Seth fit pivoter son siège, joignant ses mains en plaçant ses coudes sur ses genoux et fixa Amélia. Elle restait là, interdite, sans rien dire. A plusieurs reprises, il esquissa l'envie de lui parler sans jamais la voir réagir. Après cinq bonnes minutes de réflexions, de silences et de soupires, elle haussa enfin le ton.
- Les apparences sont trompeuses. Peut-être que tu avais raison quand tu me disais de ne pas trop me fier à un cadre fixe. Dit-elle simplement, presque honteuse d'avoir refusé cette éventualité jusqu'ici.
- Comment cela ? Demanda-t-il, surpris.
- Ils ne sont plus des cobayes mais Jaëger nous doit une protection. S'ils étaient morts alors oui, notre nombre diminuerait. Mais s'ils ne sont plus considérés comme tel alors tout devient beaucoup plus clair. Seth passa une main sur son visage et lui indiqua d'un mouvement de main qu'elle l'avait perdu.
- C'est pourtant simple. Jaëger est une IA, il ne ment pas, il n'est pas capable d'émotions... même s'il les mime. Partant de là, il nous a dit que Dante et Sélène étaient passés à autre chose, eux ainsi que les autres disparus. Il nous a dit que notre nombre ne changeait pas... cela veut dire qu'il ne considère plus comme des cobayes. Tu comprends ? Le jeune homme hocha la tête, claquant ses doigts.
- Oui. Il y a donc deux possibilités. Soit ils ont fait quelque chose qui les a propulsé à un autre stade... et ils sont désormais quelque part dans le Centre. Soit on les a éjecté du projet.
- La seconde option est peu probable... le Centre est un projet top secret, je ne crois pas qu'on soit éjecté d'ici. On y meurt uniquement. La première option me paraît plus logique. Ils ont dû mettre le doigt sur quelque chose.
- Si c'est le cas, quelqu'un doit forcément être au courant.
- Je pense aussi. Le seul élément louche porté à notre connaissance depuis notre réveil, en excluant les disparitions, c'est le vestiaire qui a pris feu. On devrait commencer par là. On saura assez vite quel était l'origine du feu.
- L'accident n'est pas une option, nous sommes bien d'accord. Seth se leva, prêt à sortir, lorsque la main d'Amélia l'attrapa et le retint.
- Un instant. Nous n'avons encore aucune idée du plan que nous allons mettre en oeuvre, ni des questions que nous comptons poser. Nous devons être méthodique.
- Est-ce vraiment nécessaire ? Le temps presse. La probabilité que nos compagnons soit en danger se fait plus probable à chaque instant passé à traîner ici. C'est assez simple à comprendre : on doit les trouver le plus vite possible, peu importe le moyen.
L'expression qui se construisit alors sur le visage de Seth fit sourire Amélia au point de la rassurer quelques instants. Elle le trouva étonnamment charismatique, déterminé, investi. Pour la première fois, elle ressentait de façon palpable l'attachement qu'il éprouvait à leur égard. Toute son envie de bien faire. Qui en aurait autant attendu d'une personne qu'elle méprisait presque il y a encore moins d'un an ? Avait-il changé ou avait-il toujours été aussi altruiste ? Voyant qu'elle ne répondait pas, il haussa le ton.
- Et bien ? Qu'y a-t-il ? Qu'est-ce que j'ai dis ?
- Rien. Je suis contente que tu y mettes autant de cœur mais nous devons rester méthodique. Reste un instant, et écoute un peu.
Après une vingtaine de minutes passé à écouter sa camarade, Seth et elle sortirent enfin pour se diriger en direction du fameux vestiaire où le feu s'était déclaré. A mesure qu'ils avançaient, ils tentaient de repérer le placement et déplacement des gardes. Il leur paraissait étrange que les trajets soient toujours similaires ou presque, comme si les sentinelles se ressemblaient et empruntaient des itinéraires prévus à l'avance. Il y avait de quoi s'interroger.
Deux tours de couloirs plus loin, ils parvinrent non loin du vestiaire et firent mine de s'intéresser à chaque porte close pour paraître un peu déboussolé. Ils finirent par se planter devant le garde dépêché devant le vestiaire incendiés. Seth se mit en avant et approcha le premier, toisant celui-ci qu'il dépassait d'à peine quelques centimètres.
- Que puis-je pour vous ? Dit-il, machinalement.
- Nous voulions en savoir plus sur ce qu'il s'est passé récemment dans les vestiaires, on est préoccupé par la sécurité du Centre. Indiqua le jeune homme avec un timbre de voix concerné, voir inquiet.
- Tout est sous contrôle. Il ne s'est rien passé.
- Rien ? Mais vous êtes dépêché devant cette salle, il doit bien y avoir une raison. On a entendu parlé d'un incendie, était-il de nature criminel ? Soyez plus précis. Poursuivit Amélia.
- Je n'ai pas de compte à vous rendre. Répondit-il sèchement.
- Notre sécurité, c'est votre travail, non ? On a besoin d'être mis au courant si on veut se préparer à toute éventualité. Alors ? Insista Seth.
- Je vous ai dis qu'il n'y avait rien à voir.
Le calme glacial et le regard inexpressif du garde laissa les deux amis pensifs. Seth commença à repartir et Amélia se plaça devant la sentinelle, reculant lorsque son ami la percuta d'un coup d'épaules.
- Seth ! Mais qu'est-ce que tu fais ? Gronda-t-elle.
- Tu es vraiment la dernière des bécasses, tu vois bien qu'il n'y a rien. Rétorqua l'autre, pivotant à moitié le regard mauvais.
- Tu ne creuses jamais rien. Tu ne sais faire que de beaux discours pour te donner des airs de leaders mais tu es une coquille vide. Tellement vide. C'est misérable !
- A qui crois-tu parlé ?! Cria-t-il soudainement, emporté par un élan rageur.
Il se jeta vers elle et d'un revers de main qui se voulait visiblement rapide et puissant, il cingla la joue de sa camarade. La force du coup fit reculer la jeune fille et celle-ci trébucha, tombant à la renverse. Elle mit la main sur son visage, presque horrifiée. La sentinelle se déplaça alors pour se mettre entre deux.
- Je vous ordonne de vous calmer immédiatement. Annonça le garde, dégainant un objet noir cylindrique à sa ceinture et le dépliant avec un simple mouvement du pouce. Une sorte de matraque.
Seth lui fit un signe de la main, prêt à le recevoir, un air arrogant planté sur le visage.
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Hellions : partie 1
Science FictionUn monde parfait. Un quotidien idyllique. Une jeune fille insouciante. Une tragédie. A une époque où la technologie frôle le fantastique et où les normes segmentent la société selon un équilibrage presque parfait, certains se plairaient à dire que l...