Strasbourg, 30 novembre 1944.
Strasbourg était libre.
Depuis une semaine, la capitale alsacienne avait cessé d'être allemande.
Les habitants de la ville avaient vu déferler l'armée française dans les rues dans un choc phénoménal. La percée à travers la forêt des Vosges avait été si brutale que les Allemands installés à Strasbourg n'avaient même pas eu le temps de fuir. Durant la première journée de lutte, le 23 novembre, les transports en commun fonctionnaient toujours et la stupéfaction paralysait l'envahisseur.
La deuxième division blindée du général Leclerc, après avoir libéré entièrement la ville de Mulhouse deux jours plus tôt, avait déferlé sur la ville. Un chaos nouveau, qui avait presque déjà un goût agréable en bouche. Un sacrifice nécessaire pour le peuple alsacien écrasé sous la botte allemande depuis cinq ans. Un calvaire qui tendait à prendre fin dans le sang.
L'offensive avait débuté à sept heures le matin, à l'aube. La surprise avait été totale et si plusieurs colonnes avaient été arrêtées par des tranchées creusés de force par les Alsaciens eux-mêmes, plusieurs points stratégiques comme Kléber étaient tombés aux mains des Français. La surprise générale, presque une paralysie des Allemands, avait entraîné un nombre considérable de prisonniers. Ceux-là même qui vaquaient à leurs occupations alors que les chars passaient dans les rues de Strasbourg. Le choc n'aurait pas pu être plus grand, plus symboliquement libérateur.
En début d'après-midi, à précisément 14h20, le drapeau français flottait sur la cathédrale après cinq ans d'absence. La revanche absolue contre Hitler qui avait déshonoré le monument à son arrivée à Strasbourg. Strasbourg qui était enfin pris, enfin récupéré, mais pas encore entièrement libéré. Il avait fallu des jours aux colonnes françaises, à la deuxième division blindée, pour libérer entièrement la ville et que pour les combats cessent. Il faudra attendre des mois pour que les menaces s'évanouissent, jusqu'à ce que l'Allemagne nazie capitule.
Trois jours plus tôt, dans la nuit du 27 au 28 novembre, les Allemands s'étaient retirés de l'autre côté du Rhin avant de faire sauter le pont de Kehl. Les résistants venaient de jouer un rôle clé, ils avaient guidé les troupes au cœur de la ville en plus de les empêcher de quitter les territoires alsaciens. Harry et Hermione en avaient fait partie.
Bien des choses avaient changé depuis l'arrivée de Draco à Belfort. La Résistance avait pris une ampleur colossale et plus uniquement symbolique. Il ne s'agissait plus de résister, d'affaiblir l'ennemi, mais de le renverser. Une sorte d'énergie folle s'était épris d'Harry et il avait entraîné, avec lui, Blaise et Hermione. Draco avait mis quelques semaines à s'intégrer au mouvement, tiraillé par des années d'endoctrinement. Le Front Est avait pourtant changé sa vision de la guerre et les horreurs qu'il y avait eu, même indépendantes à sa propre souffrance physique, avaient formaté une toute autre pensée. Draco avait alors compris une chose : non seulement le Reich ne défendait pas une cause noble et son idéologie d'une Allemagne conquérante ne reposait que sur la frustration du Traité de Versailles, mais il fallait que cette guerre cesse. À tout prix.
Draco s'était alors engagé là où il n'aurait jamais pensé le faire. Sa mère lui avait ouvert la voie et dans la correspondance qu'ils entretenaient très régulièrement, elle semblait apaisée de savoir son fils dans un camp qui se battait pour la paix. Ainsi, son fils se faisait le défenseur de cet idéal, celui d'un monde enfin en paix. Il porterait la guerre dans son corps jusqu'à la fin de ses jours, mais il refusait d'y laisser davantage qu'un bras et qu'une innocence, qu'une pureté, à jamais envolées.
Les mois passés aux côtés de la Résistance avaient été plus pénibles que ce que Draco avait envisagé. Les Français faisaient preuve d'une méfiance sans cesse renouvelée et s'accordaient pas leur confiance à cet Allemand reconverti à leur cause. Toutefois, le jeune homme avait su se rendre utile et même s'illustrer d'une manière des plus atypiques. Ses cheveux blonds et ses yeux gris ainsi que son autorité naturelle lui avait permis de s'attirer la sympathie des Allemands, à Belfort comme à Strasbourg, et de voler de précieux documents. Les actions se multipliaient et Harry avait le sentiment d'avoir passé des mois l'oreille collée à un poste de radio, moyen de communication privilégié avec la presse clandestine, l'euphorie au bord des lèvres. L'Allemagne s'affaiblissait de jour en jour et sa chute était imminente. Les blindés soviétiques s'approchaient des grandes villes du Reich avec, pour objectif ultime, Berlin où le Führer s'était retranché. Là-bas même où il passerait, d'ici quelques mois, les derniers jours de sa vie avant d'y mettre un terme.
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Cueillir les étoiles
FanfictionLe 1 septembre 1939, le second conflit mondial éclate. Deux idéologies s'opposent et s'affrontent avec pour unique objectif l'anéantissement ennemi. Quelques mois seulement après le début des combats, la France accuse une cuisante défaite. L'Alsace...