait d'être saisi sur un petit plateau en lévitation. Elle le retira, s'éloigna et sortit finalement de la pièce pour se retrouver dans la galerie principale. Aito la rejoignit quelques instants plus tard, ayant préféré le chocolat à un café. Leur conversation tourna au banal entre deux gorgées.
Où avait bien pu passer Leen, d'ailleurs ? Avait-elle encore fini la soirée avec un joueur au point de ne plus pouvoir se lever le matin pour aller en cours ? Probablement. Songeuse quand à la suite du cours, son ami tapota l'épaule d'Amélia.
- Regardes, là.
Il pointa du doigt l'une des entrées de leur amphithéâtre. Adossé contre le mur et ayant quitté sa blouse blanche, l'intervenant aux cheveux écarlates était entrain de consulter son smartphone avec un petit sourire sur le visage.
Son haut noir semblait plutôt fin, manches relevées au niveau des coudes. Toujours le même pantalon de tissu que l'autre fois. Amélia observa Aito.
- Quoi ? C'est l'intervenant, et ?
- Tu ne voulais pas lui parler ? C'est ce que tu m'as dis pendant le cours. Tu avais une question sur les Skryns je crois. La jeune fille tiqua, plissant les yeux.
- Tu essayes de me pousser au vice ? Tu sais très bien que je suis mauvaise dans les premiers contacts... sans parler de ma timidité...
- Justement ! Il faut bien t'entraîner, non ? Il ricana à mi-voix.
Bien qu'elle soit vexée de la tactique employée, il n'avait pas tort. Peut-être n'aurait-elle pas une autre occasion de lui parler seul à seul. Il fallait absolument découvrir qui il était, d'où il venait et d'où il tirait ses compétences.
Prenant son courage à deux mains, elle commença à marcher, thé à la main. Une gorgée, puis deux, puis trois. Son cœur battait frénétiquement tant elle ignorait comment aborder cet individu.
Une fois arrivé à sa portée, elle observa les yeux raisins quitter le téléphone pour se planter dans les siens. Il eut un léger sourire en coin, comme l'autre soir. Sa voix douce et presque mélodieuse, contrastant avec son impériosité de l'amphithéâtre, s'éleva lentement.
- Bonjour, jeune fille. Elle s'empourpra. Cette fois, elle y était.
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Hellions : partie 1
Science FictionUn monde parfait. Un quotidien idyllique. Une jeune fille insouciante. Une tragédie. A une époque où la technologie frôle le fantastique et où les normes segmentent la société selon un équilibrage presque parfait, certains se plairaient à dire que l...