Chapitre 4 - #24

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Seul, Ren s'enfonça en direction de l'aile nord du Centre où les Spectres possédaient leurs quartiers. Il n'y séjournait pas souvent par manque de temps principalement. Arrivé devant les deux grandes portes en bois massif qui marquaient l'entrée du domaine de "l'élite" des hellions, il prit un instant pour regarder les motifs sculptés dans cette oeuvre d'art d'un autre temps. Ici et là avaient été tracé des lignes gothiques aux apparences runiques difficiles à décrire. Ajoutés à ces dernières, des représentations quasi-hiéroglyphique d'une étrange épopée miroir ornait chacune des portes. Au gré de son imagination on pouvait y voir symboliquement une lutte mystique ramenant à celle que menait les hellions contre les skryns.

L'homme poursuivit sa route et entra, changement d'atmosphère. Aux couleurs écarlates et dorés étaient désormais substituée une atmosphère noirâtre, pesante. Dans l'antre des Spectres, il n'existait nul couleur chaude et nul décor fantasmatique. Exit, les tableaux et les colonnes stylisées. Oubliés, les lampes aux apparences léchées et harmonieuses. Une véritable brutalité ce dégageait de cet endroit saupoudrée d'une teinte d'effroi. Moquette sombre, mur gris pâle, luminaires semblables à des torches. Le terme "antre" ou "repaire" correspondait parfaitement à ce lieu où seul les initiés pouvaient entrer sans craindre pour leur vie.

A travers le sordide tunnel, à la seule lumière des flammes, Ren marcha dans un calme olympien. Cela ferait bientôt quatre ans qu'il s'était mis au service des Spectres et de leur idéal, cette ambiance ne lui pesait plus. Pour ainsi dire, elle le détendait. Là, dans le noir, il se sentait apaisé. Rien ne viendrait le troubler ici. Nul skryn, nul importun, nul mauvaise nouvelle ne pourrait entamer sa sérénité. Une poignée de minutes lui suffirent pour trouver la salle commune où se réunissait, en général, les siens.

L'image que l'on aurait d'une telle pièce avait un tout autre sens au sein des Spectres. Certes, quelques tables et autres sièges permettaient de s'asseoir mais cette pièce avait surtout pour principal fonction d'être à la fois un espace méditatif et un terrain d'exercice. La première moitié de l'espace était occupé par la moquette traditionnelle que l'on trouvait dans tout le reste de l'aile mais la seconde moitié était quand à elle laissé à nue. Le sol devenait alors pierre, dépourvu de tout travail. Ici et là, jusqu'au fond de cette vaste étendue, on observait des colonnes d'environ deux mètres de diamètre. Certaines hautes, d'autres bien plus petite d'à peine un mètre et demi de haut.

Ren s'arrêta à la frontière entre ces deux mondes et tenta de discerner quelqu'un dans l'obscurité lointaine du champ d'entraînement. Rien, évidemment. Même entre eux, les Spectres avaient parfois des difficultés à se montrer sans passer par une étape de repérage, c'était ainsi. Le roux n'eut qu'à penser, qu'à effleurer l'idée et ses épaisses bottes se désagrégèrent lentement en une matière visqueuse qui se répandit au sol. Pieds nus, il s'élança d'un bond sur l'un des monticules circulaires les plus bas. Les rumeurs prétendaient qu'au départ la salle commune de la brigade n'était constituée que de la première partie chaleureuse qui accueillait les visiteurs. La seconde, plus proche d'une grotte que d'une pièce civilisée, avait été créé ensuite.

Attentif en toute circonstance, le jeune homme entendit un craquement très subtile derrière lui. Instinctivement, il sauta en avant vers un autre cercle et pu ouïr un vacarme assourdissant derrière lui, quelqu'un venait de tenter de l'attaquer. Son assaut avait visiblement entamé son précédent perchoir. La chose était rapide et se déplaçait vivement. Le roux ferma les yeux et se concentra. Une esquive à droite, une à gauche. Sans même prendre le temps de se focaliser sur la nature de son adversaire, il parvenait à anticiper ses mouvements. Nouveau saut en hauteur, atterrissage sur le sol. Pivot sur la droite, encore un coup manqué pour le félon. Un coup de poing approche, plus besoin de s'enfuir. Ren élança sa main droite et, paume contre phalanges, arrêta cette nouvelle tentative.

Hellions : partie 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant