Munich, 15 août 1943.
Le cœur d'Hermione bondit dans sa poitrine lorsqu'elle reconnut la silhouette de Blaise terrée au fond de la cave sombre. Figée sur le seuil, elle craignit de voir son visage familier se dématérialiser et s'évanouir dans la pénombre. Sa respiration se suspendit jusqu'à ce que le métis ne se redresse lentement pour croiser son regard. Un contact visuel vertigineux qui parut reconnecter son corps à la réalité.
— H-Hermione, balbutia-t-il.
Il crut faire face à un mirage, à une illusion de son esprit épuisé dans un corps poussé dans ses retranchements, dans les limites de ses résistances. Ses yeux s'écarquillèrent et un mélange de surprise et de soulagement déferla sur son être immobile. Assis à même le sol, crasseux, épuisé, affamé, il parvint à accueillir la vague d'émotions qui le faucha.
Hermione se précipita dans sa direction et en oublia toute conscience professionnelle. Elle ne prêta aucune attention à l'odeur nauséabonde qui se dégageait de son amant et de cette pièce vétuste et l'enlaça avec la plus sincère des spontanéités. Blaise ne put retenir la plainte qui jaillit de ses lèvres. Ses muscles endoloris grincèrent sous ce geste trop brusque et les coups qu'il avait reçus enfantèrent une douleur intense.
— Hermione, tu devrais t'abstenir pour le moment, la somma George, d'une voix plus mesurée.
Celle-ci fronça les sourcils avant de s'écarter à regret du corps de l'homme qu'elle aimait et qu'elle avait cru perdu. La gorge nouée, elle examina plus sérieusement les traits tirés par la fatigue de Blaise. Elle distingua, malgré la pénombre à laquelle ses yeux s'habituaient lentement, les lésions sur son visage. Une coupure tranchait son arcade sourcilière, un large hématome s'élargissait le long de sa mâchoire, du sang coagulé formait la liaison entre son front et la naissance de ses cheveux crépus. Hermione sentit une vague de haine, de rancune, la traverser :
— Cet ignoble personnage...
— Je vais bien, dit Blaise, dans un souffle.
— C'est faux.
Bien entendu que c'était faux. George observait ses touchantes retrouvailles d'un œil à la fois indulgent et impatient. Il n'était pas de ceux qui s'attardaient sur des scènes de ce type ou même qui les reproduisaient eux-mêmes, dans le plus grand secret. Non, il préférait s'en écarter, surtout qu'il disposait d'une clarté d'esprit qui faisait défaut à Hermione, pour l'une des premières fois de son existence. Son regard balaya la pièce. Aucune source de lumière excepté ce qui ressemblait à s'en méprendre aux barreaux signifiant l'entrée d'un égout. Les égouts ou l'entrée d'une prison, comparaison bien plus juste au vue des circonstances.
La main d'Hermione s'échoua sur la joue de Blaise qu'elle caressa d'un toucher aérien. D'une voix chevrotante, elle prononça, avant de planter ses longues incisives dans sa lèvre tremblante :
— Je t'ai cru mort.
— J'ai aussi cru que j'allais mourir.
Un aveu honteux, un aveu de faiblesse. Aucun homme ne se serait autorisé un tel accès de vulnérabilité et pourtant, Blaise ne put le retenir. Sans doute parce qu'il n'était pas un homme comme tout autre, mais un être d'exception, un être qui avait déjà trop vécu, même avant la guerre. Hermione retint ses larmes, consciente d'à quel point son amant s'exposait en prononçant ces quelques paroles. Elle se raisonna rapidement et retrouva ses réflexes de médecin.
Elle sortit un flacon dans lequel elle avait versé un peu d'eau, pas suffisamment pour réhydrater un homme captif pendant plusieurs semaines, mais assez pour étancher sa soif jusqu'à ce qu'elle puisse donner des soins plus appropriés. Elle échangea un regard avec le métis, comme pour chercher son approbation. Celui-ci, soutenu par le mur aux pierres irrégulières, respirait par douloureuses inspirations et hocha faiblement la tête. Il luttait, mais il était épuisé, son estomac hurlait famine et la soif le tiraillait depuis de longues heures. Ses yeux secs clignèrent à plusieurs reprises, comme pour souligner ce « oui » muet. Hermione approcha le flacon des lèvres gercées de Blaise et y versa, lentement, le précieux liquide. Le jeune homme étouffa un gémissement lorsque l'eau humecta sa bouche, apaisa l'incendie de sa langue épaisse et pâteuse et celle de sa gorge.
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Cueillir les étoiles
FanfictionLe 1 septembre 1939, le second conflit mondial éclate. Deux idéologies s'opposent et s'affrontent avec pour unique objectif l'anéantissement ennemi. Quelques mois seulement après le début des combats, la France accuse une cuisante défaite. L'Alsace...