Le Professeur s'éclaircit la gorge avant de débuter sa réponse sur tout autre ton. Plus solennel, moins fanatique et plus sérieux.
- Certains généraux estiment que mes recherches et que mon projet tout entier n'ont pas leur place au sein de l'armée. On entend parfois dire que je suis fou et que je pratique de la boucherie plus que de la science. Le regard de Kain sembla se déporter vers la jeune femme gardant la porte, Dante suivit les yeux du scientifique et put sentir le malaise de cette dernière lorsque l'homme de science la fixa. Quelque chose n'allait pas.
- Oui. Certains pensent que je ne fais que torturer de pauvres et innocents jeunots dont le corps n'est pas encore totalement transformés. Les joies de la fin de l'adolescence. N'est-ce pas ? Ses yeux grisés allèrent alors dévisager l'assemblée. Une à une, les recrues détournaient leurs iris des siennes. Un air dément commençait à prendre possession de lui.
- L'Homme craint le changement et je lui ai apporté. Vous me demandez pourquoi on ne vous a rien dit ? Excellente question... excellente... excellente ! Le scientifique frappa alors sur la table, ses bras tremblant.
- Le projet Hellions... a failli ne pas exister, vous savez ? Hm ? Quand il a été terminé, je l'ai présenté aux Généraux. Qu'ont-ils dit ? Que j'étais un fou ! Moi. Le plus brillant cerveau de ce temps. J'ai dû me battre pour rencontrer l'Empereur. Oui, l'Empereur... Kain reprit son tour de la table, rabattant ses cheveux en arrière et tapotant sa blouse. Sa voix déraillait entre le calme le plus serein et la folie la plus complète.
- J'ai défendu mon projet devant le leader suprême et il a fini par comprendre l'intérêt de mes recherches. Et il y a dix ans, le tout premier Hellion a été créé. Il frappa ses mains l'une dans l'autre, comme un artiste achevant une peinture.
- J'ai créé le premier être humain d'une nouvelle génération. Vous voulez la vérité ? J'aurai été bien mal de vous la cacher. Regardez, donc. Il claqua des doigts et le tableau s'anima pour lancer une nouvelle vidéo.
On y voyait désormais une table d'opération surplombée d'une sorte d'immense machine pourvue de tout un tas de bras mécaniques portant scalpels, seringues et autres ustensiles parfaitement ignobles. Quelqu'un était allongé quasiment nu sur la plaque de métal, entouré de scientifiques, un jeune homme attaché aux chevilles et aux poignets.
Lorsque les chirurgiens se saisirent des bras de métal pour commencer l'opération et lorsque les premiers hurlements commencèrent à se faire entendre, Amélia passa sa main sur sa bouche. On ne voyait pas exactement ce qu'ils lui faisaient mais à l'entendre on aurait juré qu'aucun anesthésiant ne lui avait été prodigué. L'image se figea et l'on entendit une recrue abattre son poing sur la table.
- Vous êtes un pauvre malade ! Je perds mon temps ici ! Il se leva et quitta la salle. Le Professeur le regarda faire puis haussa les épaules.
- Ceux qui veulent le suivre, vous pouvez le faire dès maintenant. La réalité nécessite des sacrifices et je ne peux accepter ni les couards, ni les faibles d'esprit.
C'est alors qu'une par une, les recrues suivirent le mouvement. Lentement, surement, les regards s'interrogeaient puis décidaient. Amélia observa ses compagnons se diviser. Avec un regard apeuré, Leen se leva et fut bientôt suivi par Aito. Celui-ci laissa son regard dérivé vers ses pairs en hochant négativement la tête. Il n'était pas utile de parler, ils avaient tous compris. Pour lui, tout cela relevait de la folie.
Amélia déglutit. Qui devait-elle suivre ? Seth, Dante et Sélène semblaient décidés à aller jusqu'au bout et à intégrer le programme. Les deux autres avaient préférés jouer la sécurité. La jeune femme s'interrogeait et se sondait. Il ne s'agissait plus de rejoindre une armée mais de participer à un projet qui pouvait lui coûter la vie. Elle sentit l'étreinte de la main de Seth sur son épaule. Il s'était approché juste pour cela.
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Hellions : partie 1
Science FictionUn monde parfait. Un quotidien idyllique. Une jeune fille insouciante. Une tragédie. A une époque où la technologie frôle le fantastique et où les normes segmentent la société selon un équilibrage presque parfait, certains se plairaient à dire que l...