Strasbourg, 31 décembre 1943.
La nuit était silencieuse et la maison, vide.
Le lendemain, Harry, Hermione et Blaise s'en iraient et les bagages étaient déjà prêts. Bien peu de choses, quelques habits rapiécés, l'indispensable à la survie, le reste demeurerait ici dans l'espoir d'un retour.
Harry était assis sur le bord de son lit, les mains sagement posées sur ses genoux. Il avait ouvert les rideaux alors qu'il ne se le permettait jamais. Une envie sordide d'observer les étoiles l'avait pris soudain et il n'était pas question de lutter contre un désir aussi impétueux. Ce jour possédait une symbolique particulière, il annonçait une nouvelle année passée sous le feu nazi, sous l'étreinte étouffante du régime autoritaire, et une nouvelle qui s'ouvrait sur la même perspective désolée. Pas d'espoirs, rien de nouveau, rien de meilleur.
Hermione s'était attelée devant les fourneaux aux côtés de Blaise dans l'espoir de s'occuper l'esprit. Ils avaient englouti leur repas de fête avec l'empressement des affamés et le ragoût à la sauce grasse accompagné d'un pain de maïs consistant avait disparu. Ils avaient fait l'effort d'entretenir une conversation légère, de parler de leurs souvenirs. Ils se connaissaient depuis quelques années seulement et se recroqueviller sur ses instants de bonheur leur avait permis de ne pas songer à l'incertitude de l'avenir. L'idée avait été énoncée par Hermione et, avec le recul, Harry avait passé ce qui s'approchait le plus d'une bonne soirée.
Harry redoutait autant son départ que l'idée de se rendre utile lui plaisait. Il continuait à aider Luna, mais cela s'arrêtait là. Le seul fait de mettre le nez dehors comprenait un danger imminent pour lui comme pour les deux individus dont sa vie ne saurait être dissocier. À Belfort, noyau d'un des foyers de la Résistance, il pourrait se rendre utile. Ron lui apprendrait, il en était convaincu et à une heure où l'espoir s'amenuisait jusqu'à disparaître complètement, se savoir utile avait un impact surprenant.
Minuit approchait, plus que quelques minutes et l'année 1944 ouvrirait ses portes. Mystérieuse, elle ne permettrait à quiconque de deviner ce qu'elle amènerait.
Harry patienta et ses yeux retracèrent minutieusement les étoiles. Il songeait à Severus, à ses parents. Cet homme austère avait finalement retrouvé son amour de toujours, Lily, la propre mère d'Harry. Il regrettait de ne pas su apprécier pleinement Severus, il regrettait aussi que personne n'ait su l'aimer. Alors, il pensa à Draco. Il s'imagina son visage incrusté dans les phares lointains et balaya cette idée sitôt elle l'eut traversé. Il n'oublierait jamais son amant, il éloignait toute réflexion qui l'incluait dans le seul but de le protéger. Il espéra simplement que, là-bas, Draco lui adressait aussi quelques pensées. Quelques pensées et le vœu de se retrouver.
L'année 1944 s'ouvrit ainsi, baignée par la lumière des étoiles qui voulaient se laisser cueillir.
***
Belfort, 8 janvier 1944.
Blaise roulait dans les rues de Belfort avec une attention particulière. Ici aussi, la neige avait recouvert le sol d'une épaisse couche blanche et si on s'activait à déblayer, l'heure matinale justifiait ce désagrément. Le métis ne s'en plaignit pas. Les roues glissaient sur la route verglacée sous les quelques centimètres de poudreuse.
— Est-ce que tu es bien sûr de l'adresse, Harry ?
— Oui, tu veux que je te donne la lettre pour que tu la voies de tes propres yeux ?
— Et l'heure, tu es certain qu'il sera bien là quand nous arriverons ? Il n'est même pas six heures et tu connais Ron, il n'a jamais été matinale.
VOUS LISEZ
Cueillir les étoiles
FanfictionLe 1 septembre 1939, le second conflit mondial éclate. Deux idéologies s'opposent et s'affrontent avec pour unique objectif l'anéantissement ennemi. Quelques mois seulement après le début des combats, la France accuse une cuisante défaite. L'Alsace...