Chapitre 2 - #18

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Sous les ordres du sergent Perces, la troupe avançait à pas rapide au travers des ruines et des flammes sans jamais s'arrêter. Dans le lointain, tirs et hurlements s'entremêlaient dans un concert des plus déplaisants. Leen sentait des sueurs froides parcourir son corps, des orteils jusqu'en haut de l'échine. 

Dès qu'un monstre apparaissait d'un côté ou d'un autre, l'ensemble des tirs étaient focalisés sur lui afin qu'il ne puisse ni crier ni s'approcher suffisamment pour provoquer de dommages au convoi. Jusqu'à maintenant, pas un des soldats présents n'avait trépassé. Malgré cette apparente sécurité, la jeune fille ne se sentait pas bien. Ses sens éveillés lui criaient de fuir et de ne pas poursuivre sa route. Hélas, il n'y avait nul part où aller ni se cacher.

- Toujours l'esprit ailleurs ? Restes concentrée. Murmura Dante qui s'était approché d'elle. Leen hocha la tête brièvement. Son esprit était tiraillé entre de multiples sensations contradictoires qui n'en finissaient pas de la torturer.

- J'essaye. Répondit-elle à voix basse.

Un soldat cria et la troupe braqua ses armes sur la gauche en direction d'un ancien commerce de matériel électronique. Brisant un mur, un skryn se rua vers eux. Les tirs combinés des soldats eurent raison de la créature dont les tentacules n'eurent même pas le temps d'approcher une proie. La bête tomba, ses yeux orangés s'éteignirent et se grisèrent alors que son corps perdait sa couleur vive. La jeune fille ignorait pourquoi mais dès lors qu'ils décédaient, les skryns perdaient leur couleur pour ne devenir qu'un tas inerte de chairs noires. Peut-être Amélia aurait-elle la réponse ? Amélia... la reverrait-elle jamais ? Elle se contint pour ne pas y penser.

Le son des explosions et les aboiements plaintifs des skryns entrain d'être massacrés se poursuivaient dans le lointain. Les forces spéciales livraient certainement un combat impressionnant et Leen restait bouche bée devant le temps que pouvait prendre cet affrontement. D'ordinaire, les escouades étaient rapidement submergée mais ces "soldats spéciaux" semblaient bien plus capables de résister à l'agresseur que n'importe lequel des militaires qu'elle avait déjà croisé.

Elle accéléra le pas afin de se retrouver tout près de Perces, en tête de la troupe. Dans un premier temps, elle fut incapable de démarrer la discussion, ses vieux démons de timidité refaisaient surface. Elle prit le temps de se remémorer son entrainement et prit finalement les devants.

- Sergent ? L'interpella-t-elle sur un ton sérieux mais pas autoritaire.

- Leen Barskin. Qu'est-ce que vous voulez ? Répondit-il avec son manque de tact caractéristique.

- On ne m'a jamais parlé des forces spéciales. Qui sont-ils ? Des soldats entrainés différemment ? Demanda-t-elle timidement, prudente. Elle ne souhaitait pas avoir l'air trop curieuse.

- Les recrues n'ont pas à avoir ce genre de détails. Le sergent observa la jeune fille et même à travers son masque orné des deux cornes rouges qu'il avait peint, elle devinait son air strict.

- Je ne voulais pas paraître odieuse, monsieur. Mes excuses. Ces bruits de tirs durent depuis quelques temps maintenant. Je me demandais juste... Il la coupa d'un mouvement négatif de la tête.

- Vous êtes recrue, Leen. Vous n'avez pas à vous questionner. Vous obéissez, c'est suffisant, on ne vous demande pas plus. Vous ne pouvez pas tout comprendre. Le sergent leva soudainement son bras et fit signe à sa troupe de poser genou à terre.

Leen s'exécuta sans chercher à comprendre. Suivant le protocole habituel, les soldats commencèrent à se réfugier derrière des tonneaux, des débris ou tout autre élément du décor susceptible de les couvrir. La jeune fille roula de côté et rejoignit l'un de ses pairs qui s'était glissé en dessous d'une petite montagne de béton. Elle tentait d'apercevoir la raison de cette mise à couvert mais ne distinguait malheureusement rien depuis sa position. Elle avait cependant une vue sur le sergent situé à sa droite, qui n'avait pas pris la peine de se cacher comme ses hommes.

Courageusement, l'officier s'avançait pas à pas. A moitié relevé, son fusil était braqué devant lui et il ne s'arrêta qu'une fois arrivé devant la carcasse d'une voiture surement tombée depuis les routes en hauteurs. Consolidée par d'autres débris de tous types, une sorte de mur s'était formé sur le chemin et seules les extrémités latérales entre lui et les buildings brisés étaient assez large pour laisser passer un humain.

L'officier prit le temps de glisser un œil par l'une des rares fentes présentes dans cet amas. Leen ne pouvait en être certaine mais elle aurait juré que Perces s'était mis à trembler. Les secondes passèrent et chacun évitait de faire un geste brusque ou d'émettre un quelconque bruit. Elle sentait des frissons parcourir son corps. Peur ou de l'excitation... voir les deux en même temps. Son corps de guerrière se nourrissait de cette situation stressante. Son esprit, lui, était bien moins enjoué.

Après trois minutes à demeurer de stand-by, le sergent fit un nouvel appel de la main et la troupe quitta ses positions pour revenir vers lui. Les soldats se disposèrent en cercle pour recevoir les instructions de leur supérieur.

- Bon, les bleus. On est à mille mètres du bâtiment de recherche. Mon casque est parvenu à zoomer et les forces spéciales sont effectivement en plein combat. J'ignore combien y'a de skryns là-bas mais ils ont monté des barricades autour de la structure. Les regards paniqués commencèrent à fuser de tout côté, Leen chercha instinctivement Dante du regard sans le trouver au milieu de tout ces casques.

- On va devoir foncer à travers la rue face à nous. En ligne droite. On charge, on tire et on prie pour que ça passe. Un soldat nerveux haussa le ton.

- Mais putain ! On va tous crever si on fait ça, sergent !

- Cesses d'aboyer, crétin ! Écoutes-moi. Tu ne peux pas retourner en arrière sans nous et on a nos ordres. Alors pour l'Empereur, on va les suivre et se rendre sur zone. C'est bien clair ? Répondit l'officier, sa voix était tranchante et sans pitié. L'effronté acquiesça et s'en tint là.

- Bon, on se tient prêt. A mon signal, tout le monde debout et on charge.

Leen sentit une silhouette se glisse derrière elle, on lui tapa l'épaule doucement par deux fois. Aito était à sa suite, elle le savait. Mille mètres à franchir. Les skryns seraient certainement aux aguets et il y en aurait en nombre. Faire traverser tout le monde serait impossible et Perces le savait, c'était pour ça qu'il avait tremblé. 

La jeune fille resserra sa pression sur son arme et se tenait prête au départ. Elle pouvait entendre son cœur harceler sa poitrine dans des sursauts frénétique. Tous ses muscles semblaient tendus. Il s'agissait peut-être de la traversée la plus dangereuse de toute sa vie. Dans le silence final précédent l'assaut, elle pouvait ouïr certains de ses camarades envoyer leurs prières à leurs familles ou à l'Empereur. Quelle horrible façon de lui rappeler dans quelles ténèbres elle s'apprêtait à charger.

- Maintenant ! Pour l'Empereur ! Hurla Perces, se dressant hors de sa cachette et chargeant, commençant à vider son chargeur.

Suivant le mouvement, Leen se releva et courut. Une fois le mur passé, elle comprit. Les skryns étaient là, partout sur le chemin en direction du grand bâtiment que l'on apercevait au loin. Sur le sol, sur les murs. Les multiples horreurs à la peau orangée étaient prête à recevoir cette troupe de valeureux suicidaires. La jeune fille braqua son arme et tira sans s'arrêter. Chacun de ses pas pouvait être le dernier mais elle ne comptait pas rendre l'âme aujourd'hui.

Hellions : partie 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant