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Strasbourg, 19 août 1940.

Le soleil se levait seulement, teintant de ses premières lueurs toutes les facettes de l'azur. L'obscurité laissait place aux faibles couleurs de l'aurore. Un spectacle émouvant dont peu de privilégiés avaient la chance d'être les témoins. Les rouages du temps se mettaient en place, à l'image d'une mécanique splendide, abandonnant la noirceur nocturne pour les nuances blafardes et pastelles de l'aube.

Harry était des seuls à se tenir ainsi, éveillé, en une heure si matinale. Hermione dormait encore sur ses deux oreilles de l'autre côté de la ville, bien au chaud entre ses draps blancs. Blaise aussi se reposait, profitant du silence parfait que la nuit emporterait avec elle. Tous étaient inquiets, Draco avait deux jours de retard. Deux longues journées sans la moindre trace de nouvelles. Lui était-il arrivé malheur ?

Harry luttait contre le sommeil, la fatigue des derniers jours guettant le moindre signe de faiblesse de sa part. Il mourait d'envie de rentrer se coucher, de laisser son corps glisser sur le matelas et fermer les yeux pour s'abandonner au néant, sans même frémir. Deux coups portés sur la porte le tirèrent de ces douces pensées et il se déplaça jusqu'à la porte, espérant voir se dessiner la silhouette de son amie sur le seuil. Il déverrouilla la porte d'un mouvement, tentant de paraître moins épuisé qu'il n'en avait l'air. Il ne parvint néanmoins pas à masquer sa déception en découvrant l'identité de ses visiteurs matinaux.

Luna se tenait sur le pallier, un sourire flottant sur ses lèvres rosées. Plongée dans la contemplation des quelques plantes qui bordaient les murs de la modeste demeure, elle ne remarqua même pas le regard étonné de son vis-à-vis.

—Luna ?

—Oh, bonjour Harry Potter, le salua-t-elle, coulant sur lui un regard pur, rêveur et immense.

Un court instant succéda ces paroles. Le juif dévisagea l'homme qui se tenait légèrement en retrait. Il arborait une couleur de peau presque similaire au blessé qui se reposait quelques mètres plus loin. Une lueur d'intelligence brillait dans ses yeux, contrastant avec ses traits durs qui, à eux seuls, l'auraient rendu peu avenant. Il accorda un sourire poli à l'égard d'Harry qui le lui rendit de bonne grâce.

—Qu'est-ce qui vous amène ? Il y a un problème avec le Chicaneur ?

—Non, aucun, répondit-elle.

—Alors que se passe-t-il ? Ton père est malade ? Il a besoin d'aide, peut-être ?

—Non, il se porte à merveille.

Percevant le point de rupture de la conversation approcher, l'inconnu prit les devants pour annoncer, calmement :

—Je m'appelle Dean Thomas. Nous sommes désolés de vous déranger à une heure aussi... matinale, mais pourrions-nous discuter à l'intérieur ?

—Oh, oui. Entrez, je vous en prie.

Harry avait immédiatement compris le message. Le sujet ne pouvait pas être évoqué ainsi, en pleine rue. En ces temps de guerre, il n'était pas bon de faire confiance à n'importe qui, les dénonciations étaient déjà monnaie courante et les oreilles traînaient là où l'on s'y attendait le moins. Ce fut donc de bonne grâce que le Français obtempéra et mena ses invités dans le salon, veillant à refermer la porte menant à la chambre de Blaise pour ne pas le déranger.

Ils s'installèrent autour d'une table, la mine grave de Dean contrastant avec l'air perpétuellement léger, presque mutin, de Luna. Dans l'optique de reprendre la conversation tout en conservant un semblant de politesse, Harry proposa :

Cueillir les étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant