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Dans la nuit, Munich prenait des allures de géantes et son calme, loin de l'agitation du bal annuel, se faisait mortel. Les ombres qui dansaient serpentaient le long des allées et des places désertes pour de longues heures encore.

Hermione se mêlait à ces spectres portées, la peur lui nouant l'estomac. Elle tâchait de ne rien laisser paraître, emmitouflé dans un châle qui lui couvrait les épaules. Elle maudissait sa jupe à chaque pas alors que chaque pas se voyait ralenti par l'étoffe. George Weasley se tenait à ses côtés et lui emboîtait le pas dans un silence qui paraissait le mettre au supplice.

— Tu aurais dû mettre quelque chose de plus confortable.

— C'est bien une phrase d'homme, ça.

Hermione n'avait pas envie de débattre à ce sujet, surtout pas dans un pareil instant. Elle aurait volontiers enfilé un de ces pantalons que les hommes portaient en toute occasion, mais elle n'en possédait aucun. En voler un dans la penderie d'Harry ne lui avait pas paru correct, alors elle s'était résolue à porter l'une de ses jupes immenses qui découvraient à peine ses chevilles.

— C'est à droite.

Suivant l'indication, l'Alsacienne obtempéra. Elle n'était pas de très bonne compagnie, ce soir, et elle peinait à en avoir conscience. George conservait le silence de rigueur, bien que ce mutisme lui fût aussi peu coutumier qu'il lui était insupportable. Bavard intarissable, cette règle que personne n'avait jamais prononcée, mais qui faisait écho au silence de la ville endormie.

Ils parvinrent devant la demeure. Hermione l'observa comme d'une chimère, d'un monstre affreux dont elle devrait avoir peur.

— On dirait que c'est abandonné.

— Et pourtant, ça ne l'est pas. C'est qu'il cache bien son jeu, le bougre !

Hermione acquiesça sans rien ajouter de plus. Elle consulta sa montre tandis que George sortait une cigarette de la poche interne de sa veste. Une brise légère s'y engouffrait et la chaleur harassante de l'après-midi avait laissé place à de fraîches températures. Il l'alluma et exhala un nuage qui se confondit avec la pénombre nocturne.

— Je peux te poser une question.

Jamais George ne s'était gêné pour questionner quelqu'un et cela désarçonna Hermione qui battit des cils. Qu'avait-il à lui demander ?

— C'est une question personnelle, n'est-ce pas ?

— Plutôt.

— Pose-la, je n'y répondrai pas si j'estime que c'est trop personnel.

— Sauf que c'est une forme indirecte de réponse.

— Pose ta question.

Ils se connaissaient peu. Hermione avait déjà rencontré quelques fois les jumeaux Weasley avant que la guerre ne commence. Elle connaissait cette famille atypique et attachante depuis quelques années, mais la guerre les avait éloignés plus qu'il ne saurait l'admettre. L'Alsacienne réalisait à peine que l'impression risquait d'être identique si son chemin croisait à nouveau celui de Ron.

— Qu'est-ce qu'il y a entre Ron et toi ?

Elle s'octroya un court moment de réflexion avant de répondre, d'une voix égale, mais tout en fuyant singulièrement le regard que George déposait sur elle.

— Ce ne sont pas tes affaires, George.

— Tu es consciente que c'est une réponse quand même ?

Cueillir les étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant